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22/07/2020 | FRANCE | N°440681

France | France, Conseil d'État, 2ème chambre, 22 juillet 2020, 440681


Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'arrêté en date du 21 juin 2019 par lequel le maire de la commune de Saturargues (Hérault) ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux déposée par la société Hérault THD pour la réalisation d'un local technique sur la parcelle cadastrée section C n° 75.

Par une ordonnance n° 2001162 du 7 avril 2020, le juge des référ

és du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Par un pourvoi, ...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'arrêté en date du 21 juin 2019 par lequel le maire de la commune de Saturargues (Hérault) ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux déposée par la société Hérault THD pour la réalisation d'un local technique sur la parcelle cadastrée section C n° 75.

Par une ordonnance n° 2001162 du 7 avril 2020, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Par un pourvoi, enregistré le 18 mai 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande de suspension ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saturargues et de la société Hérault THD la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Fabio Gennari, auditeur,

- les conclusions de Mme Sophie Roussel, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de M. A... ;

1. Aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ".

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

2. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.

3. Le premier alinéa ajouté à l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme par l'article 80 de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique dispose que : " Un recours dirigé contre une décision de non-opposition à déclaration préalable ou contre un permis de construire, d'aménager ou de démolir ne peut être assorti d'une requête en référé suspension que jusqu'à l'expiration du délai fixé pour la cristallisation des moyens soulevés devant le juge saisi en premier ressort ". Selon l'article R. 600-5 du même code : " Par dérogation à l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, et sans préjudice de l'application de l'article R. 613-1 du même code, lorsque la juridiction est saisie d'une requête relative à une décision d'occupation ou d'utilisation du sol régie par le présent code, ou d'une demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant une telle décision, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense (...) ".

4. Pour rejeter la demande de M. A... tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté en date du 21 juin 2019 par lequel le maire de la commune de Saturargues ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux déposée par la société Hérault THD, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier l'a déclarée irrecevable en application des dispositions précitées de l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme, faute pour cette demande d'avoir été présentée avant l'expiration du délai fixé par l'article R. 600-5 du même code pour la cristallisation des moyens. M. A... soutient que ces dispositions législatives méconnaissent les dispositions de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, dont il résulte qu'il ne doit pas être porté d'atteintes substantielles au droit des personnes intéressées d'exercer un recours effectif devant une juridiction.

5. Les dispositions contestées se bornent, sans affecter la substance du droit au recours, à enserrer dans des délais particuliers la possibilité d'assortir une requête en annulation de certaines autorisations d'urbanisme d'une demande de suspension de l'exécution de ces actes. Le législateur, qui a par ailleurs prévu que la condition d'urgence est présumée satisfaite, a ainsi entendu éviter que ne soit ralentie de façon excessive la réalisation du projet autorisé, notamment par l'introduction tardive de conclusions aux fins de suspension. Si, en application de ces dispositions, l'expiration du délai fixé pour la cristallisation des moyens a pour effet de rendre irrecevable l'introduction de telles conclusions, il appartient au pouvoir règlementaire, compétent pour fixer ce délai, de prévoir un délai clair, précis et suffisant pour garantir l'exercice effectif du recours en référé-suspension. Dans ces conditions et alors même que dans le cadre de la procédure juridictionnelle, aucune information spécifique sur l'existence de ce délai et les conséquences de son non-respect n'est exigée à l'égard des parties au litige, une telle exigence relevant au demeurant du pouvoir réglementaire, les dispositions législatives en cause ne peuvent être regardées comme portant atteinte au droit au recours effectif garanti par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789.

6. Par suite, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux.

7. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi.

Sur l'autre moyen du pourvoi :

8. Pour demander l'annulation de l'ordonnance qu'il attaque, M. A... soutient que le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a commis une erreur de droit en rejetant sa demande de suspension comme irrecevable en application des dispositions de l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme, alors que ces dispositions méconnaissent le droit d'accès au juge garanti par l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. Ce moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. A....

Article 2 : Le pourvoi de M. A... n'est pas admis.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B... A..., à la commune de Saturargues et à la société Hérault THD. Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre et à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.


Synthèse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 440681
Date de la décision : 22/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 22 jui. 2020, n° 440681
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Fabio Gennari
Rapporteur public ?: Mme Sophie Roussel
Avocat(s) : SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:440681.20200722
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