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19/12/2019 | FRANCE | N°423263

France | France, Conseil d'État, 3ème - 8ème chambres réunies, 19 décembre 2019, 423263


Vu la procédure suivante :

Par une décision du 20 février 2019, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de la société DMS dirigées contre l'arrêt no 17LY04226 du 28 juin 2018 de la cour administrative d'appel de Lyon, en tant qu'elles portent sur l'amende prévue par l'article 1737 du code général des impôts au titre des années 2011, 2012 et 2013.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 avril 2019, le ministre de l'action et des comptes publics s'en remet à la sagesse du Conseil d'Etat.

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Vu la procédure suivante :

Par une décision du 20 février 2019, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de la société DMS dirigées contre l'arrêt no 17LY04226 du 28 juin 2018 de la cour administrative d'appel de Lyon, en tant qu'elles portent sur l'amende prévue par l'article 1737 du code général des impôts au titre des années 2011, 2012 et 2013.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 avril 2019, le ministre de l'action et des comptes publics s'en remet à la sagesse du Conseil d'Etat.

En application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées que la décision du Conseil d'Etat était susceptible d'être fondée sur le moyen, relevé d'office, tiré de la méconnaissance du champ d'application de la loi en ce qui concerne les personnes à la charge desquelles l'amende prévue au 1 du I de l'article 1737 peut être mise.

Par un mémoire, enregistré le 9 mai 2019, la société déclare faire sien ce moyen relevé d'office.

Par un mémoire, enregistré le 14 mai 2019, le ministre de l'action et des comptes publics déclare maintenir sa position.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Déborah Coricon, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. A... Cytermann, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat de la société DMS ;

Considérant ce qui suit :

I. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société DMS, qui exerce une activité de démolition et de location de bennes de chantier, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle lui ont notamment été infligées des majorations pour manquement délibéré et l'amende prévue par le I de l'article 1737 du code général des impôts au titre des années 2011, 2012 et 2013. Le tribunal administratif de Lyon et la cour administrative d'appel de Lyon n'ayant pas fait droit à ses conclusions en ce qui concerne cette amende, elle demande l'annulation de l'arrêt 28 juin 2018 par lequel la cour a rejeté sa requête sur ce point.

2. Aux termes du I de l'article 1737 du code général des impôts : " Entraîne l'application d'une amende égale à 50 % du montant : / 1. Des sommes versées ou reçues, le fait de travestir ou dissimuler l'identité ou l'adresse de ses fournisseurs ou de ses clients, les éléments d'identification mentionnés aux articles 289 et 289 B et aux textes pris pour l'application de ces articles ou de sciemment accepter l'utilisation d'une identité fictive ou d'un prête-nom ". Il résulte de ces dispositions que l'administration peut mettre l'amende ainsi prévue à la charge de la personne qui a délivré la facture ou à la charge de la personne destinataire de la facture si elle établit que la personne concernée a soit travesti ou dissimulé l'identité, l'adresse ou les éléments d'identification de son client ou de son fournisseur, soit accepté l'utilisation, en toute connaissance de cause, d'une identité fictive ou d'un prête-nom.

3. En se bornant à constater que les éléments d'identification du fournisseur avaient été travestis de façon à laisser croire que les sommes dues étaient taxables à la taxe sur la valeur ajoutée, sans rechercher si la société DMS, destinataire des factures litigieuses, avait sciemment accepté l'utilisation, en toute connaissance de cause, d'une identité fictive ou d'un prête-nom sur ces factures, la cour a commis une erreur de droit.

4. Il résulte de ce qui précède que la société DMS est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque en tant qu'il statue sur l'amende mise à sa charge au titre du 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

6. Il résulte de l'instruction que les factures relatives aux travaux effectués par M. A... ont été libellées au nom de son entreprise individuelle Exploitant Forestier avec son numéro SIRET, alors que cette entreprise a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 19 décembre 2003 et n'était en conséquence plus autorisée à établir des factures. Il résulte également de l'instruction que la société requérante, qui avait recours à ces prestations de sous-traitance, n'a pas procédé aux vérifications qui lui incombaient en vertu de l'article L. 8222-1 du code du travail et qu'elle réglait ces factures en émettant des chèques au nom de M. A..., qui a, par ailleurs, des liens de parenté avec son gérant. Il s'ensuit que la société DMS a sciemment accepté que son fournisseur utilise, sur ses factures, une identité fictive.

7. Il résulte de ce qui précède que la société DMS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement qu'elle attaque, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'amende litigieuse.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 28 juin 2018 de la cour administrative d'appel de Lyon est annulé en tant qu'il statue sur l'amende mise à la charge de la société DMS sur le fondement des dispositions du 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts.

Article 2 : Les conclusions de la société DMS dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Lyon du 24 octobre 2017 en tant qu'il statue sur l'amende qui lui a été infligée sur le fondement du 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts et tendant à la décharge de cette amende ainsi que ses conclusions présentées au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société DMS et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 3ème - 8ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 423263
Date de la décision : 19/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-04-015 CONTRIBUTIONS ET TAXES. GÉNÉRALITÉS. AMENDES, PÉNALITÉS, MAJORATIONS. - AMENDE POUR FACTURES DE COMPLAISANCE (I DE L'ART. 1737 DU CGI) - AMENDE POUVANT ÊTRE MISE À LA CHARGE DE L'ÉMETTEUR DE LA FACTURE OU DE SON DESTINATAIRE - CONDITIONS.

19-01-04-015 Il résulte du I de l'article 1737 du code général des impôts (CGI) que l'administration peut mettre l'amende ainsi prévue à la charge de la personne qui a délivré la facture ou à la charge de la personne destinataire de la facture si elle établit que la personne concernée a soit travesti ou dissimulé l'identité, l'adresse ou les éléments d'identification de son client ou de son fournisseur, soit accepté l'utilisation, en toute connaissance de cause, d'une identité fictive ou d'un prête-nom.


Publications
Proposition de citation : CE, 19 déc. 2019, n° 423263
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Déborah Coricon
Rapporteur public ?: M. Laurent Cytermann
Avocat(s) : SCP FABIANI, LUC-THALER, PINATEL

Origine de la décision
Date de l'import : 08/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:423263.20191219
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