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02/07/2020 | FRANCE | N°427712

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 02 juillet 2020, 427712


Vu la procédure suivante :

M. et Mme D... B... ont demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler la décision implicite du 30 juin 2013 par laquelle le maire de la commune des Lilas a rejeté leur recours gracieux du 29 avril 2013 tendant au retrait du permis de construire du 8 octobre 2012 autorisant M. A... C... à agrandir une maison située 27 bis, rue de la République et, d'autre part, d'annuler ce permis de construire. Par un jugement n° 1308118 du 2 octobre 2014, le tribunal administratif a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 14VE03367 du 1

5 décembre 2016, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté...

Vu la procédure suivante :

M. et Mme D... B... ont demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler la décision implicite du 30 juin 2013 par laquelle le maire de la commune des Lilas a rejeté leur recours gracieux du 29 avril 2013 tendant au retrait du permis de construire du 8 octobre 2012 autorisant M. A... C... à agrandir une maison située 27 bis, rue de la République et, d'autre part, d'annuler ce permis de construire. Par un jugement n° 1308118 du 2 octobre 2014, le tribunal administratif a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 14VE03367 du 15 décembre 2016, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par M. et Mme B... contre ce jugement.

Par une décision n° 408105 du 7 mars 2018, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, sur le pourvoi de M. et Mme B... a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Versailles.

Par un nouvel arrêt n° 18VE00900 du 6 décembre 2018, la cour administrative d'appel de Versailles a annulé le jugement du tribunal administratif de Montreuil, ainsi que l'arrêté du maire des Lilas du 8 octobre 2012.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 5 février et 2 mai 2019, M. C... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête de M. et Mme B... ;

3°) de mettre à la charge de M. et Mme B... une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alain Seban, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Cécile Barrois de Sarigny, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de M. C... et à la SCP Gaschignard, avocat de M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 8 octobre 2012, le maire de la commune des Lilas a accordé un permis de construire à M. C... en vue de la réalisation d'une maison comportant deux étages et des combles, d'une hauteur de 9 mètres, sur une parcelle cadastrée D88, au 27 bis rue de la République, par la surélévation de la maison existante. Par un jugement du 2 octobre 2014, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande de M. et Mme B..., propriétaires d'une maison dite " Cacheux " située sur une parcelle voisine du terrain d'assiette du projet, tendant à l'annulation de ce permis de construire et de la décision implicite par laquelle le maire a refusé de le retirer. M. et Mme B... se sont pourvus en cassation contre l'arrêt du 15 décembre 2016 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel qu'ils ont formé contre ce jugement. Par une décision du 7 mars 2018, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Versailles. M. C... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 6 décembre 2018 par lequel cette cour, statuant sur l'appel formé par M. et Mme B... contre le jugement du tribunal administratif de Montreuil, a annulé ce jugement, ainsi que l'arrêté du maire des Lilas du 8 octobre 2012.

Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance :

2. L'article R.* 600-2 du code de l'urbanisme dispose que : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ". Aux termes de l'article R.* 424-15 du même code : " Mention du permis explicite ou tacite ou de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté (...) / Un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme règle le contenu et les formes de l'affichage ". L'article A. 424-16 de ce code dans sa rédaction applicable au litige dispose que : " Le panneau prévu à l'article A. 424-1 indique le nom, la raison sociale ou la dénomination sociale du bénéficiaire, la date et le numéro du permis, la nature du projet et la superficie du terrain ainsi que l'adresse de la mairie où le dossier peut être consulté. / Il indique également, en fonction de la nature du projet : / (...) d) Si le projet prévoit des démolitions, la surface du ou des bâtiments à démolir. "

3. En imposant que figurent sur le panneau d'affichage du permis de construire diverses informations sur les caractéristiques de la construction projetée, les dispositions citées au point 2 ont pour objet de permettre aux tiers, à la seule lecture de ce panneau, d'apprécier l'importance et la consistance du projet, le délai de recours contentieux ne commençant à courir qu'à la date d'un affichage complet et régulier. Il s'ensuit que si les mentions prévues par l'article A. 424-16 doivent, en principe, obligatoirement figurer sur le panneau d'affichage, une erreur affectant l'une d'entre elles ne conduit à faire obstacle au déclenchement du délai de recours que dans le cas où cette erreur est de nature à empêcher les tiers d'apprécier l'importance et la consistance du projet. La circonstance qu'une telle erreur puisse affecter l'appréciation par les tiers de la légalité du permis est, en revanche, dépourvue d'incidence à cet égard, dans la mesure où l'objet de l'affichage n'est pas de permettre par lui-même d'apprécier la légalité de l'autorisation de construire.

