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08/01/2020 | FRANCE | N°423245

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 08 janvier 2020, 423245


Vu la procédure suivante :

M. A... B... a saisi le tribunal administratif de Montreuil d'une demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 26 juin 2017 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de carte de séjour temporaire, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois ou, à défaut, à ce qu'il lui soit enjoint de ré

examiner sa situation administrative dans un délai de deux mois. Par une or...

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a saisi le tribunal administratif de Montreuil d'une demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 26 juin 2017 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de carte de séjour temporaire, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois ou, à défaut, à ce qu'il lui soit enjoint de réexaminer sa situation administrative dans un délai de deux mois. Par une ordonnance n° 1707031 du 9 octobre 2017, la présidente du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Par une ordonnance n° 17VE03461 du 15 mai 2018, le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par M. B... contre cette ordonnance.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 14 août et 14 novembre 2018 et les 17 juillet et 3 décembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d' Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros, à verser à la SCP Zribi, Texier, son avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Yves Ollier, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Mireille Le Corre, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Zribi, Texier, avocat de M. B... ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 19 décembre 2019, présentée par M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, par un arrêté du 26 juin 2017, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté la demande de carte de séjour temporaire de M. B..., l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par une ordonnance du 9 octobre 2017, la présidente du tribunal administratif de Montreuil a rejeté comme manifestement irrecevable la demande de M. B... dirigée contre cet arrêté au motif qu'une partie des pièces jointes à la requête transmise par l'application Télérecours n'avaient pas été répertoriées par des signets distincts en dépit de la demande de régularisation faite par le greffe du tribunal. M. B... se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 15 mai 2018 par laquelle le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté son appel contre la première ordonnance.

2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours (...) peuvent, par ordonnance : / (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque (...) elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens (...) / Les présidents des formations de jugement des cours peuvent (...), par ordonnance, rejeter (...) les requêtes dirigées contre des ordonnances prises en application des 1° à 5° du présent article (...) ". Aux termes de l'article R. 612-1 du même code : " Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser. / (...) La demande de régularisation mentionne que, à défaut de régularisation, les conclusions pourront être rejetées comme irrecevables dès l'expiration du délai imparti (...) ".

3. Aux termes de l'article R. 414-3 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, relatif aux requêtes transmises par l'application Télérecours, prévue à l'article R. 414-1 du même code : " (...) Les pièces jointes sont présentées conformément à l'inventaire qui en est dressé. / Lorsque le requérant transmet, à l'appui de sa requête, un fichier unique comprenant plusieurs pièces, chacune d'entre elles doit être répertoriée par un signet la désignant conformément à l'inventaire mentionné ci-dessus. S'il transmet un fichier par pièce, l'intitulé de chacun d'entre eux doit être conforme à cet inventaire. Le respect de ces obligations est prescrit à peine d'irrecevabilité de la requête (...) ".

4. Les dispositions citées au point 3 relatives à la transmission de la requête et des pièces qui y sont jointes par voie électronique définissent un instrument et les conditions de son utilisation qui concourent à la qualité du service public de la justice rendu par les juridictions administratives et à la bonne administration de la justice. Elles ont pour finalité de permettre un accès uniformisé et rationalisé à chacun des éléments du dossier de la procédure, selon des modalités communes aux parties, aux auxiliaires de justice et aux juridictions. A cette fin, elles organisent la transmission par voie électronique des pièces jointes à la requête à partir de leur inventaire détaillé et font obligation à son auteur de les transmettre soit en un fichier unique, chacune d'entre elles devant alors être répertoriée par un signet la désignant, soit en les distinguant chacune par un fichier désigné, l'intitulé des signets ou des fichiers devant être conforme à l'inventaire qui accompagne la requête. Ces dispositions ne font pas obstacle, lorsque l'auteur de la requête entend transmettre un nombre important de pièces jointes constituant une série homogène eu égard à l'objet du litige, telles que des documents visant à établir la résidence en France d'un étranger au cours d'une année donnée, à ce qu'il les fasse parvenir à la juridiction en les regroupant dans un ou plusieurs fichiers sans répertorier individuellement chacune d'elles par un signet, à la condition que le référencement de ces fichiers ainsi que l'ordre de présentation, au sein de chacun d'eux, des pièces qu'ils regroupent soient conformes à l'énumération, figurant à l'inventaire, de toutes les pièces jointes à la requête.

5. Il résulte de ce qui précède qu'en jugeant que la requête de première instance formée par M. B... méconnaissait les dispositions de l'article R. 414-3 du code de justice administrative au seul motif que le fichier unique joint à cette requête comportait des signets dont plusieurs renvoyaient chacun à plusieurs pièces, sans rechercher si ces pièces pouvaient faire l'objet d'une présentation groupée conformément à ce qui vient d'être dit, l'auteur de l'ordonnance attaquée a commis une erreur de droit. Ainsi, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, M. B... est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance qu'il attaque.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

7. Si M. B... pouvait, ainsi qu'il a été dit au point 4, regrouper dans un même fichier les pièces visant à établir sa résidence en France au cours d'une année donnée sans répertorier individuellement chacune d'elles par un signet, c'était à la condition d'énumérer toutes ces pièces dans l'inventaire détaillé qui accompagne la requête et de les regrouper en respectant l'ordre indiqué par cet inventaire. Or il ressort des pièces du dossier que l'inventaire qui accompagnait la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Montreuil ne comportait pas l'énumération des pièces regroupées par années de présence en France. Dans ces conditions, les pièces jointes à la requête n'ont pas été présentées conformément aux exigences résultant de l'article R. 414-3 du code de justice administrative.

8. M. B... a été invité par le tribunal administratif à régulariser sa requête pour présenter les pièces jointes à l'appui de sa requête conformément à l'article R. 414-3 du code de justice administrative. Contrairement à ce qui est soutenu, les dispositions de l'article R. 612-1 du code de justice administrative n'imposaient pas que la demande qui lui a été adressée en ce sens précise les modalités de cette régularisation.

9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, la présidente du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande comme manifestement irrecevable.

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement des sommes que demande, à ce titre, M. B....

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance du 15 mai 2018 du président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Versailles est annulée.

Article 2 : La requête présentée par M. B... devant la cour administrative d'appel de Versailles et les conclusions présentées devant le Conseil d'Etat au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 423245
Date de la décision : 08/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 08 jan. 2020, n° 423245
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Yves Ollier
Rapporteur public ?: Mme Mireille Le Corre
Avocat(s) : SCP ZRIBI, TEXIER

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:423245.20200108
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