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30/01/2019 | FRANCE | N°410603

France | France, Conseil d'État, 4ème et 1ère chambres réunies, 30 janvier 2019, 410603


Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 12 juin 2013 par laquelle l'inspecteur du travail de la 10ème section de l'unité territoriale des Alpes-Maritimes a autorisé la société Hôtel du Parvis de l'Europe à le licencier et celle du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ayant implicitement rejeté son recours hiérarchique. Par un jugement n° 1400789 du 1er mars 2016, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n°

16MA01507 du 16 mars 2017, la cour administrative d'appel de Marseille a rej...

Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 12 juin 2013 par laquelle l'inspecteur du travail de la 10ème section de l'unité territoriale des Alpes-Maritimes a autorisé la société Hôtel du Parvis de l'Europe à le licencier et celle du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ayant implicitement rejeté son recours hiérarchique. Par un jugement n° 1400789 du 1er mars 2016, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 16MA01507 du 16 mars 2017, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par M. B...contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 16 mai, 16 août et 20 décembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des postes et des communications électroniques ;

- le code du travail ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Fuchs, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Thouvenin, Coudray, Grévy, avocat de M. B...et à la SCP Célice, Soltner, Texidor, Périer, avocat de la société Hôtel du Parvis de l'Europe ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 12 juin 2013, l'inspecteur du travail de la 10ème section de l'unité territoriale des Alpes-Maritimes a autorisé la société Hôtel du Parvis de l'Europe, exploitant du Novotel Nice Centre, à licencier pour inaptitude physique M.B..., salarié protégé. Par son silence gardé sur le recours formé par l'intéressé contre cette décision, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a fait naître une décision de rejet. M. B...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 16 mars 2017 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté, en se fondant sur la tardiveté de sa demande de première instance, son appel contre le jugement du tribunal administratif de Nice du 1er mars 2016 rejetant sa demande d'annulation de ces deux décisions.

Sur le moyen tiré de l'erreur de droit commise par la cour :

2. L'article R. 2422-1 du code du travail, qui est relatif aux modalités d'exercice d'un recours hiérarchique contre une décision d'un inspecteur du travail ayant statué sur une demande d'autorisation de licencier un salarié protégé, dispose que : " Le ministre chargé du travail peut annuler ou réformer la décision de l'inspecteur du travail sur le recours de l'employeur, du salarié ou du syndicat que ce salarié représente ou auquel il a donné mandat à cet effet./ Ce recours est introduit dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de l'inspecteur (...) ". En imposant un délai de deux mois au recours hiérarchique formé contre la décision de l'inspecteur du travail, ces dispositions ont entendu se référer à la règle générale du contentieux administratif selon laquelle un recours gracieux ou hiérarchique contre une décision administrative doit être exercé avant l'expiration du délai de recours contentieux pour interrompre ce délai. Par suite, le délai de deux mois dans lequel doit s'exercer le recours qu'elles mentionnent est, comme le délai de recours contentieux que ce recours est susceptible d'interrompre, un délai franc.

3. Par ailleurs et pour les mêmes motifs, le respect de ce délai s'apprécie à la date à laquelle le pli contenant le recours hiérarchique est présenté par les services postaux au ministre chargé du travail.

4. Il est vrai que, s'agissant de ce dernier point, l'article 16 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, alors en vigueur, disposait que : " Toute personne tenue de respecter une date limite ou un délai pour présenter une demande (...) auprès d'une autorité administrative peut satisfaire à cette obligation au plus tard à la date prescrite au moyen d'un envoi de correspondance, le cachet apposé par les prestataires de services postaux (...) faisant foi (...) ". Toutefois, ces dispositions sont sans incidence sur l'application des règles relatives à la recevabilité des recours contentieux et ne sauraient, par suite, régir les conditions dans lesquelles s'exerce le recours hiérarchique prévu à l'article R. 2422-1 du code du travail.

5. Dès lors, en se fondant sur la date à laquelle le pli contenant le recours hiérarchique de M. B...avait été, non pas envoyé par ce dernier, mais reçu par le ministre chargé du travail, pour juger que ce recours avait été introduit tardivement et n'avait pu conserver le délai de recours contentieux, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit.

Sur l'autre moyen :

6. L'article R. 1 du code des postes et des communications électroniques, aux termes duquel " les envois prioritaires relevant du service universel postal sont distribués le jour ouvrable suivant le jour de leur dépôt ", ne peut être entendu comme fixant des délais impératifs. Par suite, en jugeant que M.B..., qui avait remis son recours hiérarchique aux services postaux le mercredi 14 août 2013, veille d'un jour férié, alors que le délai de recours expirait le vendredi 16 août, n'avait pas remis son pli en temps utile pour qu'il soit reçu avant l'expiration de ce délai de recours, la cour administrative d'appel n'a pas méconnu les dispositions de cet article et a porté sur les faits qui lui étaient soumis une appréciation souveraine, qui n'est pas entachée de dénaturation.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de M. B... doit être rejeté ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En outre, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la société Hôtel du Parvis de l'Europe au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. B...est rejeté.

