Vu les procédures suivantes :
Procédures devant les juges du fond
Le comité d'entreprise de la société Avenir Télécom, M. H... A...,
Mme I...M..., le syndicat CGT FAPT Télecoms 13 et le syndicat Services et Commerces CFDT 13 ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 1er mars 2016 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Avenir Télécom. Par un jugement n° 1603728 du 12 juillet 2016, le tribunal administratif a annulé cette décision.
M. C...G..., M. N...D..., Mme F...E...et M. B... J...ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler pour excès de pouvoir la même décision. Par un jugement n° 1603632 du 12 juillet 2016, le tribunal administratif a annulé cette décision.
Par un arrêt n° 16MA03679, 16MA03681 du 1er décembre 2016, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur les appels de la société Avenir Telecom et de
MeK..., administrateur judiciaire de la société, dirigés contre ces deux jugements du
12 juillet, d'une part, annulé ces jugements et, d'autre part, rejeté les demandes de première instance du comité d'entreprise de la société Avenir Télécom et autres et de M. G...et autres.
Procédures devant le Conseil d'Etat
1° Sous le n° 407401, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 1er février, 7 avril et 30 mai 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A..., Mme M... et le Syndicat CGT FAPT Télécoms 13 demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la société Avenir Telecom et de MeK... ;
3°) de mettre à la charge de la société Avenir télécom et de Me K...la somme de de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le n° 407414, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 1er février et 6 mars 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. G..., M. D..., Mme E... et M. J... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le même arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la société Avenir Telecom et de MeK... ;
3°) de mettre à la charge de la société Avenir télécom et de MeK..., la somme de de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code du commerce ;
- le code du travail ;
- la loi n° 2015-988 du 6 août 2015 ;
- la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Sara-Lou Gerber, auditeur,
- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. H...A..., de Mme I...M...et du Syndicat CGT Fapt Télécoms, à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de la SCP K...-Avazeri, de la société Avenir télécom et de la SCP Louis-Lageat et à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de
M. C...G..., de M. N...D..., de Mme F...E...et de M. B... J... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Avenir Telecom a été placée en redressement judiciaire par un jugement du 4 janvier 2016 du tribunal de commerce de Marseille qui, après avoir constaté qu'elle se trouvait en état de cessation des paiements, a ouvert une période d'observation de six mois. Par une décision du 1er mars 2016, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de Provence-Alpes-Côte d'Azur a homologué le document unilatéral fixant le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi devant être exécuté pendant la période d'observation. Par un jugement du 12 juillet 2016, le tribunal administratif de Marseille a, à la demande du comité d'entreprise de la société Avenir Télécom et autres, annulé cette décision du 1er mars 2016. Par un autre jugement de la même date, le tribunal a une nouvelle fois annulé cette décision, à la demande de M. G...et de trois autres salariés de la société. Sur appels de la société Avenir Télécom et de MeK..., administrateur judiciaire de la société, la cour administrative d'appel de Marseille, après avoir annulé les deux jugements du 12 juillet 2016, a rejeté les demandes de première instance du comité d'entreprise de la société Avenir Télécom et autres et de M. G...et autres. Le syndicat CGT FAPT Télécom 13 et deux salariés de la société, d'une part, M. G...et trois autres salariés, d'autre part, se pourvoient en cassation contre cet arrêt. Il y a lieu de joindre leurs pourvois pour statuer par une seule décision.
