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21/06/2019 | FRANCE | N°413992

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 21 juin 2019, 413992


Vu la procédure suivante :

La société à responsabilité limitée d'animations récréatives et culturelles (SARC) a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2006, 2007 et 2008, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période allant du 1er avril 2005 au 31 mars 2008 et des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1311692 du 31 mars 2015, le tribunal administratif de Paris a r

ejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15PA01890 du 4 juillet 2017, la cour admini...

Vu la procédure suivante :

La société à responsabilité limitée d'animations récréatives et culturelles (SARC) a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2006, 2007 et 2008, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période allant du 1er avril 2005 au 31 mars 2008 et des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1311692 du 31 mars 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15PA01890 du 4 juillet 2017, la cour administrative d'appel de Paris, faisant partiellement droit à l'appel de la société contre ce jugement, a réduit la base d'imposition de la requérante au titre des exercices clos en 2006, 2007 et 2008, prononcé la décharge des droits correspondants et rejeté le surplus de ses conclusions.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire, des observations complémentaires et un mémoire en réplique, enregistrés les 4 septembre et 4 décembre 2017, 1er juin 2018 et 14 mars 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société SARC demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 4 de cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à l'intégralité de son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Sylvain Humbert, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de la société d'animations récréatives et culturelles ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société SARC, qui exploite un manège, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er avril 2005 au 30 septembre 2008 à l'issue de laquelle elle a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2006, 2007 et 2008 et à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période correspondante, assortis de pénalités pour manquement délibéré. Par un jugement du 31 mars 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la société tendant à la décharge de ces impositions. Celle-ci se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 4 juillet 2017 de la cour administrative d'appel de Paris en tant qu'il n'a prononcé que la décharge partielle des impositions en litige.

Sur la reconstitution des recettes :

2. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, pour reconstituer les recettes de la société SARC, le vérificateur a comptabilisé les entrées sur la foire du Trône une partie des dimanche 19 avril, mercredi 22 avril, samedi 25 avril et lundi 27 avril 2009 et, après application des tarifs en vigueur, calculé les recettes de ces journées, ce qui lui a permis, d'une part, de distinguer trois catégories de journées-type, à savoir les week-ends, jours fériés et vacances scolaires, les mercredis hors vacances scolaires et hors jours fériés et les jours de semaine, d'autre part, de constater une forte corrélation entre la durée d'ensoleillement de la journée et la fréquentation du manège. Le vérificateur a ainsi établi pour chacune des trois catégories de journées, une courbe logarithmique des recettes en fonction de la durée d'ensoleillement, et déterminé, sur la base de cette courbe et de la durée d'ensoleillement figurant sur les relevés météorologiques journaliers de Météo-France Paris, les recettes de chaque journée de la période vérifiée. Ces recettes ont ensuite été corrigées selon le lieu d'installation du manège, par application d'un abattement de 10 % pour les Tuileries et de 40% pour la fête à Neu-Neu, et enfin pour prendre en compte les aléas tels que les pannes ou les difficultés de montage.

4. En premier lieu, en jugeant que la méthode de reconstitution des recettes ainsi mise en oeuvre par l'administration fiscale ne pouvait être tenue pour radicalement viciée après avoir relevé, par une appréciation souveraine dénuée de dénaturation ou d'inexactitude matérielle, d'une part, que l'ensoleillement conditionnait, dans une certaine mesure, la fréquentation d'une attraction de plein air fonctionnant avec un circuit à eau, d'autre part, que la méthode de reconstitution n'était pas uniquement fondée sur l'ensoleillement dès lors que le vérificateur avait tenu compte de l'ensemble des conditions d'exploitation de la société, et qu'en tout état de cause, l'application de cette méthode conduisait soit à comptabiliser des recettes inférieures à celles déclarées par la société pour les journées faiblement ensoleillées soit à ne pas comptabiliser de recettes pour les journées dépourvues d'ensoleillement, la cour n'a pas donné aux faits de l'espèce une qualification juridique inexacte.

5. En deuxième lieu, pour rejeter le moyen tiré de ce que le nombre des entrées non décomptées sur place par le vérificateur aurait été déterminé de façon arbitraire et serait excessif, la cour a relevé que l'estimation du nombre de ces entrées avait été réalisée sur la base des constatations effectuées par le vérificateur sur des plages horaires couvrant la presque totalité d'une journée d'exploitation et par extrapolation progressive en début de journée et dégressive en fin de journée. En statuant ainsi, la cour n'a ni dénaturé les pièces du dossier, ni commis une erreur de qualification juridique.

6. En troisième lieu, en jugeant que la société n'apportait pas la preuve qui lui incombait du caractère insuffisant des abattements appliqués par le vérificateur au montant des recettes reconstitué pour tenir compte des particularités propres à chaque fête foraine sur laquelle était exploité le manège, la cour, dont l'arrêt est suffisamment motivé sur ce point, n'a pas commis d'erreur de droit.

Sur le passif injustifié :

7. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " " (...) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. (...)/ 4 bis. Pour l'application des dispositions du 2, pour le calcul de la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice, l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit déterminé, sauf dispositions particulières, conformément aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ne peut être corrigé des omissions ou erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci. / Les dispositions du premier alinéa ne s'appliquent pas lorsque l'entreprise apporte la preuve que ces omissions ou erreurs sont intervenues plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit. (...) ".

8. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'administration fiscale a estimé que la somme de 76 253,88 euros figurant au crédit du compte courant d'associé de M. A...B...devait être regardée comme un passif injustifié qu'elle a, en conséquence, réintégré dans le résultat du premier exercice non prescrit clos en 2006.

9. En premier lieu, en refusant de faire bénéficier la société du droit de correction prévu au deuxième alinéa du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts au motif qu'elle n'apportait pas la preuve, en se bornant à se référer aux mentions de la proposition de rectification adressée par le service, que ce passif injustifié trouvait son origine pour tout ou partie dans des erreurs ou omissions intervenues plus de sept ans avant l'ouverture de l'exercice clos en 2006, la cour, dont l'arrêt est suffisamment motivé sur ce point, n'a ni dénaturé les termes de la proposition de rectification reproduisant les comptes de la société, ni commis d'erreur de droit.

10. En second lieu, en relevant, en outre, que la société requérante n'avait produit aucun justificatif de nature à établir la réalité de sa dette à l'égard de son associé, la cour n'a pas commis l'erreur de droit alléguée.

Sur les pénalités :

11. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40% en cas de manquement délibéré (...) ".

12. En jugeant que les graves irrégularités comptables, les importantes minorations de recettes constatées, représentant plus de 140 % des résultats et chiffres d'affaires déclarés et le caractère réitéré des manquements constatés, révélaient l'intention délibérée de la société d'éluder l'impôt de sorte que l'administration justifiait l'application des pénalités pour mauvaise foi, la cour a donné aux faits qui lui étaient soumis une exacte qualification juridique.

13. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi de la société SARC doit être rejeté, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la société SARC est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société à responsabilité limitée d'animations récréatives et culturelles et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 413992
Date de la décision : 21/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 21 jui. 2019, n° 413992
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Sylvain Humbert
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SCP BARADUC, DUHAMEL, RAMEIX

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:413992.20190621
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