Article 2 : Les conclusions de la société Hôtel du Parvis de l'Europe présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A...B..., à la société Hôtel du Parvis de l'Europe et à la ministre du travail.


Synthèse
Formation : 4ème et 1ère chambres réunies
Numéro d'arrêt : 410603
Date de la décision : 30/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

PROCÉDURE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - DÉLAIS - INTERRUPTION ET PROLONGATION DES DÉLAIS - INTERRUPTION PAR UN RECOURS ADMINISTRATIF PRÉALABLE - RESPECT DU DÉLAI D'EXERCICE DU RECOURS HIÉRARCHIQUE CONTRE UNE DÉCISION D'UN INSPECTEUR DU TRAVAIL AYANT STATUÉ SUR UNE DEMANDE D'AUTORISATION DE LICENCIER UN SALARIÉ PROTÉGÉ (ART - R - 2422-1 DU CODE DU TRAVAIL) - PRISE EN COMPTE DE LA DATE À LAQUELLE LE PLI CONTENANT CE RECOURS EST PRÉSENTÉ PAR LES SERVICES POSTAUX AU MINISTRE CHARGÉ DU TRAVAIL - EXISTENCE - SANS QU'AIT D'INCIDENCE L'ARTICLE 16 DE LA LOI DU 12 AVRIL 2000 RETENANT LA DATE D'ENVOI [RJ1].

54-01-07-04-01 Le respect du délai prévu à l'article R. 2422-1 du code du travail pour former un recours hiérarchique contre une décision d'un inspecteur du travail ayant statué sur une demande d'autorisation de licencier un salarié protégé s'apprécie à la date à laquelle le pli contenant le recours hiérarchique est présenté par les services postaux au ministre chargé du travail. Les dispositions de l'article 16 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 sont sans incidence sur l'application des règles relatives à la recevabilité des recours contentieux et ne sauraient, par suite, régir les conditions dans lesquelles s'exerce le recours hiérarchique prévu à l'article R. 2422-1 du code du travail.

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIÉS PROTÉGÉS - MODALITÉS DE DÉLIVRANCE OU DE REFUS DE L'AUTORISATION - RECOURS HIÉRARCHIQUE - RECOURS HIÉRARCHIQUE CONTRE UNE DÉCISION D'UN INSPECTEUR DU TRAVAIL AYANT STATUÉ SUR UNE DEMANDE D'AUTORISATION DE LICENCIER UN SALARIÉ PROTÉGÉ (ART - R - 2422-1 DU CODE DU TRAVAIL) - APPRÉCIATION DU RESPECT DU DÉLAI DE DEUX MOIS À LA DATE À LAQUELLE LE PLI CONTENANT CE RECOURS EST PRÉSENTÉ PAR LES SERVICES POSTAUX AU MINISTRE CHARGÉ DU TRAVAIL - EXISTENCE - SANS QU'AIT D'INCIDENCE L'ARTICLE 16 DE LA LOI DU 12 AVRIL 2000 RETENANT LA DATE D'ENVOI [RJ1].

66-07-01-03-04 Le respect du délai prévu à l'article R. 2422-1 du code du travail pour former un recours hiérarchique contre une décision d'un inspecteur du travail ayant statué sur une demande d'autorisation de licencier un salarié protégé s'apprécie à la date à laquelle le pli contenant le recours hiérarchique est présenté par les services postaux au ministre chargé du travail. Les dispositions de l'article 16 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 sont sans incidence sur l'application des règles relatives à la recevabilité des recours contentieux et ne sauraient, par suite, régir les conditions dans lesquelles s'exerce le recours hiérarchique prévu à l'article R. 2422-1 du code du travail.


Références :

[RJ1]

Cf., sur l'applicabilité de l'article 16 de la loi du 12 avril 2000, 21 mars 2003, Préfet de police c/ Mme,, n° 240511, T. p. 905.


Publications
Proposition de citation : CE, 30 jan. 2019, n° 410603
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Fuchs
Rapporteur public ?: M. Frédéric Dieu
Avocat(s) : SCP CELICE, SOLTNER, TEXIDOR, PERIER ; SCP THOUVENIN, COUDRAY, GREVY

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:410603.20190130
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