2. Aux termes de l'article L. 631-17 du code de commerce, relatif aux procédures de redressement judiciaire : " Lorsque des licenciements pour motif économique présentent un caractère urgent, inévitable et indispensable pendant la période d'observation, l'administrateur peut être autorisé par le juge-commissaire à procéder à ces licenciements. / Préalablement à la saisine du juge-commissaire, l'administrateur met en œuvre le plan de licenciement dans les conditions prévues à l'article L. 1233-58 du code du travail (...) ". Aux termes de ce dernier article : " I. En cas de redressement ou de liquidation judiciaire, l'employeur, l'administrateur ou le liquidateur, selon le cas, qui envisage des licenciements économiques, met en œuvre un plan de licenciement dans les conditions prévues aux articles L. 1233-24-1 à L. 1233-24-4 (...) II. Pour un licenciement d'au moins dix salariés dans une entreprise d'au moins cinquante salariés, (...) le document mentionné à l'article L. 1233-24-4, élaboré par l'employeur, l'administrateur ou le liquidateur, est homologué dans les conditions fixées aux articles L. 1233-57-1 à L. 1233-57-3, aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 1233-57-4 et à l'article L. 1233-57-7 (...) ". Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'une entreprise est placée en période d'observation dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire, l'administrateur judiciaire, qui ne peut procéder à des licenciements pour motif économique qu'après autorisation du juge-commissaire, doit, si ces licenciements concernent au moins dix salariés dans une entreprise d'au moins cinquante salariés, obtenir de l'autorité administrative, préalablement à la saisine du juge-commissaire, l'homologation ou la validation d'un plan de sauvegarde de l'emploi.
3. A ce titre, l'article L. 1233-57-3 du code du travail prévoit qu'en l'absence d'accord collectif fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi ou en cas d'accord ne portant pas sur l'ensemble des points mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2 du même code, notamment sur les catégories professionnelles concernées par les suppressions d'emploi mentionnées à son 4° : " (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2 (...) ". Il appartient ainsi à l'administration, lorsqu'elle est saisie, y compris au cours d'une période d'observation d'une entreprise en redressement judiciaire, d'une demande d'homologation d'un document qui fixe les catégories professionnelles, de se prononcer, sous le contrôle du juge administratif, sur la légalité de ces catégories professionnelles.
4. S'il appartient ensuite au juge-commissaire, saisi par l'employeur, d'autoriser tout ou partie des licenciements envisagés par le plan de sauvegarde de l'emploi en indiquant, conformément aux dispositions de l'article R. 631-26 du code de commerce, celles des catégories professionnelles au sein desquelles les licenciements sont autorisés, la mention, dans l'ordonnance du juge-commissaire, des catégories professionnelles n'a pas pour effet de leur conférer une autorité de chose jugée dans le litige d'excès de pouvoir relatif à la décision d'homologation du plan et ne fait pas obstacle à ce que la légalité de ces catégories professionnelles soit contestée au soutien d'un recours en excès de pouvoir dirigé contre la décision d'homologation du plan de sauvegarde de l'emploi.
5. Par suite, en jugeant que l'intervention de l'ordonnance du 8 mars 2016 du juge-commissaire à la procédure de redressement de la société Avenir Télécom, qui autorisait les licenciements prévus par le plan de sauvegarde de l'emploi en indiquant les catégories professionnelles concernées, faisait obstacle à ce que la légalité de ces catégories professionnelles, fixées par ce plan de sauvegarde de l'emploi, soit contestée devant le juge administratif saisi de la légalité de la décision d'homologation, la cour administrative d'appel de Marseille a commis une erreur de droit. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de leurs pourvois, les requérants sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent.
6. Le délai de trois mois imparti à la cour administrative d'appel pour statuer par les dispositions de l'article L. 1235-7-1 du code du travail étant expiré, il y a lieu pour le Conseil d'Etat, en application des mêmes dispositions, de statuer immédiatement sur les appels formés par Me K...et la société Avenir Télécom contre les deux jugements n° 1603728 et n° 1603632 du 12 juillet 2016, par lesquels le tribunal administratif de Marseille a, à deux reprises, annulé la décision d'homologation du 1er mars 2016.
Sur l'appel dirigé contre le jugement n° 1603728 rendu sur la demande du comité d'entreprise de la société Avenir Télécom et autres :
7. Pour annuler, par le jugement attaqué, la décision par laquelle le DIRECCTE de Provence-Alpes-Côte d'Azur a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Avenir Télécom, le tribunal s'est fondé sur l'illégalité des catégories professionnelles fixées par ce plan.
