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06/11/2019 | FRANCE | N°422410

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 06 novembre 2019, 422410


Vu la procédure suivante :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise :

- d'annuler la décision du 13 avril 2016 par laquelle le président du conseil départemental du Val-d'Oise a rejeté son recours contre sa décision du 28 janvier 2016 de récupérer un indu de revenu de solidarité active d'un montant de 4 949,16 au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 août 2015 et lui a refusé le bénéfice du revenu de solidarité active qu'elle sollicitait en qualité de personne vivant seule ;

- de la décharger de l'obligation de payer cet

te somme ;

- d'enjoindre à la caisse d'allocations familiales du Val-d'Oise de ré...

Vu la procédure suivante :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise :

- d'annuler la décision du 13 avril 2016 par laquelle le président du conseil départemental du Val-d'Oise a rejeté son recours contre sa décision du 28 janvier 2016 de récupérer un indu de revenu de solidarité active d'un montant de 4 949,16 au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 août 2015 et lui a refusé le bénéfice du revenu de solidarité active qu'elle sollicitait en qualité de personne vivant seule ;

- de la décharger de l'obligation de payer cette somme ;

- d'enjoindre à la caisse d'allocations familiales du Val-d'Oise de réexaminer sa situation et de reprendre le versement du revenu de solidarité active.

Par un jugement n° 1605558 du 24 mai 2018, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Par un pourvoi et un nouveau mémoire, enregistrés les 19 juillet 2018 et 7 mars 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, du département du Val-d'Oise et de la caisse d'allocations familiales du Val-d'Oise la somme de 3 000 euros à verser la SCP Delamarre, Jéhannin, son avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pierre Boussaroque, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Delamarre, Jéhannin, avocat de Mme B..., et à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat du département du Val-d'Oise ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que Mme B..., allocataire du revenu de solidarité active, a fait l'objet d'un contrôle de la caisse d'allocations familiales du Val-d'Oise, dont il est ressorti qu'elle s'était absentée du territoire français pendant de longues périodes et à l'issue duquel le président du conseil départemental du Val-d'Oise a pris, le 28 janvier 2016, la décision de récupérer les sommes indument versées au titre de cette allocation. A ce titre, la caisse d'allocations familiales lui a notifié le 1er avril suivant un indu de 4 949,16 euros pour la période de janvier 2013 à janvier 2015. Par décision également du 28 janvier 2016, le président du conseil départemental a, en outre, rejeté sa nouvelle demande de revenu de solidarité active, formée le 13 octobre 2015, au motif qu'elle devait présenter sa demande conjointement avec son concubin au titre du foyer qu'ils formaient ensemble. Le président du conseil départemental du Val-d'Oise ayant rejeté le 13 avril 2016 son recours préalable contre les décisions de récupération d'indu et de refus du bénéfice du revenu de solidarité active, Mme B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler ces décisions et d'enjoindre à la caisse d'allocations familiales du Val-d'Oise de lui verser de nouveau le revenu de solidarité active. Elle se pourvoit en cassation contre le jugement du 24 mai 2018 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur le jugement attaqué, en tant qu'il statue sur la récupération d'indu :

2. Aux termes de l'article L. 262-40 du code de l'action sociale et des familles : " (...) Les organismes chargés de son versement réalisent les contrôles relatifs au revenu de solidarité active selon les règles, procédures et moyens d'investigation applicables aux prestations de sécurité sociale. (...) ". Selon le premier alinéa de l'article L. 114-10 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige : " Les directeurs des organismes de sécurité sociale confient à des agents chargés du contrôle, assermentés et agréés dans des conditions définies par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, le soin de procéder à toutes vérifications ou enquêtes administratives concernant l'attribution des prestations et la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles. (...) Ces agents ont qualité pour dresser des procès-verbaux faisant foi jusqu'à preuve du contraire ". Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que l'absence d'assermentation des agents de droit privé désignés par les caisses d'allocations familiales pour conduire des contrôles sur les déclarations des bénéficiaires du revenu de solidarité active est de nature à affecter la validité des constatations des procès-verbaux ou des rapports qu'ils établissent à l'issue de ces contrôles et à faire ainsi obstacle à ce qu'elles constituent le fondement d'une décision déterminant pour l'avenir les droits de la personne contrôlée ou remettant en cause des paiements déjà effectués à son profit en ordonnant la récupération d'un indu.