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le panneau d'affichage du permis litigieux portant sur l'agrandissement de la maison située 27 bis rue de la République mentionnait la construction de 98,5 m² de SHON et la démolition d'un garage sans indication de la surface appelée à être ainsi démolie et reconstruite. Il ressort en outre des pièces du dossier que la surface dont la démolition était autorisée excédait notablement celle du garage se trouvant sur la propriété. Dans ces conditions, c'est sans commettre d'erreur de droit ni dénaturer les pièces du dossier qui lui était soumis que la cour administrative d'appel de Versailles a jugé, par l'arrêt attaqué, que les tiers n'ont pas été mis à même d'apprécier la nature, la complexité et l'importance du projet et que, par suite, M. et Mme B... étaient fondés à soutenir que l'affichage en cause n'avait pu légalement faire courir le délai de recours à leur encontre.

Sur l'application de la règle posée par l'article UD 10-3-3 du règlement du plan local d'urbanisme :

5. Aux termes de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme, en vigueur à la date des décisions en litige, le règlement d'un plan local d'urbanisme peut : " (...) / 7° Identifier et localiser les éléments de paysage et délimiter les quartiers, îlots, immeubles, espaces publics, monuments, sites et secteurs à protéger, à mettre en valeur ou à requalifier pour des motifs d'ordre culturel, historique ou écologique et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur protection ; /(...) ". Aux termes de l'article UD 10-3-3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune des Lilas dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Lorsqu'il existe sur le terrain ou sur l'un des terrains contigus une construction repérée au titre de l'article L. 123-1-5 7°, les projets situés à proximité immédiate des bâtiments ainsi identifiés doivent être élaborés dans la perspective d'une mise en valeur de ce patrimoine. La hauteur maximale des constructions aux abords de la construction repérée doit s'inscrire dans un gabarit délimité parallèlement par : / - une horizontale d'une hauteur égale à la hauteur de la construction repérée, / - une verticale à une distance "L" équivalente à la hauteur à l'égout de la construction repérée, / - une oblique inclinée à 45°, / - et la ligne horizontale de 9 mètres (...) ". La règle de gabarit ainsi prévue s'applique aux projets situés à proximité immédiate d'une construction identifiée par ce règlement au titre du 7° de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme et implantée sur le terrain d'assiette du projet lui-même ou sur un terrain contigu.

6. D'une part, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que, pour l'application de la règle énoncée par l'article UD 10-3-3 du règlement du plan local d'urbanisme, la hauteur de la construction devait être appréciée à l'égout du toit. D'autre part, en se bornant, dans l'arrêt attaqué, à se prononcer explicitement sur ce point de droit, qui était seul discuté devant elle, sans faire ressortir les éléments de fait constants devant elle qui la conduisaient à juger que cette règle avait été méconnue, les juges du fond ont suffisamment motivé leur arrêt eu égard à l'argumentation dont ils étaient saisis.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de M. et Mme B..., qui n'ont pas la qualité de parties perdantes dans la présente instance, la somme que demande, à ce titre, M. C.... Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C... une somme de 2 000 euros à verser à M. et Mme B... au titre de ces dispositions. En revanche, ces dispositions font obstacle à ce que la somme demandée à ce titre M. et Mme B... soit mise à la charge de la commune des Lilas, laquelle n'a pas la qualité de partie dans la présente instance mais de simple observateur. Pour le même motif, les conclusions présentées sur le fondement de ces dispositions par cette commune contre M. et Mme B... ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de M. C... est rejeté.

Article 2 : M. C... versera à M. et Mme B... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par M. et Mme B... contre la commune des Lilas et par cette commune contre ces derniers, sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A... C..., à la commune des Lilas et à M. et Mme D... B....

Copie en sera adressée à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 427712
Date de la décision : 02/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 02 jui. 2020, n° 427712
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alain Seban
Rapporteur public ?: Mme Cécile Barrois de Sarigny
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER ; SCP BAUER-VIOLAS, FESCHOTTE-DESBOIS, SEBAGH ; SCP GASCHIGNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:427712.20200702
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