8. Ainsi qu'il a été dit au point 3, il résulte des dispositions des articles L. 1233-24-2 et L.1233-57-3 du code du travail qu'il appartient à l'administration, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document qui fixe les catégories professionnelles au sein desquelles des licenciements sont envisagés, de se prononcer, sous le contrôle du juge administratif, sur la légalité de ces catégories professionnelles. A ce titre, elle doit s'assurer, au vu de l'ensemble des éléments qui lui sont soumis, notamment des échanges avec les représentants du personnel au cours de la procédure d'information et de consultation ainsi que des justifications qu'il appartient à l'employeur de fournir, de ce que ces catégories regroupent, en tenant compte des acquis de l'expérience professionnelle qui excèdent l'obligation d'adaptation qui incombe à l'employeur, l'ensemble des salariés qui exercent, au sein de l'entreprise, des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune. Au terme de cet examen, l'administration refuse l'homologation demandée s'il apparaît que les catégories professionnelles concernées par le licenciement ont été déterminées par l'employeur en se fondant sur des considérations, telles que l'organisation de l'entreprise ou l'ancienneté des intéressés, qui sont étrangères à celles qui permettent de regrouper, compte tenu des acquis de l'expérience professionnelle, les salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune, ou s'il apparaît qu'une ou plusieurs catégories ont été définies dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou en raison de leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée.
9. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que les catégories professionnelles fixées par le document unilatéral de la société Avenir Télécom auraient été déterminées sur le fondement de considérations étrangères à celles qui permettent de regrouper les salariés par fonctions de même nature, ainsi qu'en attestent notamment, en réponse aux écritures des requérants mettant en doute la pertinence de la définition de plusieurs catégories professionnelles du siège de l'entreprise, les éléments précis apportés par la société Avenir Télécom, tant sur la réalité des fonctions exercées que sur les formations professionnelles justifiant l'appartenance à telle ou telle catégorie. Au demeurant, au cours de la procédure organisée conformément aux dispositions de l'article L. 1233-30 du code du travail sur le projet de licenciement, le comité d'entreprise n'a formulé aucune demande d'injonction ni aucune contestation sur la définition des catégories professionnelles.
10. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier et n'est d'ailleurs pas soutenu que le choix des catégories professionnelles aurait eu pour but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou en raison de leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression était recherchée.
11. Par suite, la définition des catégories professionnelles retenue par le plan de sauvegarde de l'emploi de la société Avenir Télécom ne faisait pas obstacle à ce que l'administration procède à son homologation. La société Avenir Télécom et Me K...sont, dès lors, fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur ce motif pour annuler la décision d'homologation du 1er mars 2016.
12. Toutefois, il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par le comité d'entreprise de la société Avenir Télécom et autres devant le tribunal administratif de Marseille.
13. En premier lieu, l'article L. 1233-57-3 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable, disposait : " (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié (...) la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise et, le cas échéant, du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 4612-8 du même code, issu de la loi du 17 août 2015 sur le dialogue social et l'emploi : " Dans l'exercice de leurs attributions consultatives, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et l'instance temporaire de coordination mentionnée à l'article L. 4616-1 disposent d'un délai d'examen suffisant leur permettant d'exercer utilement leurs attributions, en fonction de la nature et de l'importance des questions qui leur sont soumises. Sauf dispositions législatives spéciales, un accord collectif d'entreprise conclu dans les conditions prévues à l'article L. 2232-6 ou, en l'absence de délégué syndical, un accord entre l'employeur et le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou, le cas échéant, l'instance temporaire de coordination mentionnée à l'article L. 4616-1 ou, à défaut d'accord, un décret en Conseil d'Etat fixe les délais, qui ne peuvent être inférieurs à quinze jours, dans lesquels les avis sont rendus, ainsi que le délai dans lequel le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail transmet son avis au comité d'entreprise lorsque les deux comités sont consultés sur le même projet. (...) ".
14. Si les requérants soutiennent qu'un délai de six jours seulement s'est écoulé entre la convocation des membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la société Avenir Télécom et sa réunion du 11 janvier 2016 au cours de laquelle il a rendu son avis sur le plan de sauvegarde de l'emploi, il ne ressort pas des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas soutenu, que le comité aurait, en raison de ce délai, été empêché de s'exprimer en toute connaissance de cause sur le document qui lui était soumis, ou amené à s'exprimer dans des conditions de nature à fausser sa consultation. Par ailleurs, la seule circonstance que le délai de convocation du comité était inférieur à quinze jours n'est pas, par elle-même, de nature à méconnaître les dispositions citées ci-dessus de l'article L. 4612-8 du code du travail.
