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27/12/2019 | FRANCE | N°420404

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 27 décembre 2019, 420404


Vu la procédure suivante :

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de La Réunion de prononcer la décharge de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive auxquelles ils ont été assujettis à raison d'un permis de construire délivré par le maire de Saint-Paul de La Réunion le 13 septembre 2013. Par un jugement n° 1600731 du 8 mars 2018, le tribunal administratif de La Réunion, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions des requérants à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'instance, a fait dr

oit au surplus des conclusions de leur demande.

Par un pourvoi sommaire et...

Vu la procédure suivante :

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de La Réunion de prononcer la décharge de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive auxquelles ils ont été assujettis à raison d'un permis de construire délivré par le maire de Saint-Paul de La Réunion le 13 septembre 2013. Par un jugement n° 1600731 du 8 mars 2018, le tribunal administratif de La Réunion, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions des requérants à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'instance, a fait droit au surplus des conclusions de leur demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 mai et 7 août 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de la cohésion des territoires demande au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code du patrimoine ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Sylvain Humbert, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de M. et Mme A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite de la destruction par un incendie de leur habitation située à Saint-Paul de La Réunion, M. et Mme A... ont sollicité auprès du maire de cette commune la délivrance d'un permis de construire une nouvelle habitation, qui leur a été accordé par arrêté du 13 septembre 2013. Les 30 janvier et 15 octobre 2015, le directeur de l'environnement, de l'aménagement et du logement de la Réunion a émis des titres de perception à leur encontre en vue du recouvrement de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive. Le ministre de la cohésion des territoires se pourvoit en cassation contre le jugement du 8 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de La Réunion, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements intervenus en cours d'instance, a fait droit au surplus de la requête de M. et Mme A... tendant à la décharge de ces impositions.

Sur la redevance d'archéologie préventive :

2. Le produit de la redevance d'archéologie préventive, était, en vertu de l'article L. 524-11 du code du patrimoine dans sa rédaction applicable à l'imposition en litige, reversé à l'Institut national des recherches archéologiques préventives, établissement public national à caractère administratif ou, après prélèvement d'un pourcentage au profit du Fonds national pour l'archéologie préventive, à une collectivité territoriale ou à un groupement de collectivités territoriales dans le cas où ils ont confié à leur propre service archéologique l'ensemble des opérations d'aménagement ou de travaux réalisés sur leur territoire. Compte tenu de ces règles d'affectation, le litige concernant cette redevance ne saurait être regardé comme relatif à un impôt local au sens de l'article R. 811-1 définissant les matières dans lesquelles les tribunaux administratifs statuent en dernier ressort. Dès lors, le pourvoi du ministre de la cohésion territoriale dirigé contre l'article 2 du jugement attaqué, en tant qu'il prononce la décharge de la redevance d'archéologie préventive mise à la charge de M. et Mme A..., doit être regardé comme un appel relevant de la compétence de la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Sur la taxe d'aménagement :

3. Aux termes de l'article L. 331-6 du code de l'urbanisme : " Les (...) opérations de construction (...) soumises à un régime d'autorisation en vertu du présent code donnent lieu au paiement d'une taxe d'aménagement, sous réserve des dispositions des articles L. 331-7 à L. 331-9 ". Aux termes de l'article L. 331-7 de ce code dans sa rédaction applicable à l'année en litige : " Sont exonérés de la part communale ou intercommunale de la taxe : (...) 8° La reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit ou démoli depuis moins de dix ans dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article L. 111-3 (...) ". Enfin, aux termes du premier alinéa de l'article L. 111-3 du même code dans sa rédaction applicable à l'année en litige : " La reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit ou démoli depuis moins de dix ans est autorisée nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale, le plan local d'urbanisme ou le plan de prévention des risques naturels prévisibles en dispose autrement, dès lors qu'il a été régulièrement édifié ".

4. Après avoir relevé que la reconstruction de l'habitation des époux A... avait eu pour conséquence la création d'une surface supplémentaire de plancher de 16 m², le tribunal administratif de La Réunion a jugé qu'eu égard à cette faible augmentation de la surface existante, cette habitation devait être regardée comme ayant été reconstruite à l'identique au sens des dispositions du 8° de l'article L. 331-7 du code de l'urbanisme citées au point 3. En statuant ainsi, sans rechercher si l'implantation de la nouvelle construction, ses dimensions et ses aménagements intérieurs et extérieurs avaient fait l'objet de modifications autres que mineures, le tribunal a entaché son jugement d'erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, ce jugement doit être annulé en tant qu'il prononce la décharge de la taxe d'aménagement à laquelle ont été assujettis M. et Mme A....

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

7. Il ressort des plans joints à la demande du permis de construire délivré aux époux A... que les dimensions et l'aspect extérieur de la construction autorisée, dont deux façades comprennent des avancées latérales et qui comporte un étage supérieur dénommé " R+1 " accueillant deux chambres, diffèrent de l'habitation démolie, de forme rectangulaire et de plain-pied. Ces différences n'étant pas mineures, le bâtiment ne constitue pas une reconstruction à l'identique du bâtiment détruit, au sens des dispositions de l'article L. 111-3 et du 8° de l'article L. 331-7 du code de l'urbanisme citées au point 3. Par suite, M. et Mme A... ne sont pas fondés à demander la décharge de la taxe d'aménagement à laquelle ils ont été assujettis à raison de cette construction.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement des conclusions présentées par le ministre de la cohésion des territoires tendant à l'annulation du jugement du 8 mars 2018 du tribunal administratif de La Réunion en tant qu'il prononce la décharge de la redevance d'archéologie préventive mise à la charge de M et Mme A... est attribué à la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Article 2 : Le jugement du 8 mars 2018 du tribunal administratif de La Réunion est annulé en tant qu'il prononce la décharge de la taxe d'aménagement mise à la charge de M. et Mme A... à raison de la construction autorisée par le permis de construire délivré par le maire de Saint-Paul de La Réunion le 13 septembre 2013.

Article 3 : La demande présentée par M. et Mme A... devant le tribunal administratif de La Réunion tendant à la décharge de la taxe d'aménagement est rejetée.

Article 4 : Les conclusions présentées par M. et Mme A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme A... et à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et à la présidente de la cour administrative d'appel de Bordeaux.


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 420404
Date de la décision : 27/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 27 déc. 2019, n° 420404
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Sylvain Humbert
Rapporteur public ?: Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon
Avocat(s) : SCP GATINEAU, FATTACCINI

Origine de la décision
Date de l'import : 07/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:420404.20191227
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