Vu la procédure suivante :
Par une décision n° 406905 du 7 février 2018, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, d'une part, annulé l'arrêt n° 16DA01513 du 17 novembre 2016 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté l'appel formé par M. I... H..., Mme F... J..., Mme C...B..., Mme D... G...et Mme K... E...A...contre le jugement n° 1602583 du 29 juin 2016 du tribunal administratif de Lille rejetant leur demande d'annulation de la décision 3 février 2016 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du Nord-Pas-de-Calais a homologué le document unilatéral fixant le plan de sauvegarde de l'emploi de l'unité économique et sociale composée des sociétés Tel and Com, L'enfant d'aujourd'hui et Squadra et, d'autre part, sursis à statuer sur la requête présentée par les mêmes requérants devant la cour administrative d'appel, afin de permettre un débat contradictoire en vue du règlement de l'affaire au fond.
Par deux nouveaux mémoires, enregistrés les 7 mars et 16 avril 2018, M. H... et autres reprennent les conclusions et les moyens de leur pourvoi.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du travail ;
- le code de commerce ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-François de Montgolfier, maître des requêtes ;
- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. H...et autres et à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de la société Tel and Com et autres ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 12 octobre 2018, présentée par la société Tel and Com et autres ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 16 octobre 2018, présentée par M. H... et autres ;
1. Considérant que, par une décision du 3 février 2016, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du Nord-Pas-de-Calais a homologué le document unilatéral fixant le plan de sauvegarde de l'emploi des sociétés Tel and Com, L'enfant d'aujourd'hui et Squadra, réunies dans l'unité économique et sociale (UES) Tel and Com ; que par le jugement du 29 juin 2016 dont M. H... et autres ont relevé appel, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande d'annulation de cette décision ;
2. Considérant que M. H...et autres soutiennent notamment, d'une part, que les mesures de reclassement prévues par le plan ne sont pas suffisantes au regard des moyens de l'UES Tel and Com et du groupe auquel elle appartient et, d'autre part, que l'administration ne pouvait légalement omettre, dans son appréciation des moyens du groupe auquel appartient l'UES Tel and Com, les moyens financiers dont disposait la société Sarto Finances ;
3. Considérant qu'il incombe notamment à l'administration, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document fixant, de manière unilatérale, un plan de sauvegarde de l'emploi en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail, d'apprécier, conformément aux dispositions de l'article L. 1233-57-3 du même code " (...) le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe (...) " ; que, pour l'application de ces dispositions, les moyens du groupe s'entendent des moyens, notamment financiers, dont dispose l'ensemble des entreprises placées, ainsi qu'il est dit au I de l'article L. 2331-1 du code du travail, sous le contrôle d'une même entreprise dominante dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce, ainsi que de ceux dont dispose cette entreprise dominante, quel que soit le lieu d'implantation du siège de ces entreprises ;
4. Considérant que, pour l'application de cette règle, les sociétés Tel and Com et autres soutiennent en défense qu'il résulte des dispositions de l'article L. 2331-4 du code du travail que les sociétés dont l'objet unique est la prise de participation dans d'autres entreprises, sans immixtion dans leur gestion, n'ont pas le caractère de " sociétés dominantes ", au sens de l'article L. 2331-1 du code du travail, et ne font, par suite, pas partie du groupe à prendre en considération au titre de l'article L. 1233-57-3 du même code ; qu'il résulte toutefois de ce qui a été dit ci-dessus que le groupe de sociétés auquel fait référence ce dernier article n'est pas nécessairement identique à celui pour lequel l'article L. 2331-1 prévoit la constitution d'un comité de groupe ; que les dispositions de l'article L. 2331-4 ne sauraient, dès lors, être utilement invoquées pour la détermination du périmètre du groupe à prendre en compte dans l'évaluation du caractère suffisant d'un plan de sauvegarde de l'emploi ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 233-1 du code de commerce : " Lorsqu'une société possède plus de la moitié du capital d'une autre société, la seconde est considérée (...) comme filiale de la première " ; qu'il ressort des pièces du dossier et n'est d'ailleurs pas contesté que la société Squadra, qui fait partie de l'UES Tel and Com et qui contrôle les sociétés Tel and Com et L'enfant d'aujourd'hui, était, ainsi que le soutiennent les défenderesses, détenue à 100 % par la société Sarto Finances à la date de la décision litigieuse ; que les sociétés Squadra et Sarto Finances étaient d'ailleurs dirigées par la même personne ; que, par suite, les moyens financiers dont disposait la société Sarto Finances devaient, sans qu'y fassent obstacle ni les dispositions de l'article L. 2331-4 du code du travail, ainsi qu'il a été dit au point 4, ni le régime fiscal auquel cette société était soumise, être pris en compte par l'administration pour apprécier, conformément aux dispositions de l'article L. 1233-57-3 du code du travail, la suffisance des mesures du plan de sauvegarde de l'emploi de l'UES Tel and Com ;
6. Considérant qu'il est constant que l'administration n'a pas tenu compte des moyens financiers dont disposait cette société Sarto Finances ; qu'une telle omission a, par suite, entaché d'illégalité la décision d'homologation litigieuse du 3 février 2016 ;
7. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans une telle circonstance, de se prononcer sur le bien-fondé du moyen tiré du caractère insuffisant des mesures prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. H...et autres sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande ;
9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre solidairement à la charge des sociétés Tel and Com, L'enfant d'aujourd'hui et Squadra, une somme de 1 400 euros chacun à verser à M. H..., à Mme J..., à Mme B..., à Mme G... et à Mme E...A..., au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative pour les frais exposés par eux devant le tribunal administratif de Lille, la cour administrative d'appel de Douai et le Conseil d'Etat ; qu'en revanche, les dispositions de cet article font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de M. H... et autres, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille du 29 juin 2016 et la décision du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du Nord-Pas-de-Calais du 3 février 2016 sont annulés.
Article 2 : Les sociétés Tel and Com, L'enfant d'aujourd'hui et Squadra verseront, solidairement, à M.H..., à MmeJ..., à MmeB..., à Mme G...et à Mme E... A...une somme de 1 400 euros chacun, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions présentées par les sociétés Tel and Com et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. I...H..., premier représentant désigné pour l'ensemble des requérants et à la société Tel and Com, première dénommée pour tous ses cosignataires.
Copie en sera adressée à la ministre du travail.