15. En second lieu, aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail, dans sa rédaction applicable à l'espèce, qui résulte de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque (...) le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie ". En outre, aux termes du premier alinéa de l'article L. 1233-4-1 du même code, dans sa rédaction applicable à l'espèce, issue de la même loi : " Lorsque l'entreprise ou le groupe dont l'entreprise fait partie comporte des établissements en dehors du territoire national, le salarié dont le licenciement est envisagé peut demander à l'employeur de recevoir des offres de reclassement dans ces établissements ". Il résulte de ces dispositions que, lorsque les licenciements économiques auxquelles elles s'appliquaient requéraient l'établissement d'un plan de sauvegarde de l'emploi, l'employeur n'avait pas à procéder, pour établir le plan de reclassement intégré à ce plan de sauvegarde de l'emploi, à une recherche de postes de reclassement dans les entreprises du groupe situées, le cas échéant, hors du territoire national. En revanche, ainsi que le prévoyait l'article D. 1233-2-1 du code du travail dans sa rédaction alors applicable, le plan de sauvegarde de l'emploi devait préciser les modalités et conditions dans lesquelles les salariés pouvaient accéder aux offres de reclassement situées hors du territoire national.
16. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sauraient utilement soutenir que le plan de reclassement aurait dû préciser la nature de l'ensemble des postes du groupe situés à l'étranger et disponibles pour un reclassement. Au surplus, il ressort des pièces du dossier que le document unilatéral homologué par l'administration prévoyait, conformément aux dispositions de l'article D. 1233-2-1 du code du travail, les modalités de recensement des postes de reclassement situés à l'étranger ainsi que les modalités suivant lesquelles les salariés pourraient recevoir ces offres.
17. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier, notamment des termes mêmes de la décision litigieuse, qu'en ce qui concerne les postes du groupe situés sur le territoire national et disponibles pour un reclassement, l'administration, qui a pu légalement estimer que le périmètre du groupe, qui n'était pas contesté, se limitait à la filiale CIG Concept, s'est effectivement assurée du sérieux de la recherche des postes disponibles au sein de cette société. Par suite, le moyen tiré de ce que l'administration aurait omis de vérifier le respect des obligations de l'employeur en matière de reclassement doit être écarté.
18. Il résulte de ce qui a été dit aux points 13 à 17 que Me K...et la société Avenir Télécom sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par son jugement n° 1603728 du 12 juillet 2016, le tribunal administratif de Marseille a, à la demande du comité d'entreprise de la société Avenir Télécom, annulé la décision d'homologation litigieuse.
Sur l'appel dirigé contre le jugement n° 1603632 rendu sur la demande de M. G... et autres :
19. Pour annuler, par le jugement attaqué, la décision par laquelle le DIRECCTE de Provence-Alpes-Côte d'Azur a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Avenir Télécom, le tribunal s'est, dans les mêmes termes que ceux de son autre jugement du même jour, fondé sur l'illégalité des catégories professionnelles fixées par ce plan.
20. Or il résulte de ce qui a déjà été dit aux points 8 à 10 que la définition des catégories professionnelles retenue par le plan de sauvegarde de l'emploi de la société Avenir Télécom ne faisait pas obstacle à ce que l'administration procède à son homologation. La société Avenir Télécom et Me K...sont, dès lors, fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur ce motif pour annuler cette décision d'homologation du 1er mars 2016.
21. Toutefois, il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. G...et autres devant le tribunal administratif de Marseille.
En ce qui concerne la légalité externe de la décision d'homologation :
22. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. L..., directeur régional adjoint, responsable de l'unité territoriale des Bouches-du Rhône, avait reçu, par une décision du 25 janvier 2016 régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture des Bouches-du Rhône le 30 janvier 2016, délégation de signature du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, pour signer notamment les décisions d'homologation prises en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'intéressé n'était pas compétent pour signer la décision d'homologation litigieuse doit être écarté. Il en va de même du moyen par lequel il est soutenu que la décision n'aurait pas été signée par M. L...en raison de ce que la signature figurant sur la décision litigieuse ne correspondrait pas à la signature habituelle de l'intéressé.
