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18/02/2019 | FRANCE | N°417021

France | France, Conseil d'État, 1ère - 4ème chambres réunies, 18 février 2019, 417021


Vu la procédure suivante :

M. C...B...A...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 26 novembre 2015 par laquelle le président du conseil départemental du Gard a confirmé sa décision du 11 septembre 2015 lui refusant le bénéfice du revenu de solidarité active. Par un jugement n° 1600263 du 25 juillet 2017, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 2 janvier et 3 avril 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...A...demande au Conse

il d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge du dépar...

Vu la procédure suivante :

M. C...B...A...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 26 novembre 2015 par laquelle le président du conseil départemental du Gard a confirmé sa décision du 11 septembre 2015 lui refusant le bénéfice du revenu de solidarité active. Par un jugement n° 1600263 du 25 juillet 2017, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 2 janvier et 3 avril 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge du département du Gard la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Zribi, Texier, son avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive n° 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ;

- la loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011 ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Fauvarque-Cosson, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Charles Touboul, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Zribi et Texier, avocat de M. B...A...et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat du département du Gard.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. C...B...A..., ressortissant espagnol, entré en France en septembre 2008 pour y effectuer un stage, a bénéficié d'un contrat d'avenir de juin 2009 à juin 2011. Il a ensuite conclu plusieurs contrats à durée déterminée de moins d'un an, au terme desquels il s'est, en janvier 2012, inscrit à Pôle emploi en qualité de demandeur d'emploi. Saisi à l'occasion du déménagement de l'intéressé, qui était allocataire du revenu de solidarité active depuis décembre 2012, le président du conseil départemental du Gard a refusé, par une décision du 11 septembre 2015, confirmée le 26 novembre suivant sur recours administratif de M. B...A..., de lui accorder le bénéfice du revenu de solidarité active au motif qu'il ne satisfaisait pas à la condition de droit au séjour prévue pour les ressortissants des Etats membres de l'Union européenne à l'article L. 262-6 du code de l'action sociale et des familles. M. B...A...se pourvoit en cassation contre le jugement du 25 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande d'annulation de cette décision.

2. Le premier alinéa de l'article L. 262-6 du code de l'action sociale et des familles prévoit que, pour pouvoir bénéficier du revenu de solidarité active, " le ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse doit remplir les conditions exigées pour bénéficier d'un droit de séjour et avoir résidé en France durant les trois mois précédant la demande. / (...) Le ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, entré en France pour y chercher un emploi et qui s'y maintient à ce titre, n'a pas droit au revenu de solidarité active. (...) ". Aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : / 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; / 2° S'il dispose (...) de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; (...) ". Le premier alinéa de l'article L. 122-1 de ce code ouvre un droit au séjour permanent sur l'ensemble du territoire français au " ressortissant visé à l'article L. 121-1 qui a résidé de manière légale et ininterrompue en France pendant les cinq années précédentes ", dont le titulaire perd le bénéfice, selon l'article L. 122-2 du même code, en cas d'absence du territoire français pendant une période de plus de deux années consécutives. Enfin, aux termes de l'article R. 121-6 du même code : " I.- Les ressortissants mentionnés au 1° de l'article L. 121-1 conservent leur droit au séjour en qualité de travailleur salarié ou de non-salarié : / (...) 2° S'ils se trouvent en chômage involontaire dûment constaté après avoir été employés pendant plus d'un an et se sont fait enregistrer en qualité de demandeur d'emploi (...) / II. Ils conservent au même titre leur droit de séjour pendant six mois : / 1° S'ils se trouvent en chômage involontaire dûment constaté à la fin de leur contrat de travail à durée déterminée inférieure à un an (...) ".

3. Il résulte des dispositions citées au point précédent que, pour pouvoir bénéficier du revenu de solidarité active, les ressortissants des Etats membres de l'Union européenne, des autres Etats parties à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse doivent remplir les conditions exigées pour bénéficier d'un droit au séjour. Au-delà de trois mois, un tel droit au séjour est notamment ouvert au ressortissant qui exerce une activité professionnelle en France et, au-delà de cinq ans de résidence légale et ininterrompue, il est acquis à titre permanent. Enfin, le droit au séjour supérieur à trois mois au titre de l'exercice d'une activité professionnelle est maintenu, pendant six mois, au ressortissant qui se trouve en chômage involontaire dûment constaté à la fin d'un contrat de travail à durée déterminée inférieure à un an et, sans limitation de durée, au ressortissant qui se trouve dans une telle situation après avoir été employé pendant plus d'un an et s'est fait enregistrer en qualité de demandeur d'emploi auprès du service de l'emploi compétent. Il suit de là que la seule circonstance que le contrat ayant précédé l'inscription en qualité de demandeur d'emploi ait été d'une durée de moins d'un an n'est pas de nature à limiter le droit au séjour de l'intéressé à une période de six mois.

