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20/02/2019 | FRANCE | N°396338

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 20 février 2019, 396338


Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 6 février 2015 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté le réexamen de sa demande d'asile. Par une décision n° 15004633 du 23 novembre 2015 la Cour nationale du droit d'asile a annulé cette décision et a accordé à M. A... le bénéfice de la protection subsidiaire.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 janvier et 21 avril 2016 et le 9 octobre 2018 au sec

rétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Office français de protection des réf...

Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 6 février 2015 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté le réexamen de sa demande d'asile. Par une décision n° 15004633 du 23 novembre 2015 la Cour nationale du droit d'asile a annulé cette décision et a accordé à M. A... le bénéfice de la protection subsidiaire.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 janvier et 21 avril 2016 et le 9 octobre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) de renvoyer l'affaire à la Cour nationale du droit d'asile.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 relatif au statut des réfugiés ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pierre Ramain, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Aurélie Bretonneau, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de M. A...;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M.A..., de nationalité afghane, a été condamné, par un jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 27 novembre 2013, à quatre ans de prison pour aide à l'entrée irrégulière d'étrangers en France en bande organisée, ainsi qu'à une peine complémentaire d'interdiction du territoire français de dix ans. Au terme de sa détention, il a sollicité le réexamen de la demande d'asile qu'il avait présentée en 2008. Sa demande a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) par une décision du 6 février 2015. L'OFPRA se pourvoit en cassation contre la décision du 23 novembre 2015 par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a annulé sa décision et accordé à M. A...le bénéfice de la protection subsidiaire.

2. Aux termes de l'article R. 733-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue du décret du 16 août 2013, " Les mémoires et pièces produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication. / Toutefois, en cas de réouverture de l'instruction écrite, les mémoires et les pièces qui auraient été produits dans l'intervalle sont communiqués aux parties ".

3. La Cour nationale du droit d'asile est tenue de faire application, comme toute juridiction administrative, des règles générales relatives à toutes les productions postérieures à la clôture de l'instruction. Lorsque la cour est saisie, postérieurement à la clôture de l'instruction, d'un mémoire ou d'une note en délibéré émanant d'une des parties à l'instance, il lui appartient dans tous les cas d'en prendre connaissance avant de rendre sa décision et de le viser. En dehors des hypothèses où elle est tenue de rouvrir l'instruction à peine d'irrégularité, c'est-à-dire de celles où ce mémoire ou cette note contient l'exposé soit d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que la cour ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou qu'elle devrait relever d'office, la cour a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, de rouvrir l'instruction et de soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans le mémoire ou la note en délibéré. Si elle entend tenir compte des éléments contenus dans ce mémoire ou cette note en délibéré, elle doit soumettre ce mémoire ou cette note au débat contradictoire en renvoyant l'affaire à une audience ultérieure.

4. D'une part, il ressort des pièces de la procédure devant la Cour nationale du droit d'asile que l'OFPRA a adressé à cette juridiction un mémoire en défense, le 3 novembre 2015, soit après la clôture de l'instruction. En ne mentionnant pas ce mémoire dans les visas de la décision attaquée, la cour a entaché cette dernière d'irrégularité.

5. D'autre part, il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que pour juger que M. A...ne représentait pas une menace pour l'ordre public au sens de l'article L. 712-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et pour lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire, la Cour a pris en compte l'attestation d'hébergement fournie par M. A... à l'appui de sa note en délibéré, produite le 19 novembre 2015, postérieurement à la clôture de l'instruction et à l'audience du 13 novembre 2015. Si la Cour a communiqué cette note à l'OFPRA le 21 novembre suivant ce qui a eu pour effet de rouvrir l'instruction, elle a rendu sa décision le 23 novembre 2015 sans tenir une nouvelle audience, entachant ainsi la procédure d'irrégularité.

6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que l'OFPRA est fondé à demander l'annulation de la décision de la Cour nationale du droit d'asile qu'il attaque. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées au titre de cet article et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 par l'avocat de M.A....

D E C I D E :

--------------

Article 1er: La décision de la Cour nationale du droit d'asile du 23 novembre 2015 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la Cour nationale du droit d'asile.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. A...au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à M. B...A....


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 20 fév. 2019, n° 396338
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Pierre Ramain
Rapporteur public ?: Mme Aurélie Bretonneau
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER ; SCP BOUZIDI, BOUHANNA

Origine de la décision
Formation : 10ème chambre
Date de la décision : 20/02/2019
Date de l'import : 26/02/2019

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 396338
Numéro NOR : CETATEXT000038151194 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2019-02-20;396338 ?
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