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25/09/2019 | FRANCE | N°429680

France | France, Conseil d'État, 1ère - 4ème chambres réunies, 25 septembre 2019, 429680


Vu la procédure suivante :

M. E... A... et Mme D... F... épouse A... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 4 février 2016 par lequel le maire de Fosses a délivré à M. et Mme C... et Diamille B... le permis de construire une maison individuelle sur un terrain situé 130, avenue Camille Laverdure. Par un jugement n° 1703371 du 10 juillet 2018, le tribunal administratif a rejeté leur demande.

M. et Mme A... ont relevé appel de ce jugement devant la cour administrative d'appel de Versailles.

M. et Mme

A... ont demandé au juge des référés de cette cour, sur le fondement de l'artic...

Vu la procédure suivante :

M. E... A... et Mme D... F... épouse A... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 4 février 2016 par lequel le maire de Fosses a délivré à M. et Mme C... et Diamille B... le permis de construire une maison individuelle sur un terrain situé 130, avenue Camille Laverdure. Par un jugement n° 1703371 du 10 juillet 2018, le tribunal administratif a rejeté leur demande.

M. et Mme A... ont relevé appel de ce jugement devant la cour administrative d'appel de Versailles.

M. et Mme A... ont demandé au juge des référés de cette cour, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code justice administrative, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 4 février 2016. Par une ordonnance n° 19VE00524 du 29 mars 2019, le président de la deuxième chambre de la cour administrative d'appel de Versailles a fait droit à leur demande.

Par un pourvoi, enregistré le 12 avril 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Fosses demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de renvoyer l'affaire à la cour administrative d'appel de Versailles ou, subsidiairement, statuant en référé, de rejeter la demande de M. et Mme A... ;

3°) de mettre à la charge de M. et Mme A... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Damien Pons, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de la commune de Fosses et à la SCP E..., Pinet, avocat de M. et Mme A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés de la cour administrative d'appel de Versailles que M. et Mme B... ont obtenu, par un arrêté du maire de Fosses du 4 février 2016, le permis de construire une maison individuelle sur un terrain situé 130, avenue Camille Laverdure à Fosses. M. et Mme A..., voisins immédiats du terrain d'assiette de la construction projetée, ont demandé l'annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, qui a rejeté leur demande par un jugement du 10 juillet 2018. Ils ont relevé appel de ce jugement devant la cour administrative d'appel de Versailles puis demandé au juge des référés de la cour de suspendre l'exécution de l'arrêté du 4 février 2016. La commune de Fosses se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 29 mars 2019 par laquelle le juge des référés a suspendu l'exécution de cet arrêté jusqu'à ce que la cour ait statué sur l'appel de M. et Mme A....

2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". Aux termes des deux premiers alinéas de l'article L. 522-1 du même code : " Le juge des référés statue au terme d'une procédure contradictoire écrite ou orale. / Lorsqu'il lui est demandé de prononcer les mesures visées aux articles L. 521-1 et L. 521-2, de les modifier ou d'y mettre fin, il informe sans délai les parties de la date et de l'heure de l'audience publique (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 522-3 du même code : " Lorsque la demande ne présente pas un caractère d'urgence ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée, sans qu'il y ait lieu d'appliquer les deux premiers alinéas de l'article L. 522-1 ".

3. Le juge des référés statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative ne peut se dispenser de tenir une audience que lorsqu'il statue sans procédure contradictoire en application des dispositions de l'article L. 522-3 du même code, en raison de l'absence d'urgence de la demande, de l'incompétence manifeste de la juridiction administrative ou du caractère manifestement irrecevable ou mal fondé de la demande qui lui est présentée, que la requête en annulation ou en réformation soit pendante devant le juge de première instance ou devant le juge d'appel.

4. Par l'ordonnance attaquée, le juge des référés de la cour administrative d'appel de Versailles a fait droit à la demande de M. et Mme A... en suspendant l'exécution de l'arrêté pris par le maire de la commune de Fosses le 4 février 2016 jusqu'au jugement de leur requête d'appel. Il ne ressort ni de ses visas ni d'aucune pièce de la procédure devant le juge des référés de la cour que cette ordonnance aurait été prise après une audience publique. Par suite, la commune de Fosses est fondée à soutenir que cette ordonnance a été rendue à l'issue d'une procédure irrégulière et à en demander l'annulation pour ce motif.