4. Il résulte de ce qui précède que le tribunal a commis une erreur de droit en se fondant sur la seule circonstance que l'intéressé avait conclu un contrat à durée déterminée d'une durée inférieure à un an avant son inscription en qualité de demandeur d'emploi pour juger qu'il avait cessé de bénéficier, au-delà de la durée de six mois prévue au II de l'article R. 121-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, du maintien en qualité de travailleur de son droit au séjour au titre de l'article L. 121-1 de ce code et que, n'ayant pu en bénéficier en une autre qualité, il n'avait pas davantage pu acquérir un droit au séjour permanent au titre de l'article L. 122-1 du même code.

5. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, M. B... A...est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.

6. M. B...A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Dès lors, son avocat peut se prévaloir des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Zribi, Texier, son avocat, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à ce titre à la charge du département du Gard la somme de 3 000 euros.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 25 juillet 2017 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Nîmes.

Article 3 : Le département du Gard versera la somme de 3 000 euros à la SCP Zribi, Texier, avocat de M. B...A..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. C...B...A...et au département du Gard.

Copie en sera adressée au Défenseur des droits, au ministre de l'intérieur et à la ministre des solidarités et de la santé.


Synthèse
Formation : 1ère - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 417021
Date de la décision : 18/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

AIDE SOCIALE - DIFFÉRENTES FORMES D'AIDE SOCIALE - REVENU MINIMUM D'INSERTION (RMI) - RSA - BÉNÉFICE SUBORDONNÉ AU DROIT AU SÉJOUR - POUR LES RESSORTISSANTS DES ETATS DE L'UE - DES AUTRES ETATS DE L'EEE OU DE LA CONFÉDÉRATION SUISSE (ART - L - 262-6 DU CASF) - MAINTIEN DU DROIT AU SÉJOUR - SANS LIMITATION DE DURÉE - DU RESSORTISSANT QUI - D'UNE PART - SE TROUVE EN CHÔMAGE INVOLONTAIRE APRÈS AVOIR ÉTÉ EMPLOYÉ PLUS D'UN AN ET - D'AUTRE PART - S'EST FAIT INSCRIRE COMME DEMANDEUR D'EMPLOI (2° DU I DE L'ART - R - 121-6 DU CESEDA) - CAS DANS LEQUEL LE CONTRAT AYANT PRÉCÉDÉ CETTE INSCRIPTION A ÉTÉ D'UNE DURÉE DE MOINS D'UN AN.

04-02-06 Il résulte des articles L. 262-6 du code de l'action sociale et des familles (CASF), L. 121-1, L. 122-1, L. 122-2 et R. 121-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) que, pour pouvoir bénéficier du revenu de solidarité active (RSA), les ressortissants des Etats membres de l'Union européenne (UE), des autres Etats parties à l'accord sur l'Espace économique européen (EEE) ou de la Confédération suisse doivent remplir les conditions exigées pour bénéficier d'un droit au séjour.... ...Au-delà de trois mois, un tel droit au séjour est notamment ouvert au ressortissant qui exerce une activité professionnelle en France et, au-delà de cinq ans de résidence légale et ininterrompue, il est acquis à titre permanent. Enfin, le droit au séjour supérieur à trois mois au titre de l'exercice d'une activité professionnelle est maintenu, pendant six mois, au ressortissant qui se trouve en chômage involontaire dûment constaté à la fin d'un contrat de travail à durée déterminée inférieure à un an et, sans limitation de durée, au ressortissant qui se trouve dans une telle situation après avoir été employé pendant plus d'un an et s'est fait enregistrer en qualité de demandeur d'emploi auprès du service de l'emploi compétent.... ...Il résulte de ce qui précède que la seule circonstance que le contrat ayant précédé l'inscription en qualité de demandeur d'emploi ait été d'une durée de moins d'un an n'est pas de nature à limiter le droit au séjour de l'intéressé à une période de six mois.

COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES ET UNION EUROPÉENNE - RÈGLES APPLICABLES - LIBERTÉS DE CIRCULATION - LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES - DROIT AU SÉJOUR DES RESSORTISSANTS DES ETATS DE L'UE - DES AUTRES ETATS DE L'EEE OU DE LA CONFÉDÉRATION SUISSE - MAINTIEN DU DROIT AU SÉJOUR - SANS LIMITATION DE DURÉE - DU RESSORTISSANT QUI - D'UNE PART - SE TROUVE EN CHÔMAGE INVOLONTAIRE APRÈS AVOIR ÉTÉ EMPLOYÉ PLUS D'UN AN ET - D'AUTRE PART - S'EST FAIT INSCRIRE COMME DEMANDEUR D'EMPLOI (2° DU I DE L'ART - R - 121-6 DU CESEDA) - CAS DANS LEQUEL LE CONTRAT AYANT PRÉCÉDÉ CETTE INSCRIPTION A ÉTÉ D'UNE DURÉE DE MOINS D'UN AN.