23. En second lieu, si les dispositions de l'article L. 1233-57-4 du code du travail impliquent que la décision qui homologue un document fixant le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi énonce les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement et, notamment, les éléments relatifs au caractère suffisant des mesures contenues dans le plan, les dispositions du II de l'article L. 1233-58 du même code, issues de la loi du 17 août 2015 déjà mentionnée ci-dessus, disposent que lorsque l'autorité administrative homologue le plan de sauvegarde de l'emploi d'une entreprise placée, comme en l'espèce, en redressement judiciaire, elle s'assure du respect par celui-ci des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 au regard des seuls moyens dont dispose l'entreprise, à l'exclusion de ceux du groupe auquel, le cas échéant, celle-ci appartient. Dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la décision d'homologation du plan de sauvegarde de l'emploi est insuffisamment motivée faute de préciser le périmètre du groupe auquel appartenait la société Avenir Télécom ou, en tout état de cause, de mentionner si cette société avait procédé à la recherche de moyens supplémentaires auprès des autres entreprises du groupe.
En ce qui concerne la légalité interne :
S'agissant de la consultation des instances représentatives du personnel :
24. En premier lieu, le moyen tiré de l'irrégularité de la consultation du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la société Avenir Télécom en raison du délai dont il a disposé pour rendre son avis doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux qui sont énoncés aux points 13 et 14.
25. En deuxième lieu, il résulte des dispositions des articles L. 1233-28, L. 1233-30 à L. 1233-32 et L. 2323-31 du code du travail que, lorsqu'elle est saisie par un employeur d'une demande d'homologation d'un document fixant le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi, l'administration ne peut légalement accorder l'homologation sollicitée que si le comité d'entreprise a été mis à même d'émettre régulièrement un avis, d'une part sur l'opération projetée et ses modalités d'application et, d'autre part, sur le projet de licenciement collectif et le plan de sauvegarde de l'emploi. Il appartient à ce titre à l'administration de s'assurer que l'employeur a adressé au comité d'entreprise tous les éléments utiles pour qu'il formule ses deux avis en toute connaissance de cause et dans des conditions insusceptibles de fausser sa consultation.
26. Il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'employeur a transmis au comité d'entreprise, ainsi qu'à l'expert-comptable que celui-ci avait désigné, les informations relatives à la trésorerie de la société Oxo, membre du même groupe, y compris, par un courrier du 22 février 2016, sur sa trésorerie à cette date. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier, notamment de la teneur même de l'avis rendu le 24 avril 2016 par le comité d'entreprise, que celui-ci a pu se prononcer en toute connaissance de cause sur l'opération projetée et le plan de sauvegarde de l'emploi, dans des conditions qui ne sont pas susceptibles d'avoir faussé sa consultation. A cet égard, la seule circonstance qu'un délai de moins de quinze jours ait séparé la date du 5 février 2016, à laquelle l'employeur a renoncé à une première demande d'homologation de son plan de sauvegarde de l'emploi, à la suite d'une demande d'injonction du comité d'entreprise, et le 24 février 2016, date à laquelle l'employeur a déposé une nouvelle demande à l'origine de la décision d'homologation litigieuse, n'est pas, par elle-même, de nature à entacher d'irrégularité la procédure d'information et de consultation.
27. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 1233-57-6 du code du travail, dans sa rédaction alors en vigueur : " L'administration peut, à tout moment en cours de procédure, faire toute observation ou proposition à l'employeur concernant le déroulement de la procédure ou les mesures sociales prévues à l'article L. 1233-32. Elle envoie simultanément copie de ses observations au comité d'entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel et, lorsque la négociation de l'accord visé à l'article L. 1233-24-1 est engagée, aux organisations syndicales représentatives dans l'entreprise. / L'employeur répond à ces observations et adresse copie de sa réponse aux représentants du personnel et, le cas échéant, aux organisations syndicales ". L'obligation qui incombe à l'administration d'envoyer copie au comité d'entreprise des observations qu'elle adresse à l'employeur sur le fondement de ces dispositions ainsi que l'obligation qui incombe à l'employeur d'envoyer copie de ses réponses aux représentants du personnel visent à ce que le comité d'entreprise dispose de tous les éléments utiles pour formuler ses avis en toute connaissance de cause. Il en va de même, en vertu des dispositions de l'article D. 1233-12 du même code, pour les injonctions adressées par l'administration à l'employeur en application des dispositions de l'article L. 1233-57-5.
28. A ce titre, il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le comité d'entreprise a été le premier destinataire des courriers des 26 janvier et 3 février 2016 adressés par l'employeur à l'administration. S'il n'est, en revanche, pas établi que le courriel adressé par voie électronique le 12 février par l'employeur à l'administration, en réponse à des observations formulées oralement le 11 février, ait été transmis aux représentants du personnel, ni que le comité d'entreprise ait été destinataire du courrier adressé par l'administration à l'employeur le 5 février 2016 à la suite de la demande d'injonction du comité d'entreprise, il ressort des pièces du dossier, notamment des procès-verbaux des réunions de cette instance, que la teneur des différents échanges entre l'employeur et l'administration a été portée à la connaissance du comité d'entreprise dans des conditions lui permettant de rendre ses avis en toute connaissance de cause.
S'agissant du contenu du plan de sauvegarde de l'emploi :
Quant au périmètre d'application des critères d'ordre :
29. Aux termes de l'article L. 1233-5 du code du travail, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " Lorsque l'employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l'absence de convention ou accord collectif de travail applicable, il définit les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements, après consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel. (...) Pour les entreprises soumises à l'obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63, le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements peut être fixé par l'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 ou par le document unilatéral mentionné à l'article L. 1233-24-4. /Dans le cas d'un document unilatéral, ce périmètre ne peut être inférieur à celui de chaque zone d'emploi dans laquelle sont situés un ou plusieurs établissements de l'entreprise concernés par les suppressions d'emploi ". Aux termes de l'article D. 1233-2 du même code : " Les zones d'emploi mentionnées à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 1233-5 sont celles référencées dans l'atlas des zones d'emploi établi par l'Institut national de la statistique et des études économiques et les services statistiques du ministre chargé de l'emploi ". Il résulte de ces dispositions qu'un document unilatéral fixant un plan de sauvegarde de l'emploi ne peut prévoir la mise en œuvre, pour chaque catégorie professionnelle, des critères déterminant l'ordre des licenciements à un niveau inférieur à celui des zones d'emploi dans lesquelles sont situés les établissements concernés par les suppressions d'emploi dans les catégories en cause.
30. D'une part, si le plan de sauvegarde de l'emploi de la société Avenir Télécom retient le siège de la société, situé à Marseille, comme périmètre d'application des critères d'ordre pour toutes les catégories professionnelles concernées, dans les services du siège, par le projet de licenciement, sans tenir compte de l'existence, dans la même zone d'emploi n° 9310 de Marseille-Aubagne, de plusieurs points de vente de la société, il ressort des pièces du dossier que les catégories professionnelles des salariés du siège ne sont pas représentées au sein de ces points de vente. Les critères d'ordre s'appliquent, par conséquent, pour les catégories professionnelles en cause, à l'ensemble des salariés de la zone d'emploi.
31. D'autre part, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le plan de sauvegarde de l'emploi identifie les magasins " Avenir Telecom Marseille Grand Littoral " et " Avenir Telecom Marseille la Valentine " comme relevant de la même zone d'emploi n° 9310 de Marseille-Aubagne.
32. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les dispositions de l'article L. 1233-5 du code du travail ont été méconnues.
