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09/06/2020 | FRANCE | N°423383

France | France, Conseil d'État, 3ème chambre, 09 juin 2020, 423383


Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la commune des Baux-de-Provence à l'indemniser à hauteur de 4 000 euros du préjudice financier qu'il a subi du fait de la sanction d'exclusion temporaire des fonctions prononcée à son encontre. Par un jugement n° 1600385 du 19 juin 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les 20 août et 20 novembre 2018 et le 6 août 2019 au secrétariat du contentieux

du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jug...

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la commune des Baux-de-Provence à l'indemniser à hauteur de 4 000 euros du préjudice financier qu'il a subi du fait de la sanction d'exclusion temporaire des fonctions prononcée à son encontre. Par un jugement n° 1600385 du 19 juin 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les 20 août et 20 novembre 2018 et le 6 août 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement en tant que, après avoir reconnu le comportement fautif de la commune, il a rejeté ses conclusions indemnitaires ;

2°) de mettre à la charge de la commune des Baux-de-Provence la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Pauline Berne, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rousseau, Tapie, avocat de M. B... et à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la commune des Baux de Provence ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B..., qui est employé par la commune des Baux-de-Provence en qualité d'agent contractuel de droit public, a fait l'objet d'une sanction d'exclusion temporaire des fonctions de trente jours, prononcée par arrêté du maire de cette commune du 17 juillet 2015. Par lettre du 17 septembre 2015, M. B... a demandé à la commune de l'indemniser du préjudice financier qu'il estimait avoir subi en raison de l'absence de versement de sa rémunération au cours de la période d'exécution de cette sanction, selon lui illégale. Par un jugement n° 1600385 du 19 juin 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête de M. B... tendant à la condamnation de la commune des Baux-de-Provence à l'indemniser de ce préjudice financier, estimé à 4 000 euros. M. B... se pourvoit en cassation contre ce jugement en tant que, après avoir reconnu le comportement fautif de la commune, il a rejeté ses conclusions indemnitaires.

2. En vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre. Sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité. Pour l'évaluation du montant de l'indemnité due, doit être prise en compte la perte du traitement ainsi que celle des primes et indemnités dont l'intéressé avait, pour la période en cause, une chance sérieuse de bénéficier, à l'exception de celles qui, eu égard à leur nature, à leur objet et aux conditions dans lesquelles elles sont versées, sont seulement destinées à compenser des frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions. Enfin, il y a lieu de déduire, le cas échéant, le montant des rémunérations que l'agent a pu se procurer par son travail au cours de la période d'éviction.

3. Pour rejeter la demande indemnitaire présentée par M. B... en réparation du préjudice que lui a causé l'exécution de la sanction d'exclusion temporaire de trente jours prononcée à son encontre, le tribunal administratif de Marseille, après avoir relevé que cette mesure présentait un caractère disproportionné et que l'illégalité en résultant était de nature à engager la responsabilité de la commune, s'est borné à juger que cette dernière prendrait nécessairement une nouvelle sanction et régulariserait en conséquence la situation financière de son agent.

4. En statuant ainsi, le tribunal administratif s'est abstenu, soit de se prononcer sur les droits du requérant, soit de le renvoyer devant la commune pour qu'il procédé au règlement de tel aspect du litige dans les conditions déterminées par les motifs de son jugement. Ce faisant, le tribunal administratif a commis une erreur de droit et méconnu son office de juge de plein contentieux.

5. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen de son pourvoi, à demander l'annulation du jugement qu'il attaque, en tant que, après avoir reconnu que la commune avait commis une faute de nature à engager sa responsabilité, il statue sur le préjudice subi par lui.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune des Baux-de-Provence la somme de 3 000 euros à verser à M. B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M. B... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 19 juin 2018 est annulé en tant qu'il statue sur le préjudice subi par M. B....

Article 2 : L'affaire est renvoyée dans cette mesure au tribunal administratif de Marseille.

Article 3 : La commune des Baux-de-Provence versera la somme de 3 000 euros à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par la commune des Baux-de-Provence sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et à la commune des Baux-de-Provence.


Synthèse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 423383
Date de la décision : 09/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 09 jui. 2020, n° 423383
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Pauline Berne
Rapporteur public ?: Mme Marie-Gabrielle Merloz
Avocat(s) : SCP ROUSSEAU, TAPIE ; SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:423383.20200609
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