La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/07/2020 | FRANCE | N°430917

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 29 juillet 2020, 430917


Vu la procédure suivante :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 20 août 2015 par laquelle le directeur de la caisse d'allocations familiales des Ardennes a refusé de la décharger de la somme de 25 244,20 euros dont la récupération avait été décidée au titre d'indus de revenu de solidarité active, d'aide exceptionnelle de fin d'année et d'aide personnalisée au logement. Par un jugement n° 1502277 du 12 juillet 2016, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté cette demande.

Par une déc

ision n° 403339 du 6 avril 2018, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a ...

Vu la procédure suivante :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 20 août 2015 par laquelle le directeur de la caisse d'allocations familiales des Ardennes a refusé de la décharger de la somme de 25 244,20 euros dont la récupération avait été décidée au titre d'indus de revenu de solidarité active, d'aide exceptionnelle de fin d'année et d'aide personnalisée au logement. Par un jugement n° 1502277 du 12 juillet 2016, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté cette demande.

Par une décision n° 403339 du 6 avril 2018, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé ce jugement et renvoyé l'affaire au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne.

Par un jugement n° 1800780 du 11 décembre 2018, statuant sur renvoi du Conseil d'Etat, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande de Mme B....

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 21 mai et 21 août 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 11 décembre 2018 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de la caisse d'allocations familiales des Ardennes la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le décret n° 2012-1468 du 27 décembre 2012 ;

- le décret n° 2013-1294 du 30 décembre 2013 ;

- le décret n° 2014-1709 du 30 décembre 2014 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme C... D..., conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lyon Caen, Thiriez, avocat de Mme B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que Mme B..., bénéficiaire de l'aide personnalisée au logement et du revenu de solidarité active, a fait l'objet d'un contrôle de la caisse d'allocations familiales des Ardennes en juillet 2014, à l'issue duquel cette caisse a estimé qu'elle vivait toujours avec son mari, dont elle avait déclaré être séparée, et lui a en conséquence réclamé, le 23 mai 2015, le remboursement d'un indu de 25 244,20 euros, correspondant pour 6 717,62 euros à un indu d'aide personnalisée au logement versée au cours de la période de décembre 2012 à mai 2015, pour 17 459,43 euros à un trop-perçu d'allocation de revenu de solidarité active versée au cours de la même période et, pour 1 067,15 euros, à un indu d'aides exceptionnelles de fin d'année au titre des années 2012, 2013 et 2014. Mme B... se pourvoit en cassation contre le jugement du 11 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, statuant sur renvoi du Conseil d'Etat après annulation de son premier jugement, a rejeté la requête par laquelle elle demandait la décharge de sa dette.

2. D'une part, aux termes de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction en vigueur jusqu'au 31 décembre 2015 : " Toute personne résidant en France de manière stable et effective, dont le foyer dispose de ressources inférieures à un revenu garanti, a droit au revenu de solidarité active dans les conditions définies au présent chapitre. / Le revenu garanti est calculé, pour chaque foyer, en faisant la somme : / 1° D'une fraction des revenus professionnels des membres du foyer ; / 2° D'un montant forfaitaire, dont le niveau varie en fonction de la composition du foyer et du nombre d'enfants à charge. / Le revenu de solidarité active est une allocation qui porte les ressources du foyer au niveau du revenu garanti (...) ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 262-3 du même code : " L'ensemble des ressources du foyer, y compris celles qui sont mentionnées à l'article L. 132-1, est pris en compte pour le calcul du revenu de solidarité active (...) ". En vertu de l'article L. 262-10 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, le droit au revenu de solidarité active dit " socle ", permettant de porter les ressources du foyer au niveau du montant forfaitaire mentionné au 2° de l'article L. 262-2 de ce code, " est subordonné à la condition que le foyer fasse valoir ses droits : / 1° Aux créances d'aliments qui lui sont dues au titre des obligations instituées par les articles 203, 212, 214, 255, 342 et 371-2 du code civil ainsi qu'à la prestation compensatoire due au titre de l'article 270 du même code ; (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que l'ensemble des ressources du foyer doit en principe être pris en compte pour le calcul de l'allocation de revenu de solidarité active. Toutefois, les revenus du conjoint du bénéficiaire du revenu de solidarité active n'ont à être pris en compte qu'à hauteur des sommes qu'il verse à ce dernier ou des prestations en nature qu'il lui sert, au titre, notamment, de ses obligations alimentaires lorsque les époux, entre lesquels a cessé toute communauté de vie, tant matérielle qu'affective, étant ainsi séparés de fait, ils ne constituent plus un foyer au sens des articles L. 262-2 et L. 262-3 du code de l'action sociale et des familles ou lorsque, du fait de sa résidence à l'étranger, le conjoint du bénéficiaire ne peut être pris en compte pour le calcul du revenu garanti.