Quant aux mesures de reclassement prévues par le plan :
33. Il résulte des dispositions des articles L. 1233-57-3 et L. 1233-58 du code du travail que, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document fixant le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi relatif à une entreprise en redressement ou liquidation judiciaire, il appartient à l'administration de vérifier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la conformité de ce document et du plan de sauvegarde de l'emploi dont il fixe le contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles applicables, en s'assurant notamment du caractère suffisant du plan de sauvegarde de l'emploi. A ce titre elle doit, au regard de l'importance du projet de licenciement, apprécier si les mesures contenues dans le plan sont précises et concrètes et si, à raison, pour chacune, de sa contribution aux objectifs de maintien dans l'emploi et de reclassement des salariés, elles sont, prises dans leur ensemble, propres à satisfaire à ces objectifs compte tenu, d'une part, des efforts de formation et d'adaptation déjà réalisés par l'employeur et, d'autre part, des moyens dont dispose l'entreprise. Dans le cadre de cet examen, il revient à l'autorité administrative de s'assurer que le plan de reclassement intégré au plan de sauvegarde de l'emploi est de nature à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité.
34. En premier lieu, les moyen tirés de l'erreur de droit commise par l'administration dans l'examen du plan de reclassement intégré au plan de sauvegarde de l'emploi et de l'absence de mention des postes de reclassement situés à l'étranger doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux qui sont énoncés aux points 15 à 17 ci-dessus.
35. En deuxième lieu, si le cinquième alinéa de l'article L. 1233-57-3 du code du travail dispose, dans sa rédaction applicable à l'espèce, que, lorsqu'elle examine le caractère suffisant des mesures prévues par un plan de sauvegarde de l'emploi soumis à son homologation, l'administration " prend en compte le rapport le plus récent établi par le comité d'entreprise au titre de l'article L. 2323-56, concernant l'utilisation du crédit d'impôt compétitivité emploi ", il ressort des pièces du dossier que la société Avenir Télécom n'a pas perçu de crédit d'impôt compétitivité emploi. Par suite, le comité d'entreprise n'avait pas à établir de rapport sur son utilisation et les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les dispositions citées ci-dessus ont été méconnues.
36. En troisième lieu, la circonstance que le plan de reclassement prévoie un dispositif d'acceptation tacite, par les salariés, d'une dispense d'activité en vue de rechercher un emploi avec maintien de leur rémunération, ne l'entache pas d'illégalité. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que cette disposition faisait obstacle, pour ce motif, à l'homologation du plan de sauvegarde de l'emploi.
37. Enfin, en estimant que les mesures contenues dans le plan, notamment la mise en place d'une bourse aux emplois, les aides financières à la mobilité géographique en cas de reclassement interne ou externe, le contrat de sécurisation professionnelle, l'indemnité temporaire compensatrice en cas de reclassement sur un poste moins bien rémunéré, les aides financières à la formation pour les salariés âgés et les salariés handicapés et les aides à la création et à la reprise d'entreprises étaient, prises dans leur ensemble, propres à satisfaire les objectifs de maintien dans l'emploi et de reclassement des salariés, compte tenu des moyens dont disposait, à la date de la décision litigieuse, la société Avenir Télécom, placée en redressement judiciaire, l'administration a fait une exacte application des dispositions de l'article L. 1233-57-3 du code du travail.
38. Il résulte de ce qui a été dit aux points 19 à 37 ci-dessus que Me K...et la société Avenir Télécom sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par son jugement n° 1603632 du 12 juillet 2016, le tribunal administratif de Marseille a, à la demande de M. G... et autres, annulé la décision d'homologation litigieuse.
39. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la société Avenir Telecom et de Me K..., qui ne sont pas, pour l'essentiel, les parties perdantes dans la présente instance. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la société Avenir Telecom et de Me K...présentées au même titre.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 1er décembre 2016 de la cour administrative d'appel de Marseille et les jugements n° 1603632 et n° 1603728 du 12 juillet 2016 du tribunal administratif de Marseille sont annulés.
Article 2 : Les demandes du comité d'entreprise de la société Avenir Télécom et autres, d'une part, et, d'autre part, de M. C...G...et autres présentées devant le tribunal administratif de Marseille sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. H...A...et à M. C...G..., premiers requérants dénommés, à la société Avenir Télécom, à Me K...en qualité de d'administrateur judiciaire de cette société et à la ministre du travail.