La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/11/2018 | FRANCE | N°421082

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 09 novembre 2018, 421082


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 30 mai, 4 juillet 2018 et 9 octobre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C...B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision n° 1801315 du 3 mai 2018 par laquelle le tribunal administratif de Grenoble, statuant en formation administrative, a refusé de l'autoriser à exercer une action en justice au nom de la communauté de communes pays d'Evian - vallée d'Abondance, en vue de déposer une plainte contre X avec constit

ution de partie civile pour prise illégale d'intérêts, complicité, recel et...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 30 mai, 4 juillet 2018 et 9 octobre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C...B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision n° 1801315 du 3 mai 2018 par laquelle le tribunal administratif de Grenoble, statuant en formation administrative, a refusé de l'autoriser à exercer une action en justice au nom de la communauté de communes pays d'Evian - vallée d'Abondance, en vue de déposer une plainte contre X avec constitution de partie civile pour prise illégale d'intérêts, complicité, recel et complicité de recel de prise illégale d'intérêts ;

2°) de l'autoriser à engager cette action au nom de la communauté de communes ;

3°) de mettre à la charge de la communauté de communes pays d'Evian - vallée d'Abondance la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code pénal ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Arnaud Skzryerbak, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de M.B..., et à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat de la communauté de communes Pays d'Evian - vallée d'Abondance.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 5211-58 du code général des collectivités territoriales : " Tout contribuable inscrit au rôle de la commune a le droit d'exercer, tant en demande qu'en défense, à ses frais et risques, avec l'autorisation du tribunal administratif, les actions qu'il croit appartenir aux établissements publics de coopération intercommunale auxquels a adhéré la commune et que ceux-ci, préalablement appelés à en délibérer, ont refusé ou négligé d'exercer ". Il appartient au tribunal administratif, statuant comme autorité administrative, et au Conseil d'Etat, saisi d'un recours de pleine juridiction dirigé contre la décision du tribunal administratif, lorsqu'ils examinent une demande présentée par un contribuable sur le fondement de ces dispositions, de vérifier, sans se substituer au juge de l'action, et au vu des éléments qui leur sont fournis, que l'action envisagée présente un intérêt matériel suffisant pour l'établissement public de coopération intercommunale et qu'elle a une chance de succès.

2. Il résulte de l'instruction que la communauté de communes du pays d'Evian a fait construire en 2012, pour un montant de 69 299,35 euros, un collecteur d'assainissement dans le secteur S'Bolay à Thollon-les-Mémises, desservant plusieurs habitations dont celle du maire de la commune, M.A..., par ailleurs conseiller communautaire. Estimant que M. A...avait nécessairement pris part à la préparation de cette décision et que celle-ci lui permettait de bénéficier d'un équipement qui le dispensait d'entreprendre des travaux de mise aux normes de sa ferme, M. B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble de l'autoriser à déposer plainte contre X avec constitution de partie civile, au nom de la communauté de communes pays d'Evian - vallée d'Abondance, issue de la fusion des communautés de communes du pays d'Evian et de la vallée d'Abondance, pour prise illégale d'intérêt, délit visé par l'article 432-12 du code pénal, ainsi que pour complicité, recel et complicité de recel de prise illégale d'intérêt. Par la décision attaquée, le tribunal administratif de Grenoble a refusé de lui accorder l'autorisation sollicitée, au motif que l'action pénale envisagée ne présentait pas de chance de succès.

3. L'article 432-12 du code pénal réprime " le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou par une personne investie d'un mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou une opération dont elle a, au moment de l'acte, en tout ou partie, la charge d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation ou le paiement ".

4. Il résulte de l'instruction, d'une part, que la décision d'attribuer le marché relatif à l'équipement litigieux a été prise, le 10 février 2012, par le seul président de la communauté de communes, sur le fondement de la délibération du conseil communautaire du 26 mai 2008 qui l'autorisait à prendre toute décision concernant la préparation et la passation des marchés d'un montant inférieur à 206 000 euros hors taxes. D'autre part, M. B...n'apporte aucun élément de nature à étayer, en tout état de cause, l'existence d'une délibération antérieure de la communauté de communes relative au principe de l'engagement d'une telle dépense, à laquelle M. A...aurait été susceptible d'avoir participé. Ainsi, il n'apparaît pas que M.A..., maire de Thollon-les-Mémises et conseiller communautaire sans fonction exécutive à la date de la décision d'engager les travaux litigieux, ait exercé la surveillance, l'administration, la liquidation ou le paiement de cette opération au sens des dispositions précitées de l'article 432-12 du code pénal. Dans ces conditions, l'action pénale envisagée par M. B...apparaît dépourvue de chance de succès.

5. La demande du requérant ne satisfaisant pas à l'une au moins des conditions auxquelles est subordonnée l'autorisation d'agir en justice en lieu et place de la communauté de communes, il n'est pas nécessaire d'examiner les autres moyens de sa requête.

6. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du 3 mai 2018 par laquelle le tribunal administratif de Grenoble a refusé de l'autoriser à exercer une action en justice au nom de la communauté de communes pays d'Evian - vallée d'Abondance.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la communauté de communes pays d'Evian - vallée d'Abondance, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B...la somme de 3 000 euros à verser à la communauté de communes au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : M. B...versera à la communauté de communes pays d'Evian - vallée d'Abondance une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. C...B...et à la communauté de communes pays d'Evian - vallée d'Abondance.


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 421082
Date de la décision : 09/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 09 nov. 2018, n° 421082
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Arnaud Skzryerbak
Rapporteur public ?: M. Rémi Decout-Paolini
Avocat(s) : SCP GARREAU, BAUER-VIOLAS, FESCHOTTE-DESBOIS ; SCP BORE, SALVE DE BRUNETON, MEGRET

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:421082.20181109
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award