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24/06/2019 | FRANCE | N°419679

France | France, Conseil d'État, 3ème - 8ème chambres réunies, 24 juin 2019, 419679


Vu la procédure suivante :

M. et Mme B...A...ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la réduction des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014, à hauteur de 17 067 euros et 8 712 euros. Par un jugement n° 1501005, 1504919 du 6 octobre 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leurs demandes.

Par un arrêt n° 16BX03803, 16BX03844 du 9 février 2018, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté les appels formés par M. et Mme A... contre ce jugement.

Par un pour

voi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés l...

Vu la procédure suivante :

M. et Mme B...A...ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la réduction des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014, à hauteur de 17 067 euros et 8 712 euros. Par un jugement n° 1501005, 1504919 du 6 octobre 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leurs demandes.

Par un arrêt n° 16BX03803, 16BX03844 du 9 février 2018, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté les appels formés par M. et Mme A... contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 9 avril, 6 juillet et 2 novembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme A...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Géraud Sajust de Bergues, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. et Mme A...;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014, au motif que l'activité de prospection commerciale exercée à l'étranger au cours de ces années par M. A...pour le compte de la société Holding du Tariquet, en qualité de directeur commercial, leur donnait droit de bénéficier de l'exonération d'impôt sur le revenu prévue par l'article 81 A du code général des impôts. Par un jugement du 6 octobre 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leurs demandes. M. et Mme A...se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 9 février 2018 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel qu'ils ont formé contre ce jugement.

2. Aux termes de l'article 81 A du code général des impôts : " I. - Les personnes domiciliées en France au sens de l'article 4 B qui exercent une activité salariée et sont envoyées par un employeur dans un Etat autre que la France et que celui du lieu d'établissement de cet employeur peuvent bénéficier d'une exonération d'impôt sur le revenu à raison des salaires perçus en rémunération de l'activité exercée dans l'Etat où elles sont envoyées. / L'employeur doit être établi en France ou dans un autre Etat membre de l'Union européenne, ou dans un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales. / L'exonération d'impôt sur le revenu mentionné au premier alinéa est accordée si les personnes justifient remplir l'une des conditions suivantes : / (...) / 2° Avoir exercé l'activité salariée dans les conditions mentionnées aux premier et deuxième alinéas : / - (...) / - soit pendant une durée supérieure à cent vingt jours au cours de douze mois consécutifs lorsqu'elle se rapporte à des activités de prospection commerciale (...) ".

3. Pour l'application des dispositions de l'article 81 A du code général des impôts, la durée totale d'activité à l'étranger comprend notamment les congés payés et les congés de récupération auxquels donne droit la réalisation de la mission confiée au salarié par son employeur, quel que soit le lieu dans lequel ces congés sont effectivement pris.

4. Comme il vient d'être dit, la durée totale d'activité à l'étranger ouvrant droit à l'exonération comprend notamment les congés de récupération auxquels donne droit la réalisation de la mission confiée au salarié. Au regard de l'objectif poursuivi, la circonstance que de tels congés soient placés sur un compte d'épargne temps ne fait pas obstacle à ce qu'ils soient pris en compte pour le calcul de la durée de séjour à l'étranger. Ainsi, la cour a commis une erreur de droit en jugeant qu'il était exclu, pour l'application de l'article 81 A du code général des impôts, de prendre en compte des jours placés sur le compte d'épargne temps alors même qu'ils seraient liés au temps de travail effectué à l'étranger au même titre que les congés de récupération effectivement pris.

5. En outre, pour juger que les droits à congé acquis par M. A...au titre de ses séjours à l'étranger en 2013 et en 2014 n'avaient pu dépasser, comme l'avait estimé l'administration, 14 jours pour chacune de ces deux années, la cour administrative d'appel s'est fondée sur ce que l'article 5 du contrat de travail de l'intéressé stipule qu'il s'engage à respecter en toutes circonstances le repos minimal quotidien de 11 heures consécutif, le repos hebdomadaire, ainsi que les durées maximales journalière et hebdomadaire de travail et sur ce que M. A...ne justifiait pas qu'il n'était tenu de respecter qu'un repos hebdomadaire de 24 heures. Toutefois, en estimant que ces stipulations étaient de nature à exclure que M. A... ait, au cours de ses séjours à l'étranger, travaillé d'autres jours que les jours ouvrés alors, notamment, que le repos hebdomadaire visé par son contrat est celui d'au moins 24 heures découlant de l'article L. 3132-1 du code du travail, la cour a, en tout état de cause, dénaturé les stipulations claires de ce contrat.

6. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, M. et Mme A...sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent.

7. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. et Mme A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 9 février 2018 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme A...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme B...A...et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 3ème - 8ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 419679
Date de la décision : 24/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-07-01 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. REVENUS ET BÉNÉFICES IMPOSABLES - RÈGLES PARTICULIÈRES. TRAITEMENTS, SALAIRES ET RENTES VIAGÈRES. PERSONNES ET REVENUS IMPOSABLES. - TRAITEMENTS ET SALAIRES PERÇUS EN RÉMUNÉRATION D'UNE ACTIVITÉ À L'ÉTRANGER (ART. 81 A DU CGI) - NOTION D'ACTIVITÉ À L'ÉTRANGER - DURÉE DE RÉFÉRENCE DE 120 JOURS - INCLUSION - CONGÉS PAYÉS ET CONGÉS DE RÉCUPÉRATION, OÙ QUE CES CONGÉS AIENT ÉTÉ PRIS [RJ1] ET MÊME S'ILS SONT PLACÉS SUR UN COMPTE D'ÉPARGNE TEMPS.

19-04-02-07-01 Pour l'application des dispositions de l'article 81 A du code général des impôts (CGI), la durée totale d'activité à l'étranger comprend notamment les congés payés et les congés de récupération auxquels donne droit la réalisation de la mission confiée au salarié par son employeur, quel que soit le lieu dans lequel ces congés sont effectivement pris.,,,Comme il vient d'être dit, la durée totale d'activité à l'étranger ouvrant droit à l'exonération comprend notamment les congés de récupération auxquels donne droit la réalisation de la mission confiée au salarié. Au regard de l'objectif poursuivi, la circonstance que de tels congés soient placés sur un compte d'épargne temps ne fait pas obstacle à ce qu'ils soient pris en compte pour le calcul de la durée de séjour à l'étranger. Ainsi, une cour commet une erreur de droit en jugeant qu'il était exclu, pour l'application de l'article 81 A du CGI, de prendre en compte des jours placés sur le compte d'épargne temps alors même qu'ils seraient liés au temps de travail effectué à l'étranger au même titre que les congés de récupération effectivement pris.


Références :

[RJ1]

Cf. CE, 17 décembre 2003,,, n° 248854, p. 516.


Publications
Proposition de citation : CE, 24 jui. 2019, n° 419679
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Géraud Sajust de Bergues
Rapporteur public ?: Mme Emmanuelle Cortot-Boucher
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:419679.20190624
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