15-05-01-01-01 Il résulte des articles L. 262-6 du code de l'action sociale et des familles (CASF), L. 121-1, L. 122-1, L. 122-2 et R. 121-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) que, pour pouvoir bénéficier du revenu de solidarité active (RSA), les ressortissants des Etats membres de l'Union européenne (UE), des autres Etats parties à l'accord sur l'Espace économique européen (EEE) ou de la Confédération suisse doivent remplir les conditions exigées pour bénéficier d'un droit au séjour.... ...Au-delà de trois mois, un tel droit au séjour est notamment ouvert au ressortissant qui exerce une activité professionnelle en France et, au-delà de cinq ans de résidence légale et ininterrompue, il est acquis à titre permanent. Enfin, le droit au séjour supérieur à trois mois au titre de l'exercice d'une activité professionnelle est maintenu, pendant six mois, au ressortissant qui se trouve en chômage involontaire dûment constaté à la fin d'un contrat de travail à durée déterminée inférieure à un an et, sans limitation de durée, au ressortissant qui se trouve dans une telle situation après avoir été employé pendant plus d'un an et s'est fait enregistrer en qualité de demandeur d'emploi auprès du service de l'emploi compétent.... ...Il résulte de ce qui précède que la seule circonstance que le contrat ayant précédé l'inscription en qualité de demandeur d'emploi ait été d'une durée de moins d'un an n'est pas de nature à limiter le droit au séjour de l'intéressé à une période de six mois.

ÉTRANGERS - SÉJOUR DES ÉTRANGERS - DROIT AU SÉJOUR DES RESSORTISSANTS DES ETATS DE L'UE - DES AUTRES ETATS DE L'EEE OU DE LA CONFÉDÉRATION SUISSE - MAINTIEN DU DROIT AU SÉJOUR - SANS LIMITATION DE DURÉE - DU RESSORTISSANT QUI - D'UNE PART - SE TROUVE EN CHÔMAGE INVOLONTAIRE APRÈS AVOIR ÉTÉ EMPLOYÉ PLUS D'UN AN ET - D'AUTRE PART - S'EST FAIT INSCRIRE COMME DEMANDEUR D'EMPLOI (2° DU I DE L'ART - R - 121-6 DU CESEDA) - CAS DANS LEQUEL LE CONTRAT AYANT PRÉCÉDÉ CETTE INSCRIPTION A ÉTÉ D'UNE DURÉE DE MOINS D'UN AN.

335-01 Il résulte des articles L. 262-6 du code de l'action sociale et des familles (CASF), L. 121-1, L. 122-1, L. 122-2 et R. 121-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) que, pour pouvoir bénéficier du revenu de solidarité active (RSA), les ressortissants des Etats membres de l'Union européenne (UE), des autres Etats parties à l'accord sur l'Espace économique européen (EEE) ou de la Confédération suisse doivent remplir les conditions exigées pour bénéficier d'un droit au séjour.... ...Au-delà de trois mois, un tel droit au séjour est notamment ouvert au ressortissant qui exerce une activité professionnelle en France et, au-delà de cinq ans de résidence légale et ininterrompue, il est acquis à titre permanent. Enfin, le droit au séjour supérieur à trois mois au titre de l'exercice d'une activité professionnelle est maintenu, pendant six mois, au ressortissant qui se trouve en chômage involontaire dûment constaté à la fin d'un contrat de travail à durée déterminée inférieure à un an et, sans limitation de durée, au ressortissant qui se trouve dans une telle situation après avoir été employé pendant plus d'un an et s'est fait enregistrer en qualité de demandeur d'emploi auprès du service de l'emploi compétent.... ...Il résulte de ce qui précède que la seule circonstance que le contrat ayant précédé l'inscription en qualité de demandeur d'emploi ait été d'une durée de moins d'un an n'est pas de nature à limiter le droit au séjour de l'intéressé à une période de six mois.


Publications
Proposition de citation : CE, 18 fév. 2019, n° 417021
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Bénédicte Fauvarque-Cosson
Rapporteur public ?: M. Charles Touboul
Avocat(s) : SCP ZRIBI, TEXIER ; SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/08/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:417021.20190218
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