La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/12/2018 | FRANCE | N°412576

France | France, Conseil d'État, 5ème et 6ème chambres réunies, 17 décembre 2018, 412576


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 19 juillet et 19 octobre 2017, la société CERP Réunion SAS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'article 1er de l'ordonnance n° 2017-1092 du 8 juin 2017 relative aux composantes de la rémunération du pharmacien d'officine ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossie

r ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule ;

- le code de la santé publique ...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 19 juillet et 19 octobre 2017, la société CERP Réunion SAS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'article 1er de l'ordonnance n° 2017-1092 du 8 juin 2017 relative aux composantes de la rémunération du pharmacien d'officine ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule ;

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alain Seban, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Cécile Barrois de Sarigny, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de la société CERP Réunion SAS.

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 138-9 du code de la sécurité sociale : " Les remises, ristournes et avantages commerciaux et financiers assimilés de toute nature, y compris les rémunérations de services prévues à l'article L. 441-7 du code de commerce, consentis par tout fournisseur des officines en spécialités pharmaceutiques remboursables ne peuvent excéder par année civile et par ligne de produits, pour chaque officine, 2,5 % du prix fabricant hors taxes de ces spécialités. Pour les spécialités génériques définies au a du 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique, pour les spécialités inscrites au répertoire des groupes génériques en application des deux dernières phrases du b du même 5° et pour les spécialités de référence définies au a dudit 5° dont le prix de vente au public est identique à celui des autres spécialités du groupe générique auquel elles appartiennent, ce plafond est fixé par arrêté des ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale, de l'économie et du budget, dans la limite de 50 % du prix fabricant hors taxes. Pour les spécialités non génériques soumises à un tarif forfaitaire de responsabilité, le plafond est fixé par l'arrêté précité, dans la limite de 50 % du prix fabricant hors taxes correspondant au tarif forfaitaire de responsabilité " ; que l'article 1er de l'ordonnance attaquée a inséré après ces dispositions un deuxième alinéa ainsi rédigé : " Pour l'application du plafond fixé à l'alinéa précédent, il n'est pas tenu compte du montant de la marge prévue à l'article L. 162-38 que le fournisseur rétrocède le cas échéant à l'officine " ;

2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 162-38 du code de la sécurité sociale : " Sans préjudice des dispositions relatives aux conventions conclues entre les organismes d'assurance maladie et les professions de santé, les ministres chargés de l'économie, de la santé et de la sécurité sociale, peuvent fixer par décision les prix et les marges des produits et les prix des prestations de services pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale. Le comité institué par l'article L. 162-17-3 peut fixer, pour ce qui concerne les produits ou prestations mentionnés à l'article L. 165-1, le prix de cession maximal auquel peut être vendu le produit ou la prestation au distributeur en détail. Ces fixations tiennent compte de l'évolution des charges, des revenus et du volume d'activité des praticiens ou entreprises concernés " ; qu'aux termes de l'article R. 5124-2 du code de la santé publique : " On entend par : (...) 4° Dépositaire, l'entreprise se livrant, d'ordre et pour le compte : / - d'un ou plusieurs exploitants de médicaments, de générateurs, trousses ou précurseurs mentionnés au 3° de l'article L. 4211-1 ; / - ou d'un ou plusieurs fabricants ou importateurs d'objets de pansement ou articles présentés comme conformes à la Pharmacopée mentionnés au 2° de l'article L. 4211-1 ou de produits officinaux divisés mentionnés au 4° de l'article L. 5121-1, au stockage de ces médicaments, produits, objets ou articles dont elle n'est pas propriétaire, en vue de leur distribution en gros et en l'état ; / 5° Grossiste-répartiteur, l'entreprise se livrant à l'achat et au stockage de médicaments autres que des médicaments expérimentaux, en vue de leur distribution en gros et en l'état ; / Cette entreprise peut également se livrer, d'ordre et pour le compte de pharmaciens titulaires d'officine ou des structures mentionnées à l'article D. 5125-24-1, à l'achat et au stockage de médicaments autres que des médicaments expérimentaux, à l'exception des médicaments remboursables par les régimes obligatoires d'assurance maladie, en vue de leur distribution en gros et en l'état " ;

3. Considérant, en premier lieu, que les dispositions contestées de l'ordonnance attaquée s'appliquent de manière identique, en vertu de l'article L. 138-9 du code de la sécurité sociale qu'elles complètent, à " tout fournisseur des officines en spécialités pharmaceutiques remboursables ", sans faire de distinction entre grossistes-répartiteurs et distributeurs ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce qu'elles violeraient le principe d'égalité ne peut être accueilli ;

4. Considérant, en second lieu, que ces dispositions assouplissent les contraintes encadrant l'activité des fournisseurs des officines en spécialités pharmaceutiques remboursables ; que si la société requérante fait valoir que les grossistes-répartiteurs et les distributeurs de médicaments ne sont pas soumis à des sujétions identiques, les premiers devant satisfaire aux obligations de service public prévues à l'article R. 5124-2 précité du code de la santé publique, qui ne pèsent pas sur les seconds, il n'est aucunement démontré, ni même allégué, que les possibilités accrues de concurrence entre ces opérateurs par le moyen de rétrocessions de marges aux officines soit de nature à déboucher nécessairement sur la constitution de positions dominantes et l'abus de telles positions ; que, dans ces conditions, les moyens tirés d'une atteinte à la liberté d'entreprendre ou à la liberté du commerce et de l'industrie résultant des effets de la mesure sur les conditions de la concurrence ne sauraient, en tout état de cause, être accueillis ;

5. Considérant enfin que si, pour assurer la mise en oeuvre de l'exigence constitutionnelle de protection de la santé publique, découlant du onzième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, le législateur a encadré les conditions de préparation, de fabrication et de vente des médicaments, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'assouplissement mesuré de cet encadrement qui résulte de l'ordonnance attaquée, lequel répond à des buts d'intérêt général tenant à la baisse du prix des médicaments et à l'équilibre de l'assurance-maladie, soit de nature à porter atteinte à cette exigence en mettant les grossistes-répartiteurs dans l'impossibilité de faire face aux obligations propres qui sont les leurs en vertu des dispositions rappelées ci-dessus de l'article R. 5124-2 du code de la santé publique ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque ;

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la société CERP Réunion SAS est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société CERP Réunion SAS, au Premier ministre et à la ministre des solidarités et de la santé.


Synthèse
Formation : 5ème et 6ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 412576
Date de la décision : 17/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 17 déc. 2018, n° 412576
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alain Seban
Rapporteur public ?: Mme Cécile Barrois de Sarigny
Avocat(s) : SCP SPINOSI, SUREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 25/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:412576.20181217
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award