5. Il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de juger l'affaire au titre de la procédure de référé engagée.

6. Aux termes des deux premiers alinéas ajoutés à l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme par l'article 80 de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique : " Un recours dirigé contre une décision de non-opposition à déclaration préalable ou contre un permis de construire, d'aménager ou de démolir ne peut être assorti d'une requête en référé suspension que jusqu'à l'expiration du délai fixé pour la cristallisation des moyens soulevés devant le juge saisi en premier ressort. / La condition d'urgence prévue à l'article L. 521-1 du code de justice administrative est présumée satisfaite ". Il résulte en outre des troisième et quatrième alinéas du même article que, lorsque la demande tend à la suspension de l'exécution d'un permis de construire ou d'aménager, le juge des référés statue sur cette demande dans un délai d'un mois. Par ces dispositions, le législateur a entendu enserrer dans des délais particuliers la possibilité d'assortir une requête en annulation d'une autorisation d'urbanisme telle qu'un permis de construire d'une demande de suspension de l'exécution de cet acte, pour ne pas ralentir de façon excessive la réalisation du projet autorisé par ce permis. Il résulte, en particulier, du premier alinéa de l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme qu'une demande de suspension de l'exécution d'un permis ne peut être formée devant le juge d'appel.

7. En vertu du V de l'article 80 de la loi du 23 novembre 2018, les nouvelles dispositions de l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme sont entrées en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant la promulgation de la loi, c'est-à-dire le 1er janvier 2019. Instituant un délai pour introduire une requête à fin de suspension qui pouvait auparavant être présentée à tout moment de la procédure au fond en première instance comme en appel, elles se sont appliquées quelle que soit la date d'enregistrement de la requête au fond, sans toutefois que le délai ainsi prévu ne puisse courir avant le 1er janvier 2019. Par suite, elles se sont appliquées, lorsque la requête au fond était pendante devant le tribunal administratif au 1er janvier 2019, dans tous les cas où le délai commandant la cristallisation des moyens a commencé à courir postérieurement à cette date, soit par l'intervention d'une ordonnance prise sur le fondement de l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, soit, pour les requêtes enregistrées à compter du 1er octobre 2018 auxquelles s'applique l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme, par la communication aux parties du premier mémoire en défense. S'agissant de la possibilité de former une demande de suspension en appel, il y a lieu, en cas d'appel formé contre un jugement rendu avant le 1er janvier 2019, de faire bénéficier les requérants du délai de deux mois, prévu par l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme, à compter soit du 1er janvier 2019, soit, si elle est plus tardive, de la date d'enregistrement de l'appel.

8. Il résulte de l'instruction que la demande de M. et Mme A... tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du permis de construire du 4 février 2016 a été rejetée par un jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 10 juillet 2018, dont ils ont relevé appel le 6 septembre 2018, et que leur demande de suspension de l'exécution de ce permis a été enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Versailles le 13 février 2019. Dès lors, il résulte de ce qui précède que la commune de Fosses n'est pas fondée à soutenir que les dispositions de l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme faisaient obstacle à l'introduction de cette demande.

9. Toutefois, les moyens soulevés par M. et Mme A..., tirés de la méconnaissance des articles UG 7 et UG 12 du règlement du plan local d'urbanisme, ne sont pas de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité du permis de construire en litige.

10. L'une des conditions posées par l'article L. 521-1 du code de justice administrative n'étant ainsi pas remplie, leur demande de suspension doit être rejetée, de même que, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme A... le versement d'une somme de 2 000 euros à la commune de Fosses au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du juge des référés de la cour administrative d'appel de Versailles du 29 mars 2019 est annulée.

Article 2 : La requête présentée par M. et Mme A... devant le juge des référés de la cour administrative d'appel de Versailles est rejetée.

Article 3 : Les époux A... verseront à la commune de Fosses une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la commune de Fosses et à M. et Mme E... et Hayat A....

Copie en sera adressée à M. et Mme C... et Diamille B....


Synthèse
Formation : 1ère - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 429680
Date de la décision : 25/09/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

PROCÉDURE - PROCÉDURES INSTITUÉES PAR LA LOI DU 30 JUIN 2000 - RÉFÉRÉ SUSPENSION (ART - L - 521-1 DU CODE DE JUSTICE ADMINISTRATIVE) - RECEVABILITÉ - REQUÊTE DIRIGÉE CONTRE UNE AUTORISATION D'URBANISME - CONDITION DE RECEVABILITÉ - REQUÊTE DEVANT ÊTRE INTRODUITE AVANT L'EXPIRATION DU DÉLAI DE CRISTALLISATION DES MOYENS (ART - L - 600-3 DU CODE DE L'URBANISME) - CONDITION APPLICABLE AUX REQUÊTES PENDANTES AU 1ER JANVIER 2019 - DATE D'ENTRÉE EN VIGUEUR DE CES DISPOSITIONS - À CONDITION QUE LE DÉLAI DE CRISTALLISATION DES MOYENS AIT COMMENCÉ À COURIR POSTÉRIEUREMENT À CETTE DATE.

