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27/12/2019 | FRANCE | N°422644

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 27 décembre 2019, 422644


Vu la procédure suivante :

Mme B... C..., M. G... C..., Mme H... C..., Mme D... C..., M. A... C... et M. E... C... ont demandé au tribunal administratif de Lille de condamner le centre hospitalier de Roubaix, d'une part, à verser à Mme B... C... une somme de 727 066,62 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subi du fait des manquements de l'établissement lors de la prise en charge de son époux et, d'autre part, à verser à chacun de ses enfants une somme de 34 400 euros en réparation des préjudices subis en raison du décès de leur père. Par un jugement n

1405890 du 15 juin 2016, le tribunal administratif a condamné le ce...

Vu la procédure suivante :

Mme B... C..., M. G... C..., Mme H... C..., Mme D... C..., M. A... C... et M. E... C... ont demandé au tribunal administratif de Lille de condamner le centre hospitalier de Roubaix, d'une part, à verser à Mme B... C... une somme de 727 066,62 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subi du fait des manquements de l'établissement lors de la prise en charge de son époux et, d'autre part, à verser à chacun de ses enfants une somme de 34 400 euros en réparation des préjudices subis en raison du décès de leur père. Par un jugement n° 1405890 du 15 juin 2016, le tribunal administratif a condamné le centre hospitalier de Roubaix à verser une somme de 396 527,95 euros à Mme C..., une somme de 20 000 euros à chacun de ses enfants et rejeté le surplus des conclusions.

Par un arrêt n° 16DA01459 du 5 juin 2018, la cour administrative d'appel de Douai a, sur appel du centre hospitalier de Roubaix, ramené à 210 800 euros la somme que l'établissement a été condamné à verser à Mme B... C... et porté à 21 000 euros la somme qu'il a été condamné à verser à M. G... C..., Mme H... C..., Mme D... C..., M. A... C... et M. E... C....

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 27 juillet et 25 octobre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... C..., M. G... C..., Mme H... C..., Mme D... C..., M. A... C... et M. E... C... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt en tant qu'il rejette le surplus de leurs conclusions indemnitaires ;

2°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Roubaix la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Florian Roussel, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Cécile Barrois de Sarigny, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de M. G... C..., de Mme H... C..., de Mme D... C..., de M. A... C..., de M. E... C... et de Mme C... et à la SCP Boutet-Hourdeaux, avocat du centre hospitalier de Roubaix.

Considérant ce qui suit :

1. M. F... C..., hospitalisé le 8 novembre 1995 au service des urgences du centre hospitalier de Roubaix, y est décédé d'une septicémie le 20 décembre suivant. Par un jugement du 15 juin 2016, le tribunal administratif de Lille a condamné le centre hospitalier à verser une somme de 396 527,95 euros à son épouse et une somme de 20 000 euros à chacun de ses enfants. Par un arrêt du 5 juin 2018, la cour administrative d'appel de Douai a, sur appel du centre hospitalier de Roubaix et appel incident des demandeurs de première instance, ramené à 210 800 euros la somme due à Mme C... et porté à 21 000 euros la somme due à chacun des cinq enfants. Mme C... et autres se pourvoient en cassation contre cet arrêt en tant qu'il rejette le surplus de leurs conclusions.

Sur la perte de chance :

2. Il ressort des termes de l'arrêt attaqué que, pour juger que la perte de chance de survie dont M. C... avait été privé en raison des manquements commis par le centre hospitalier était de 60 %, la cour administrative d'appel s'est fondée, d'une part sur ce que l'expert judiciaire avait évalué cette perte de chance à 80 % et, d'autre part, sur ce que ce taux devait être diminué en raison de ce que l'intéressé avait tardé à se présenter au service des urgences.

3. En prenant ainsi en compte, pour réduire le taux de perte de chance retenu par l'expert, la circonstance que le patient avait tardé à se rendre aux urgences de l'établissement, alors qu'il ressortait des termes mêmes du rapport d'expertise que le taux de perte de chance qu'il proposait de retenir prenait déjà en compte l'état de santé dégradé du patient à la date de son admission, la cour a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis.

Sur le calcul du préjudice économique :

4. D'une part, en se référant, pour évaluer le préjudice économique subi par la veuve et les enfants de M. C... entre la date du décès de ce dernier et celle de la lecture de son arrêt, aux revenus moyens du ménage au cours des dix premiers mois de l'année 1995, sans procéder, ainsi qu'il lui était demandé, à l'actualisation du montant de ce revenu de référence, entre 1995 et 2018, la cour a commis une erreur de droit.

5. D'autre part, en se référant, pour évaluer les pertes de revenus futures de Mme C... et de ses enfants, à un coefficient de capitalisation de 16,323, sans préciser le barème de capitalisation dont il était fait application, la cour a insuffisamment motivé son arrêt.

6. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens du pourvoi, Mme C... et autres sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il rejette le surplus de leurs conclusions.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier de Roubaix le versement d'une somme de 500 euros chacun à Mme B... C..., à M. G... C..., à Mme H... C..., à Mme D... C..., à M. A... C... et à M. E... C..., au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise, au même titre, à la charge de Mme C... et autres, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 5 juin 2018 est annulé en tant qu'il rejette le surplus des conclusions de Mme C... et autres.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Douai, dans la mesure de la cassation prononcée.

Article 3 : Le centre hospitalier de Roubaix versera une somme de 500 euros chacun à Mme B... C..., à M. G... C..., à Mme H... C..., à Mme D... C..., à M. A... C... et à M. E... C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier de Roubaix au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme B... C..., première requérante dénommée et au centre hospitalier de Roubaix.

Copie en sera adressée à la caisse primaire d'assurance maladie de Roubaix.


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 422644
Date de la décision : 27/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 27 déc. 2019, n° 422644
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Florian Roussel
Rapporteur public ?: Mme Cécile Barrois de Sarigny
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO ; SCP BOUTET-HOURDEAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 07/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:422644.20191227
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