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25/10/2018 | FRANCE | N°413590

France | France, Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 25 octobre 2018, 413590


Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 5 janvier 2011 par laquelle le directeur du courrier des Hauts-de-Seine de La Poste lui a infligé la sanction de l'exclusion temporaire pour une durée de douze mois dont trois avec sursis et de condamner La Poste à lui verser les sommes de 15 479,06 euros et de 15 000 euros en réparation des préjudices financier et moral qu'il estime avoir subis. Par un jugement n° 1101594 du 23 mars 2015, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision du 5 ja

nvier 2011 et condamné La Poste à indemniser M. A...de la perte ...

Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 5 janvier 2011 par laquelle le directeur du courrier des Hauts-de-Seine de La Poste lui a infligé la sanction de l'exclusion temporaire pour une durée de douze mois dont trois avec sursis et de condamner La Poste à lui verser les sommes de 15 479,06 euros et de 15 000 euros en réparation des préjudices financier et moral qu'il estime avoir subis. Par un jugement n° 1101594 du 23 mars 2015, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision du 5 janvier 2011 et condamné La Poste à indemniser M. A...de la perte de rémunération subie.

Par un arrêt n° 15VE01605 du 20 juin 2017, la cour administrative d'appel de Versailles a, sur appel de la Poste, annulé ce jugement et rejeté la demande de M.A....

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 22 août et 22 novembre 2017 et les 5 septembre et 12 octobre 2018, M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de La Poste la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;

- le décret n° 82-447 du 28 mai 1982 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Clément Malverti, maître des requête,

- les conclusions de Mme Sophie Roussel, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Meier-Bourdeau, Lecuyer, avocat de M.A..., et à Me Haas, avocat de La Poste ;

1. Considérant qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que M.A..., fonctionnaire titulaire depuis 1996, affecté au sein de l'établissement CC-T de Boulogne-Billancourt de La Poste et détaché permanent du syndicat SUD Poste 92 depuis le mois d'octobre 2009, a fait l'objet, le 5 janvier 2011, d'une sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de douze mois dont trois mois avec sursis ; que, par un jugement du 23 mars 2015, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cette sanction et a condamné La Poste à verser à M. A...une indemnité en réparation de la perte de rémunération qu'il a subie ; que M. A...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 20 juin 2017 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a, sur appel de La Poste, annulé ce jugement et rejeté la demande qu'il avait présentée devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

2. Considérant qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes ;

3. Considérant que la constatation et la caractérisation des faits reprochés à l'agent relèvent, dès lors qu'elles sont exemptes de dénaturation, du pouvoir souverain des juges du fond ; que le caractère fautif de ces faits est susceptible de faire l'objet d'un contrôle de qualification juridique de la part du juge de cassation ; que l'appréciation du caractère proportionné de la sanction au regard de la gravité des fautes commises relève, pour sa part, de l'appréciation des juges du fond et n'est susceptible d'être remise en cause par le juge de cassation que dans le cas où la solution qu'ils ont retenue quant au choix, par l'administration, de la sanction est hors de proportion avec les fautes commises ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juge du fond que la sanction infligée le 5 janvier 2011 à M. A...était fondée sur quatre motifs tirés respectivement de ce qu'il s'était introduit sans autorisation dans les établissements de La Poste des Hauts-de-Seine et au siège social entre le 7 et le 28 mai 2010, de ce qu'il avait porté atteinte à la sécurité et à la sûreté des établissements de La Poste le 10, 21 et 28 mai, de ce qu'il avait exercé des contraintes physiques sur le directeur d'établissement d'Asnières le 7 mai et de ce qu'il avait participé activement à la séquestration d'agents le 10 mai ; que si la cour administrative d'appel a jugé que les trois derniers motifs n'étaient pas matériellement établis et ne pouvaient être retenus pour fonder la décision de sanction, elle a retenu que les faits d'intrusion sans autorisation dans les établissements de La Poste des Hauts-de-Seine et au siège social constituaient des fautes susceptibles de faire l'objet d'une sanction disciplinaire et que la sanction d'exclusion temporaire d'une durée de douze mois dont trois mois avec sursis qui avait été infligée demeurait proportionnée à ces faits, compte tenu de leur nature et de leur caractère répété ;

5. Considérant qu'après avoir souverainement caractérisé, sans les dénaturer, les faits reprochés à l'intéressé, la cour a pu, sans commettre d'erreur de qualification juridique, juger que les faits en cause, constituant des intrusions sans autorisation dans les établissements de La Poste des Hauts-de-Seine et au siège social, présentaient le caractère de fautes susceptibles de faire l'objet d'une sanction disciplinaire ; que, toutefois, en confirmant le choix de la sanction qui avait été retenu par La Poste au vu de l'ensemble des faits sur lesquels elle s'était initialement fondée, la cour a maintenu une sanction qui s'avère, dans les circonstances de l'espèce, hors de proportion avec les seuls faits finalement retenus à l'encontre de M. A...; que, par suite et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens du pourvoi, M. A...est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ;

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de La Poste la somme de 3 000 euros à verser à M.A..., au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M. A...qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 20 juin 2017 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles.

Article 3 : La Poste versera à M. A...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de La Poste présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et à La Poste.


Synthèse
Formation : 2ème - 7ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 413590
Date de la décision : 25/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 25 oct. 2018, n° 413590
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Clément Malverti
Rapporteur public ?: Mme Sophie Roussel
Avocat(s) : SCP MEIER-BOURDEAU, LECUYER ; HAAS

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:413590.20181025
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