4. En outre, les décrets des 27 décembre 2012, 30 décembre 2013 et 30 décembre 2014 relatifs aux aides exceptionnelles de fin d'année attribuées à certains allocataires du revenu de solidarité active prévoient qu'une aide exceptionnelle est attribuée aux allocataires du revenu de solidarité active qui ont droit à cette allocation au titre du mois de novembre ou, à défaut, du mois de décembre de l'année considérée, à condition que les ressources du foyer n'excèdent pas un certain montant.

5. D'autre part, l'article L. 351-3 du code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que : " Le montant de l'aide personnalisée au logement est calculé en fonction d'un barème défini par voie réglementaire. / Ce barème est établi en prenant en considération : / (...) 2. Les ressources du demandeur et, s'il y a lieu, de son conjoint et des personnes vivant habituellement à son foyer (...) ". Aux termes du I de l'article R. 351-5 du même code : " Les ressources prises en considération pour le calcul de l'aide personnalisée sont celles perçues par le bénéficiaire, son conjoint et les personnes vivant habituellement au foyer. (...) ". En vertu de l'article R. 351-29 de ce code, est assimilée au conjoint mentionné à l'article R. 351-5 la personne vivant en concubinage avec le bénéficiaire de l'aide personnalisée au logement ou le partenaire lié à celui-ci par un pacte civil de solidarité et la notion de couple s'applique aux personnes mariées, vivant en concubinage ou liées par un pacte civil de solidarité.

6. Il résulte de ces dispositions que les ressources prises en considération pour le calcul de l'allocation d'aide personnalisée au logement sont celles qui sont perçues par le bénéficiaire, son conjoint, son concubin ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité et les personnes vivant habituellement au foyer. En cas de séparation de fait des époux, se manifestant par la cessation entre eux de toute communauté de vie, tant matérielle qu'affective, seules les sommes que le conjoint verse au bénéficiaire ou, le cas échéant, les prestations en nature qu'il lui sert, au titre notamment de ses obligations alimentaires, peuvent être prises en compte dans le calcul des ressources de ce dernier, dans les conditions définies à l'article R. 351-5 du code de la construction et de l'habitation.

7. Après avoir relevé que M. et Mme B... avaient cessé toute communauté de vie affective depuis au moins l'année 2005 et le second mariage de M. B... en Algérie, le tribunal administratif a estimé qu'ils avaient en revanche conservé entre eux une communauté de vie matérielle, caractérisée par la disposition commune d'un logement, en vertu d'un bail dont ils sont co-titulaires et dont l'adresse est celle utilisée par M. B... au titre de plusieurs comptes bancaires qu'il détient auprès d'agences bancaires localisées dans les Ardennes et la Marne, dont deux conjointement avec Mme B..., ainsi que par le financement par M. B..., dans une proportion importante eu égard aux ressources de Mme B..., de charges du foyer. En en déduisant que M. et Mme B... ne pouvaient être regardés comme séparés de fait et que l'intégralité des revenus de M. B... devait par suite être prise en compte dans le calcul des ressources du foyer pour la détermination des droits de Mme B... au bénéfice de l'aide personnalisée au logement, du revenu de solidarité active et des aides exceptionnelles de fin d'année au titre des années 2012, 2013 et 2014, le tribunal administratif, qui n'a pas entaché son jugement d'une contradiction de motifs, n'a pas commis d'erreur de droit.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 11 décembre 2018 qu'elle attaque.

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font, par suite, obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la caisse d'allocations familiales des Ardennes, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de Mme B... est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B..., au ministre des solidarités et de la santé, au département des Ardennes et à la caisse d'allocations familiales des Ardennes.


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 430917
Date de la décision : 29/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 29 jui. 2020, n° 430917
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Bénédicte Fauvarque-Cosson
Rapporteur public ?: Mme Marie Sirinelli
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 04/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:430917.20200729
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award