La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/12/2019 | FRANCE | N°427109

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 24 décembre 2019, 427109


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 15 janvier et 15 avril 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 15 novembre 2018 du Conseil national de l'ordre des médecins, statuant en formation restreinte, le suspendant, sur le fondement des dispositions de l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique, pour une durée de deux ans, du droit d'exercer la médecine et lui enjoignant de suivre une formation de re

mise à niveau dans le cadre du diplôme inter-universitaire de médecine g...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 15 janvier et 15 avril 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 15 novembre 2018 du Conseil national de l'ordre des médecins, statuant en formation restreinte, le suspendant, sur le fondement des dispositions de l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique, pour une durée de deux ans, du droit d'exercer la médecine et lui enjoignant de suivre une formation de remise à niveau dans le cadre du diplôme inter-universitaire de médecine générale et de réaliser un stage pratique chez un praticien d'une durée de six mois ;

2°) de mettre à la charge du Conseil national de l'ordre des médecins la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Fuchs, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Richard, avocat de M. A... et à la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat du Conseil national de l'ordre des médecins.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique : " I. - En cas d'insuffisance professionnelle rendant dangereux l'exercice de la profession, la suspension temporaire, totale ou partielle, du droit d'exercer est prononcée par le conseil régional ou interrégional pour une période déterminée (...). / II. - La suspension ne peut être ordonnée que sur un rapport motivé établi à la demande du conseil régional ou interrégional dans les conditions suivantes : / 1° Pour les médecins, le rapport est établi par trois médecins qualifiés dans la même spécialité que celle du praticien concerné désignés comme experts, le premier par l'intéressé, le deuxième par le conseil régional ou interrégional et le troisième par les deux premiers experts. Ce dernier est choisi parmi les personnels enseignants et hospitaliers titulaires de la spécialité. Pour la médecine générale, le troisième expert est choisi parmi les personnels enseignants titulaires ou les professeurs associés ou maîtres de conférences associés des universités (...) / IV.- Les experts procèdent ensemble, sauf impossibilité manifeste, à l'examen des connaissances théoriques et pratiques du praticien. Le rapport d'expertise est déposé au plus tard dans le délai de six semaines à compter de la saisine du conseil. Il indique les insuffisances relevées au cours de l'expertise, leur dangerosité et préconise les moyens de les pallier par une formation théorique et, si nécessaire, pratique. (...) / VI. - Si le conseil régional ou interrégional n'a pas statué dans le délai de deux mois à compter de la réception de la demande dont il est saisi, l'affaire est portée devant le Conseil national de l'ordre. / VII. - La décision de suspension temporaire du droit d'exercer pour insuffisance professionnelle définit les obligations de formation du praticien. / La notification de la décision mentionne que la reprise de l'exercice professionnel par le praticien ne pourra avoir lieu sans qu'il ait au préalable justifié (...) avoir rempli les obligations de formation fixées par la décision (...) ".

2. En application des dispositions de l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique cité ci-dessus, la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins, auquel l'affaire avait été renvoyée en application des dispositions du VI du même article, a, par la décision attaquée du 15 novembre 2018, suspendu M. A..., médecin spécialiste qualifié en médecine générale, du droit d'exercer la médecine pendant une durée de deux ans, lui a fixé l'obligation de suivre une formation de remise à niveau dans le cadre du diplôme inter-universitaire de médecine générale ainsi que de réaliser un stage pratique chez un praticien d'une durée de six mois et a subordonné la reprise de son activité à la justification du suivi de cette formation.

3. En premier lieu, la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins, qui s'est expressément appropriée certains constats et certaines préconisations de l'expertise conduite, en application des dispositions du IV de l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique, sur les connaissances théoriques et pratiques de M. A..., lesquels mentionnaient notamment les dangers encourus par ses patients, a suffisamment motivé sa décision.

4. En deuxième lieu, dès lors que l'instance ordinale fait état dans sa décision de nombreux éléments de nature à prouver son insuffisance professionnelle, M. A... n'est en tout état de cause pas fondé à soutenir que la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins aurait entaché sa décision d'erreur de droit en faisant peser sur lui la charge de prouver qu'il disposait des connaissances nécessaires à l'exercice de la médecine.

5. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier, qui font notamment apparaître, d'une part, la pratique répétée de prescriptions médicamenteuses potentiellement dangereuses et, d'autre part, un manque caractérisé de connaissances en " soins premiers " de pédiatrie, de gynécologie et de médecine de l'adulte, que M. A... présentait des insuffisances graves dans sa pratique quotidienne de la médecine. Par suite, en estimant dangereux l'exercice de sa profession et en prononçant à son encontre, par la décision attaquée, une mesure de suspension temporaire du droit d'exercer pendant deux ans avec l'obligation de suivre une formation de remise à niveau dans le cadre du diplôme inter-universitaire de médecine générale ainsi que de réaliser un stage pratique chez un praticien d'une durée de six mois, la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins a fait une exacte application des dispositions de l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique.

6. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque. Par suite, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge du Conseil national de l'ordre des médecins, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le Conseil national de l'ordre des médecins au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le Conseil national de l'ordre des médecins au titre de l'article L. 761-1 du code de la justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au Conseil national de l'ordre des médecins.


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 427109
Date de la décision : 24/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 24 déc. 2019, n° 427109
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Fuchs
Rapporteur public ?: M. Raphaël Chambon
Avocat(s) : SCP RICHARD ; SCP MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 07/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:427109.20191224
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award