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19/06/2020 | FRANCE | N°427871

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 19 juin 2020, 427871


Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1085,03 euros en réparation du préjudice qu'il a subi du fait de la perte de ses effets personnels lors de son transfert au centre pénitentiaire de Réau puis au centre pénitentiaire de Laon et de la somme de 1 000 euros en réparation du préjudice de jouissance qu'il a subi du fait de la perte de ses effets personnels. Par un jugement n° 1601686 du 26 octobre 2018, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Par un pourvoi somma

ire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 11 février et 13 mai ...

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1085,03 euros en réparation du préjudice qu'il a subi du fait de la perte de ses effets personnels lors de son transfert au centre pénitentiaire de Réau puis au centre pénitentiaire de Laon et de la somme de 1 000 euros en réparation du préjudice de jouissance qu'il a subi du fait de la perte de ses effets personnels. Par un jugement n° 1601686 du 26 octobre 2018, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 11 février et 13 mai 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :

- d'annuler ce jugement ;

- réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

- de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de procédure pénale ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Christelle Thomas, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Anne Iljic, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B..., qui était détenu au centre de détention de Tarascon, a été transféré, le 28 novembre 2014, à titre de transit, au centre pénitentiaire de Réau, avant de rejoindre, le 2 décembre 2014, le centre pénitentiaire de Laon. Par un jugement du 26 octobre 2018, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la réparation du préjudice qu'il alléguait avoir subi du fait de la perte, à l'occasion de ce transit, de divers objets personnels. Le requérant se pourvoit en cassation contre ce jugement.

2. La responsabilité de l'Etat en cas de dommage aux biens des personnes détenues peut être engagée lorsque ce dommage est imputable, en tenant compte des contraintes pesant sur le service public pénitentiaire, à une carence de l'administration dans la mise en oeuvre des moyens nécessaires à la protection de ces biens.

3. Dans le cas particulier du transfert d'un détenu, il incombe aux chefs des établissements de départ et d'arrivée de prendre les mesures nécessaires à la protection de ses biens. Aux termes du IV de l'article 24 de l'annexe à l'article R. 57-6-18 du code de procédure pénale : " Lorsque la personne détenue est transférée, les objets lui appartenant sont déposés contre reçu entre les mains de l'agent de transfèrement s'ils ne sont pas trop lourds ou volumineux ; sinon, ils sont expédiés à la nouvelle destination de la personne détenue aux frais de cette dernière ou sont remis à un tiers désigné par elle, après accord du chef d'établissement ". Il découle de l'obligation de protéger les biens des détenus qu'en cas de transfert, le reçu, prévu par les dispositions précitées, remis à l'agent de transfèrement ainsi que, le cas échéant, au responsable de l'expédition des objets, doit, sauf urgence, être accompagné de l'inventaire précis de l'ensemble des objets personnels du détenu, dressé contradictoirement avec ce dernier.

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'en jugeant que M. B... n'établissait pas avoir été en possession d'un radio laser, d'une table de camping, de deux plaques chauffantes, d'un survêtement, d'une multiprise et d'un faitout au moment de son départ du centre pénitentiaire de Tarascon, faute d'établissement d'un inventaire dressé contradictoirement, alors qu'il avait produit devant lui des factures et des documents permettant d'étayer ses allégations, le tribunal administratif d'Amiens a entaché son jugement de dénaturation.

5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que M. B... est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.

6. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Il s'ensuit que son avocat peut se prévaloir des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Piwnica, Molinié, son avocat, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à cette société.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 26 octobre 2018 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif d'Amiens.

Article 3 : L'Etat versera à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. B..., une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et à la garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 427871
Date de la décision : 19/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 19 jui. 2020, n° 427871
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Christelle Thomas
Rapporteur public ?: Mme Anne Iljic
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:427871.20200619
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