54-035-02-02 Aux termes du premier alinéa de l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-2012 du 23 novembre 2018 : Un recours dirigé contre une décision de non-opposition à déclaration préalable ou contre un permis de construire, d'aménager ou de démolir ne peut être assorti d'une requête en référé suspension que jusqu'à l'expiration du délai fixé pour la cristallisation des moyens soulevés devant le juge saisi en premier ressort.......Par ces dispositions, le législateur a entendu enserrer dans des délais particuliers la possibilité d'assortir une requête en annulation d'une autorisation d'urbanisme telle qu'un permis de construire d'une demande de suspension de l'exécution de cet acte, pour ne pas ralentir de façon excessive la réalisation du projet autorisé par ce permis.......En vertu du V de l'article 80 de la loi du 23 novembre 2018, ces dispositions sont entrées en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant la promulgation de la loi, c'est-à-dire le 1er janvier 2019. Instituant un délai pour introduire une requête à fin de suspension qui pouvait auparavant être présentée à tout moment de la procédure au fond en première instance comme en appel, elles se sont appliquées quelle que soit la date d'enregistrement de la requête au fond, sans toutefois que le délai ainsi prévu puisse courir avant le 1er janvier 2019. Par suite, elles se sont appliquées, lorsque la requête au fond était pendante devant le tribunal administratif au 1er janvier 2019, dans tous les cas où le délai commandant la cristallisation des moyens a commencé à courir postérieurement à cette date, soit par l'intervention d'une ordonnance prise sur le fondement de l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, soit, pour les requêtes enregistrées à compter du 1er octobre 2018 auxquelles s'applique l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme, par la communication aux parties du premier mémoire en défense.

URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE - RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES - PROCÉDURE D'URGENCE - RÉFÉRÉ - REQUÊTE EN RÉFÉRÉ SUSPENSION DIRIGÉE CONTRE UNE AUTORISATION D'URBANISME - CONDITION DE RECEVABILITÉ - REQUÊTE DEVANT ÊTRE INTRODUITE AVANT LE DÉLAI DE CRISTALLISATION DES MOYENS (ART - L - 600-3 DU CODE DE L'URBANISME) - CONDITION APPLICABLE AUX REQUÊTES PENDANTES AU 1ER JANVIER 2019 - DATE D'ENTRÉE EN VIGUEUR DE CES DISPOSITIONS - À CONDITION QUE LE DÉLAI DE CRISTALLISATION DES MOYENS AIT COMMENCÉ À COURIR POSTÉRIEUREMENT À CETTE DATE.

68-06-02-01 Aux termes du premier alinéa de l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-2012 du 23 novembre 2018 : Un recours dirigé contre une décision de non-opposition à déclaration préalable ou contre un permis de construire, d'aménager ou de démolir ne peut être assorti d'une requête en référé suspension que jusqu'à l'expiration du délai fixé pour la cristallisation des moyens soulevés devant le juge saisi en premier ressort.......Par ces dispositions, le législateur a entendu enserrer dans des délais particuliers la possibilité d'assortir une requête en annulation d'une autorisation d'urbanisme telle qu'un permis de construire d'une demande de suspension de l'exécution de cet acte, pour ne pas ralentir de façon excessive la réalisation du projet autorisé par ce permis.......En vertu du V de l'article 80 de la loi du 23 novembre 2018, ces dispositions sont entrées en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant la promulgation de la loi, c'est-à-dire le 1er janvier 2019. Instituant un délai pour introduire une requête à fin de suspension qui pouvait auparavant être présentée à tout moment de la procédure au fond en première instance comme en appel, elles se sont appliquées quelle que soit la date d'enregistrement de la requête au fond, sans toutefois que le délai ainsi prévu puisse courir avant le 1er janvier 2019. Par suite, elles se sont appliquées, lorsque la requête au fond était pendante devant le tribunal administratif au 1er janvier 2019, dans tous les cas où le délai commandant la cristallisation des moyens a commencé à courir postérieurement à cette date, soit par l'intervention d'une ordonnance prise sur le fondement de l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, soit, pour les requêtes enregistrées à compter du 1er octobre 2018 auxquelles s'applique l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme, par la communication aux parties du premier mémoire en défense.


Publications
Proposition de citation : CE, 25 sep. 2019, n° 429680
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Damien Pons
Rapporteur public ?: M. Rémi Decout-Paolini
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER ; SCP DIDIER, PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 07/08/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:429680.20190925
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