Vu la procédure suivante :
La commune d'Aulus-les-Bains a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse d'enjoindre à la société Ingénierie Gestion Industrie Commerce (IGIC), sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, d'une part, de lui communiquer dans un délai de huit jours à compter de la notification de son ordonnance, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, l'ensemble des documents techniques, financiers et contractuels relatifs à la reprise en régie de la centrale de production d'énergie hydroélectrique qu'elle exploite, d'autre part, de participer à un état des lieux contradictoire en prévision de cette reprise et, enfin, de procéder, au 31 décembre 2018, à la restitution de la centrale hydroélectrique dans toutes ses composantes, en état normal de service et de fonctionnement.
Par une ordonnance n° 1805087 du 18 décembre 2018, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a fait partiellement droit à cette demande en enjoignant à la société IGIC sans délai de conserver les biens en bon état d'entretien et conformes à leur destination et de participer à un état des lieux contradictoire, et a rejeté le surplus des conclusions.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 4 janvier, 17 janvier et 9 mai 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Ingénierie Gestion Industrie Commerce demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) statuant en référé, de rejeter la demande de la commune d'Aulus-les-Bains devant le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Aulus-les-Bains la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'énergie
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Laurence Franceschini, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Capron, avocat de la société Ingénierie Gestion Industrie Commerce (IGIC) et à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la commune d'Aulus-les-Bains ;
Vu les notes en délibéré, enregistrées les 30 septembre et 8 octobre 2019, présentées par la commune d'Aulus-les-Bains.
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que la commune d'Aulus-les-Bains (Ariège) a, par une convention conclue le 16 décembre 1989, confié à la société Ingénierie Gestion Industrie Commerce (IGIC) la construction, la gestion et l'exploitation pour une durée de 29 ans, moyennant une redevance, d'une centrale de production d'énergie hydroélectrique à partir des rivières de l'Ars et du Garbet. Dans la perspective de la reprise en gestion directe de la centrale au terme du contrat, la commune a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, saisi sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, d'enjoindre à la société IGIC de lui communiquer l'ensemble des documents techniques, financiers et contractuels relatifs à la reprise en régie, de participer à un état des lieux contradictoire en prévision de cette reprise et de procéder au 31 décembre 2018 à la restitution de la centrale hydroélectrique, dans toutes ses composantes, en état normal de service et de fonctionnement. Par une ordonnance du 18 décembre 2018, le juge des référés a fait partiellement droit à cette demande en enjoignant à la société de conserver les biens en bon état d'entretien et conformes à leur destination ainsi que de participer à un état des lieux contradictoire. La société IGIC se pourvoit en cassation contre cette ordonnance en tant qu'elle a fait partiellement droit à la demande de la commune.
2. L'article 2 de la loi du 16 octobre 1919 relative à l'utilisation de l'énergie hydraulique, en vigueur à la date de la signature de la convention par la commune d'Aulus-les-Bains et la société IGIC, dispose : " Sont placées sous le régime de la concession les installations hydrauliques dont la puissance excède 4 500 kilowatts. / Les autres installations sont placées sous le régime de l'autorisation selon les modalités définies à l'article L. 531-1. (...) ".
3. En se bornant à considérer, pour qualifier la convention de concession de service public, que l'exploitation d'ouvrages de production d'énergie électrique a pour objet l'exécution d'un service public, sans rechercher si la puissance de l'installation la plaçait légalement " sous le régime de la concession " ou si, dans le cas où l'installation serait d'une puissance inférieure à 4 500 kilowatts, les obligations du cocontractant pouvaient le faire regarder comme participant à l'exécution du service public, le juge des référés a commis une erreur de droit. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'article 1er de l'ordonnance enjoignant à la société de conserver les biens en bon état d'entretien et conformes à leur destination ainsi que de participer à un état des lieux contradictoire doit être annulé.
4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler dans cette mesure l'affaire en référé en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
5. Aux termes de l'article L. 521-3 du code de justice administrative : " En cas d'urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l'absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l'exécution d'aucune décision administrative ".
6. Il résulte de l'instruction que la demande restant en litige et tendant, en vue de la reprise de l'installation à l'échéance de la convention, à ce qu'il soit enjoint à la société de conserver les biens en bon état d'entretien et conformes à leur destination ainsi que de participer à un état des lieux contradictoire ne peut plus être regardée comme utile dès lors que cette convention liant la commune d'Aulus-les-Bains à la société IGIC pour une durée de 29 ans est arrivée à son terme le 31 décembre 2018. Il résulte de ce qui précède que cette demande de la commune d'Aulus-les-Bains devant le juge des référés doit être rejetée.
7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune d'Aulus-les-Bains et par la société IGIC au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L'article 1er de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse du 18 décembre 2018 est annulé.
Article 2 : La demande de la commune d'Aulus-les-Bains tendant à ce qu'il soit enjoint à la société de conserver les biens en bon état d'entretien et conformes à leur destination ainsi que de participer à un état des lieux contradictoire devant le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de la société Ingénierie Gestion Industrie Commerce et de la commune d'Aulus-les-Bains présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Ingénierie Gestion Industrie Commerce et à la commune d'Aulus-les-Bains.