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09/11/2018 | FRANCE | N°411485

France | France, Conseil d'État, 1ère et 4ème chambres réunies, 09 novembre 2018, 411485


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 13 juin 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération des médecins de France et M. B...A...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite née du silence gardé par le Premier ministre sur la demande d'abrogation du décret n° 2016-1391 du 17 octobre 2016 relatif à la composition du conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales, formée par un courrier reçu le 2 mars 2017 ;

2°) d'enjoindr

e au Premier ministre d'abroger ce décret ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la ...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 13 juin 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération des médecins de France et M. B...A...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite née du silence gardé par le Premier ministre sur la demande d'abrogation du décret n° 2016-1391 du 17 octobre 2016 relatif à la composition du conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales, formée par un courrier reçu le 2 mars 2017 ;

2°) d'enjoindre au Premier ministre d'abroger ce décret ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros à verser à chacun d'eux au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Thibaut Félix, auditeur,

- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. L'article L. 641-4 du code de la sécurité sociale dispose que : " La Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales est administrée par un conseil d'administration composé des présidents de ses sections professionnelles et de six représentants des organisations syndicales interprofessionnelles des professions libérales. / (...) Un décret fixe les conditions d'application du présent article, et notamment les conditions de désignation des représentants des organisations syndicales et la fixation du nombre de voix de chacun des administrateurs ".

2. Le II de l'article D. 641-2 du même code, dans sa rédaction issue du décret du 17 octobre 2016 que le Premier ministre, par la décision attaquée, a refusé d'abroger dispose que : " Les six sièges des représentants des organisations syndicales interprofessionnelles mentionnées à l'article L. 641-4 sont répartis comme suit : / 1° Union nationale des professions libérales : 4 représentants. / 2° Chambre nationale des professions libérales : 2 représentants. / Ces représentants doivent avoir la qualité d'électeur au sein des conseils d'administration des sections professionnelles, sans y occuper de fonction d'administrateurs. / En cas de démission, de décès ou si le représentant cesse de remplir les conditions pour être électeur à l'une des sections professionnelles, son organisation syndicale désigne un nouveau représentant. / Chacun de ces représentants dispose d'une voix au conseil d'administration ".

3. En premier lieu, il résulte des dispositions législatives précitées que le législateur a entendu que le conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales comprenne, outre les présidents de ses sections professionnelles, des administrateurs représentant les organisations syndicales interprofessionnelles des professions libérales, qui siègent en cette qualité et non en vertu d'un mandat propre. Par suite, le pouvoir réglementaire pouvait légalement, sans méconnaître l'article L. 641-4 du code de la sécurité sociale, s'abstenir de fixer la durée pendant laquelle ces représentants peuvent siéger à ce conseil d'administration, dont ils cesseront de faire partie sur la demande de l'organisation syndicale ayant procédé à leur désignation.

4. En deuxième lieu, le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un comme dans l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier.

5. D'une part, en vertu de l'article D. 641-2 du code de la sécurité sociale, les représentants des organisations syndicales membres du conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales ne peuvent pas occuper simultanément des fonctions d'administrateur des sections professionnelles de cette même caisse. Dans la mesure où le conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales se compose, d'une part, des présidents des sections professionnelles et, d'autre part, des représentants des organisations syndicales interprofessionnelles des professions libérales, le pouvoir réglementaire a pu, sans méconnaître le principe d'égalité, prévenir toute situation de cumul et de confusion des mandats en interdisant aux administrateurs de la Caisse qui ne siègent pas en qualité de président de section professionnelle d'exercer simultanément des fonctions d'administrateur dans ces mêmes sections.

6. D'autre part, en vertu du même article D. 641-2, les six sièges des représentants des organisations syndicales interprofessionnelles des professions libérales créés par la loi sont répartis à proportion de quatre pour l'Union nationale des professions libérales et de deux pour la Chambre nationale des professions libérales. Il ressort des pièces du dossier, notamment du mémoire en défense produit par le ministre des solidarités et de la santé, que, pour déterminer les organisations syndicales ainsi appelées à désigner des représentants au sein du conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales et fixer le nombre des sièges attribués à chacune d'elles, le pouvoir réglementaire a pris en considération leur représentativité à l'égard des professionnels affiliés à la caisse, en se fondant, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, sur leur audience, appréciée notamment à partir des résultats des élections aux conseils d'administration des caisses propres aux professions libérales du régime social des indépendants, sur leur ancienneté et sur leurs effectifs. Dès lors, le moyen tiré de ce que ces dispositions du décret porteraient atteinte au principe d'égalité entre organisations syndicales ne peut qu'être écarté.

7. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir soulevée par le ministre des solidarités et de la santé, les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation du refus d'abroger le décret du 17 octobre 2016 qu'ils attaquent. Leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la Fédération des médecins de France et de M. A...est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B...A..., représentant désigné, pour l'ensemble des requérants, et à la ministre des solidarités et de la santé.

Copie en sera adressée au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 1ère et 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 411485
Date de la décision : 09/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

62-01-02-03-01 SÉCURITÉ SOCIALE. ORGANISATION DE LA SÉCURITÉ SOCIALE. RÉGIMES DE NON-SALARIÉS. ASSURANCE VIEILLESSE ET INVALIDITÉ DES PROFESSIONS LIBÉRALES. CAISSE NATIONALE. - CAISSE NATIONALE D'ASSURANCE VIEILLESSE DES PROFESSIONS LIBÉRALES (CNAVPL) - CONSEIL D'ADMINISTRATION - REPRÉSENTANTS DES ORGANISATIONS SYNDICALES Y SIÉGEANT EN CETTE QUALITÉ, ET NON EN VERTU D'UN MANDAT PROPRE [RJ1] - EXISTENCE (ART. L. 641-4 DU CSS) - CONSÉQUENCE - POUVOIR RÉGLEMENTAIRE AYANT PU LÉGALEMENT S'ABSTENIR DE FIXER LA DURÉE DE TELLES FONCTIONS (II DE L'ART. D. 641-2 DU CSS).

62-01-02-03-01 Il résulte de l'article L. 641-4 du code de la sécurité sociale (CSS) que le législateur a entendu que le conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL) comprenne, outre les présidents de ses sections professionnelles, des administrateurs représentant les organisations syndicales interprofessionnelles des professions libérales, qui siègent en cette qualité et non en vertu d'un mandat propre. Par suite, le pouvoir réglementaire pouvait légalement, sans méconnaître cet article, s'abstenir de fixer la durée pendant laquelle ces représentants peuvent siéger à ce conseil d'administration, dont ils cesseront de faire partie sur la demande de l'organisation syndicale ayant procédé à leur désignation.


Références :

[RJ1]

Rappr., sur cette distinction, CE, 19 mai 1972, Ministre de la santé publique et de la sécurité sociale c/,, n° 84664, p. 392 ;

CE, Assemblée, 4 juillet 2003, Mme,, n° 239509, p. 310.


Publications
Proposition de citation : CE, 09 nov. 2018, n° 411485
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Thibaut Félix
Rapporteur public ?: M. Rémi Decout-Paolini

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:411485.20181109
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