3. Mme B... soutenait, dans son mémoire en réplique enregistré au greffe du tribunal administratif le 22 avril 2018, que l'agent de la caisse d'allocations familiales chargé du contrôle la concernant n'était pas assermenté et que, dès lors, le rapport de contrôle qu'il avait rédigé ne lui était pas opposable. En s'abstenant de répondre à ce moyen, qui n'était pas inopérant s'agissant de la récupération d'indu, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a insuffisamment motivé son jugement. Par suite, ce jugement doit être annulé, pour ce motif, en tant qu'il rejette les conclusions de Mme B... relatives à la récupération d'indu, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi susceptible d'entraîner l'annulation du jugement dans la même mesure.

Sur le jugement attaqué, en tant qu'il statue sur le rejet de la demande de revenu de solidarité active :

4. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que la requérante a sollicité le bénéfice du revenu de solidarité active en qualité de personne isolée le 13 octobre 2015. Le président du conseil départemental du Val-d'Oise a rejeté sa demande le 28 janvier 2016 en raison de sa communauté de vie avec M. A..., qui avait déposé une demande identique le 25 novembre 2015, et l'a invitée à présenter une nouvelle demande conjointement avec ce dernier au titre du foyer qu'ils formaient.

5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que les rapports d'enquête rédigés les 3 décembre 2014 et 28 décembre 2015 par l'agent chargé du contrôle de la situation de l'intéressée ne comportaient aucun élément relatif à sa vie maritale et que la décision de rejet de la demande de revenu de solidarité active formée par Mme B... ne se fonde sur aucun élément relevé dans ces rapports mais sur les renseignements fournis par M. A... lors de sa propre demande. Par suite, un éventuel défaut d'assermentation de l'agent de contrôle était sans incidence sur la solution du litige, en ce qui concerne la demande de revenu de solidarité active, et la requérante n'est pas fondée à soutenir, à l'appui de ses conclusions dirigées contre le jugement en tant qu'il statue sur ce point, que le tribunal aurait insuffisamment motivé son jugement ou commis une erreur de droit en statuant sans rechercher si l'agent chargé du contrôle avait été assermenté.

6. En second lieu, pour juger que Mme B... devait être regardée comme vivant en concubinage avec M. A..., le tribunal a relevé que ce dernier était le père de son troisième enfant, qu'elle avait rédigé un certificat d'hébergement à son profit, qu'elle n'apportait aucun élément à l'appui de l'allégation selon laquelle il s'agirait d'une simple domiciliation de courrier, que cette adresse avait servi à justifier de sa résidence pour l'obtention d'un titre de séjour et qu'elle n'avait pas demandé de pension alimentaire pour leur enfant. Si le tribunal relève qu'au surplus M. A... " ne fournit aucun justificatif d'une autre adresse ", le tribunal a entendu relever l'absence de toute pièce au dossier, que Mme B... aurait pu obtenir de M. A..., permettant d'établir qu'il résiderait à une autre adresse que celle du domicile de la requérante. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le tribunal aurait méconnu les règles relatives à la charge de la preuve.

7. Il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il statue sur la décision rejetant sa demande de revenu de solidarité active en qualité de personne isolée.

Sur les frais liés au litige :

8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de Mme B... présentées au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, non plus qu'à celle du département du Val-d'Oise présentées au titre des dispositions de ce dernier article.

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 24 mai 2018 est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de Mme B... relatives à la récupération d'un indu de revenu de solidarité active.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, au tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi de Mme B... est rejeté.

Article 4 : Les conclusions du département du Val-d'Oise présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme C... B... et au département du Val-d'Oise.


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 422410
Date de la décision : 06/11/2019
Type d'affaire : Administrative

Publications
Proposition de citation : CE, 06 nov. 2019, n° 422410
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Pierre Boussaroque
Rapporteur public ?: M. Rémi Decout-Paolini
Avocat(s) : SCP DELAMARRE, JEHANNIN ; SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:422410.20191106
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