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27/12/2019 | FRANCE | N°426620

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 27 décembre 2019, 426620


Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner Pôle emploi, sous astreinte, à lui verser la somme de 13 650,55 euros, augmentée des intérêts de retard et de leur capitalisation, correspondant, d'une part, à l'allocation temporaire d'attente dont il estime avoir été indûment privé du 23 août 2012 au 5 août 2013 et du 22 mai au 2 juin 2014 et, d'autre part, à la réparation du préjudice moral résultant de cette privation. Par un jugement n° 1610168 du 27 février 2018, le tribunal administratif de Paris a fait droit à s

a demande en ce qui concerne la période du 22 mai au 2 juin 2014 et rejeté...

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner Pôle emploi, sous astreinte, à lui verser la somme de 13 650,55 euros, augmentée des intérêts de retard et de leur capitalisation, correspondant, d'une part, à l'allocation temporaire d'attente dont il estime avoir été indûment privé du 23 août 2012 au 5 août 2013 et du 22 mai au 2 juin 2014 et, d'autre part, à la réparation du préjudice moral résultant de cette privation. Par un jugement n° 1610168 du 27 février 2018, le tribunal administratif de Paris a fait droit à sa demande en ce qui concerne la période du 22 mai au 2 juin 2014 et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Par un arrêt n° 18PA02667 du 20 décembre 2018, enregistré le même jour au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la cour administrative d'appel de Paris a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré le 2 août 2018 au greffe de cette cour, présenté par M. B.... Par ce pourvoi et par un nouveau mémoire, enregistré le 29 avril 2019 au secrétariat de la section du contentieux, M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris ;

2°) de mettre à la charge de Pôle emploi la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Boulloche, son avocat, au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 ;

- le code du travail ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Arnaud Skzryerbak, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boulloche, avocat de M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B..., de nationalité géorgienne, est entré en France en juin 2012, en provenance de Pologne où il avait déjà présenté une demande d'asile, et a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile le 23 août 2012. Il a perçu l'allocation temporaire d'attente à compter du 6 août 2013. Toutefois, ayant fait l'objet d'un refus de séjour le 23 novembre 2012, il a été remis aux autorités polonaises le 2 septembre 2013, en vertu d'un arrêté préfectoral du 10 janvier 2013 pris en application du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers. De retour en France, il a de nouveau présenté une demande d'asile, enregistrée le 22 mai 2014, et a perçu l'allocation temporaire d'attente à compter du 3 juin suivant. Le statut de réfugié lui a été accordé par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 25 septembre 2014. M. B... a alors demandé au tribunal administratif de Paris de condamner Pôle emploi à lui verser la somme de 13 650,55 euros, augmentée des intérêts de retard et de leur capitalisation, correspondant, d'une part, à l'allocation temporaire d'attente dont il estime avoir été indûment privé du 23 août 2012 au 5 août 2013 et du 22 mai au 2 juin 2014 et, d'autre part, par des conclusions qui doivent être regardées comme dirigées contre l'Etat, à la réparation du préjudice moral qui en est résulté. Il se pourvoit en cassation contre le jugement du tribunal administratif de Paris du 27 février 2018 en tant que, accueillant sa demande au titre de la période du 22 mai au 2 juin 2014 seulement, il a rejeté le surplus de sa demande.

2. Aux termes de l'article L. 5423-8 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 5423-9, peuvent bénéficier d'une allocation temporaire d'attente : / 1° Les ressortissants étrangers dont le titre de séjour ou le récépissé de demande de titre de séjour mentionne qu'ils ont sollicité l'asile en France et qui ont présenté une demande tendant à bénéficier du statut de réfugié, s'ils satisfont à des conditions d'âge et de ressources (...) ". Aux termes de l'article R. 5423-28 du même code, alors en vigueur : " Le délai dans lequel doit être présentée la demande de paiement de l'allocation temporaire d'attente, est fixé à deux ans à compter du jour où les personnes intéressées remplissent l'ensemble des conditions exigées pour pouvoir prétendre au bénéfice de cette allocation ".

3. Il résulte de ces dispositions, d'une part, que le versement de l'allocation temporaire d'attente est dû à compter du moment où les conditions mises au bénéfice de cette allocation sont remplies et non à compter de la présentation d'une demande en ce sens à Pôle emploi et, d'autre part, que la demande de paiement de l'allocation doit être formée dans les deux ans suivant le jour où l'ensemble de ces conditions sont remplies.

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, ainsi que le tribunal l'a relevé dans son jugement, que Pôle emploi a informé M. B..., par un courrier du 19 août 2013, de l'ouverture de ses droits à l'allocation temporaire d'attente à compter du 6 août 2013. En jugeant que l'intéressé n'avait pas présenté à Pôle emploi de demande de versement de cette allocation avant le 4 janvier 2016, date postérieure à l'expiration du délai de deux ans fixé par les dispositions de l'article R. 5423-28 du code du travail citées ci-dessus, alors que l'ouverture des droits à l'allocation à compter du 6 août 2013 résultait nécessairement de la présentation d'une demande à cette fin, le tribunal administratif de Paris a dénaturé les pièces du dossier.

5. Par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, M. B... est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque en tant que, par son article 3, il rejette le surplus des conclusions de sa demande.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et sous réserve que la SCP Boulloche, avocat de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de Pôle emploi une somme de 1 500 euros à verser à cette société.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'article 3 du jugement du tribunal administratif de Paris du 27 février 2018 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Paris dans la mesure de la cassation prononcée.

Article 3 : Pôle emploi versera à la SCP Boulloche, avocat de M. B..., une somme de 1 500 euros, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A... B..., à Pôle emploi et à la ministre du travail.


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 426620
Date de la décision : 27/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 27 déc. 2019, n° 426620
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Arnaud Skzryerbak
Rapporteur public ?: Mme Marie Sirinelli
Avocat(s) : SCP BOULLOCHE

Origine de la décision
Date de l'import : 07/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:426620.20191227
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