Vu la procédure suivante :
L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Floride a demandé au tribunal administratif de Limoges de prononcer la décharge des rappels de taxe sur les surfaces commerciales auxquels elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012. Par un jugement n° 1501820 du 1er février 2018, ce tribunal a fait droit à sa demande.
Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 28 mars et 20 juillet 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de la société.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 ;
- le décret n° 95-85 du 26 janvier 1995 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alexandre Koutchouk, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat de la société Floride.
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Floride exploite dans un même local, sous l'enseigne " Troc.com ", une activité d'achat-revente tant auprès des professionnels que des particuliers et une activité de dépôt-vente à destination des particuliers. A la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration a constaté que la société n'avait déposé, au titre des années 2011 à 2014, aucune déclaration de taxe sur les surfaces commerciales alors qu'eu égard à la surface des locaux dans lesquels elle exerçait son activité et au montant du chiffre d'affaires réalisé au titre de ses activités d'achat-revente et de dépôt-vente, elle entrait dans le champ de cette taxe. L'administration fiscale a, par conséquent, assujettie la société à cet impôt selon la procédure de taxation d'office, sur le fondement des dispositions de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales. Le ministre de l'action et des comptes publics se pourvoit en cassation contre le jugement du 1er février 2018 par lequel le magistrat délégué du tribunal administratif de Limoges a déchargé la société des rappels de taxe au titre des années 2011 et 2012.
2. Aux termes de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " Il est institué une taxe sur les surfaces commerciales assise sur la surface de vente des magasins de commerce de détail, dès lors qu'elle dépasse quatre cents mètres carrés des établissements ouverts à partir du 1er janvier 1960 quelle que soit la forme juridique de l'entreprise qui les exploite. (...) La surface de vente des magasins de commerce de détail, prise en compte pour le calcul de la taxe (...) s'entend des espaces affectés à la circulation de la clientèle pour effectuer ses achats, de ceux affectés à l'exposition des marchandises proposées à la vente, à leur paiement et de ceux affectés à la circulation du personnel pour présenter les marchandises à la vente. / (...) La taxe ne s'applique pas aux établissements dont le chiffre d'affaires annuel est inférieur à 460 000 euros ". Aux termes de l'article 1er du décret du 26 janvier 1995 relatif à la taxe sur les surfaces commerciales, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " (...) Les prestations de service, notamment la restauration, ne sont pas considérées comme des ventes au détail (...) ".
3. En jugeant que l'activité de dépôt-vente exercée par la société Floride, consistant à exposer dans son magasin de commerce de détail des marchandises dont elle n'acquiert pas la propriété, mais qui lui sont remises par des particuliers qui lui ont donné mandat de les vendre pour leur compte et de leur restituer le produit de cette vente minoré d'une commission rémunérant son activité d'intermédiaire, devait être regardée comme une prestation de service ne relevant pas des ventes au détail prises en considération pour l'assujettissement à la taxe sur les surfaces commerciales, alors que cette activité permet que soit réalisée, au sein du magasin, la vente en l'état de marchandises à des consommateurs finaux, c'est-à- dire une vente au détail au sens des dispositions de la loi du 13 juillet 1972 mentionnées ci-dessus, le tribunal administratif a commis une erreur de droit.
4. Il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 1er février 2018 du tribunal administratif de Limoges est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Limoges.
Article 3 : Les conclusions de l'EURL Floride présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'action et des comptes publics et à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Floride.