Vu la procédure suivante :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Paris :
- d'annuler la décision implicite par laquelle la présidente du conseil de Paris a rejeté son recours contre la décision du 29 avril 2016 par laquelle la caisse d'allocations familiales de Paris a prononcé la récupération d'une somme de 1 893,60 euros, en tant que cette somme comprend un indu de revenu de solidarité active pour la période de novembre 2015 à décembre 2015, et a mis fin à ses droits ;
- d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours amiable de la caisse d'allocations familiales de Paris a rejeté son recours dirigé contre la même décision du 29 avril 2016, en tant qu'elle porte sur un indu de prime d'activité pour la période de janvier 2016 à mars 2016 ;
- de le décharger de ces indus ;
- d'enjoindre au département et à la caisse d'allocations familiales de Paris de lui reverser les sommes retenues au titre du remboursement de ces indus et de le rétablir dans ses droits au revenu de solidarité active et à la prime d'activité.
Par un jugement n°s 1706208, 1707080 du 22 décembre 2017, le tribunal administratif de Paris a annulé ces décisions et rejeté le surplus des demandes.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 22 février et 14 mai 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, la caisse d'allocations familiales de Paris demande au Conseil d'État :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il annule la décision implicite de sa commission de recours amiable relative à l'indu de prime d'activité mis à la charge de M A... ;
2°) réglant l'affaire au fond dans cette mesure, de rejeter les conclusions correspondantes de M.A... ;
3°) de mettre à la charge de M. A...la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la sécurité sociale ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Luc Nevache, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Charles Touboul, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de la caisse d'allocations familiales de Paris, et à la SCP Delamarre, Jéhannin, avocat de M.A....
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. B...A..., allocataire de la caisse d'allocations familiales de Paris, s'est vu réclamer, par une décision du 29 avril 2016, le remboursement d'une somme de 1 893,60 euros, correspondant à un trop-perçu de revenu de solidarité active, de prime d'activité et d'allocation de soutien familial pour la période comprise entre le 1er novembre 2015 et le 31 mars 2016. Ses recours préalables devant la présidente du conseil de Paris, s'agissant du revenu de solidarité active, et devant la commission de recours amiable de la caisse d'allocations familiales de Paris, s'agissant de la prime d'activité, ayant fait l'objet de décisions implicites de rejet, M. A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler ces décisions, de le décharger des indus réclamés, d'ordonner le remboursement des sommes retenues à ce titre et de le rétablir dans ses droits. Par un jugement du 22 décembre 2017, le tribunal administratif a annulé les décisions contestées et rejeté le surplus des demandes. La caisse d'allocations familiales de Paris se pourvoit en cassation contre ce jugement en tant qu'il concerne l'indu de prime d'activité.
2. Aux termes des articles L. 843-1 et L. 845-1 du code de la sécurité sociale : " La prime d'activité est attribuée, servie et contrôlée, pour le compte de l'Etat, par les caisses d'allocations familiales et par les caisses de mutualité sociale agricole pour leurs ressortissants " et " Les directeurs des organismes mentionnés à l'article L. 843-1 procèdent aux contrôles et aux enquêtes concernant la prime d'activité et prononcent, le cas échéant, des sanctions (...) ". L'article L. 845-2 du même code prévoit que : " Toute réclamation dirigée contre une décision relative à la prime d'activité prise par l'un des organismes mentionnés à l'article L. 843-1 fait l'objet, préalablement à l'exercice d'un recours contentieux, d'un recours auprès de la commission de recours amiable, composée et constituée au sein du conseil d'administration de cet organisme (...) / Les recours contentieux relatifs aux décisions mentionnées au premier alinéa du présent article sont portés devant la juridiction administrative. (...) ".
3. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 431-10 du code de justice administrative : " L'Etat est représenté en défense par le préfet ou le préfet de région lorsque le litige, quelle que soit sa nature, est né de l'activité des administrations civiles de l'Etat dans le département ou la région (...) ". Aux termes de l'article R. 432-4 du même code : " L'Etat est dispensé du ministère d'avocat au Conseil d'Etat soit en demande, soit en défense, soit en intervention. / Les recours et les mémoires, lorsqu'ils ne sont pas présentés par le ministère d'un avocat au Conseil d'Etat, doivent être signés par le ministre intéressé ou par le fonctionnaire ayant reçu délégation à cet effet ".
4. Il résulte des dispositions du code de la sécurité sociale citées au point 2 que les décisions par lesquelles les caisses d'allocations familiales et les caisses de mutualité sociale agricole statuent sur les recours préalables en matière de prime d'activité sont prises pour le compte de l'Etat. Aucune disposition ne prévoit que ces organismes représentent l'Etat en justice dans les litiges relatifs à ces décisions ni n'habilite le préfet ou le ministre à leur déléguer la compétence qu'ils tiennent des dispositions du code de justice administrative citées au point 3 pour représenter l'Etat, respectivement, devant le tribunal administratif et devant le Conseil d'Etat. Il suit de là, d'une part, que le préfet territorialement compétent a seul qualité pour défendre devant le tribunal administratif sur les demandes tendant à l'annulation des décisions de ces organismes et, d'autre part, que le ministre chargé des affaires sociales, auquel les jugements statuant sur ces demandes doivent être notifiés, a seul qualité pour se pourvoir en cassation contre ces jugements et pour défendre devant le Conseil d'Etat saisi d'un pourvoi. Toutefois, afin de forger sa conviction et d'exercer son office de juge de pleine juridiction, le juge peut recueillir les observations de la caisse d'allocations familiales ou de la caisse de mutualité sociale agricole.
5. Le ministre chargé des affaires sociales, à qui le pourvoi a été communiqué, ne s'est pas approprié les conclusions de la caisse d'allocations familiales de Paris, ainsi qu'il aurait pu le faire jusqu'à la clôture de l'instruction. Le pourvoi introduit par la caisse n'ayant pas été régularisé, il doit être rejeté comme irrecevable.
6. M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Delamarre, Jéhannin, son avocat, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de la caisse d'allocations familiales de Paris la somme de 1 500 euros à verser à cette société. En revanche, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M.A..., qui n'est pas la partie perdante de la présente instance.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la caisse d'allocations familiales de Paris est rejeté.
Article 2 : La caisse d'allocations familiales de Paris versera à la SCP Delamarre, Jéhannin, avocat de M.A..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la caisse d'allocations familiales de Paris et à M. B... A....
Copie en sera adressée à la ministre des solidarités et de la santé.