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03/10/2018 | FRANCE | N°416036

France | France, Conseil d'État, 5ème et 6ème chambres réunies, 03 octobre 2018, 416036


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 27 novembre 2017 et le 8 mars 2018, la société Vortex demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 2017-296 du 31 mai 2017 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) l'a mise en demeure de se conformer, à l'avenir, aux dispositions de l'article 1er du décret n° 94-972 du 9 novembre 1994 en s'abstenant de diffuser, dans une zone où elle ne diffuse pas au moins trois heures de programme

d'intérêt local entre 6 heures et 22 heures, des messages de publicité local...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 27 novembre 2017 et le 8 mars 2018, la société Vortex demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 2017-296 du 31 mai 2017 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) l'a mise en demeure de se conformer, à l'avenir, aux dispositions de l'article 1er du décret n° 94-972 du 9 novembre 1994 en s'abstenant de diffuser, dans une zone où elle ne diffuse pas au moins trois heures de programme d'intérêt local entre 6 heures et 22 heures, des messages de publicité locale au sens de l'article 3 de ce décret, ensemble la décision du CSA du 27 septembre 2017 rejetant son recours gracieux contre cette décision ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;

- le décret n° 94-972 du 9 novembre 1994 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alain Seban, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Cécile Barrois de Sarigny, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat du Syndicat des radios indépendantes.

1. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 27 de la loi du 30 septembre 1986 : " Compte tenu des missions d'intérêt général des organismes du secteur public et des différentes catégories de services de communication audiovisuelle diffusés par voie hertzienne terrestre, des décrets en Conseil d'Etat fixent les principes généraux définissant les obligations concernant : / 1° La publicité, le télé-achat et le parrainage (...) " ; que l'article 1er du décret du 9 novembre 1994 pris pour l'application de ces dispositions et définissant les obligations relatives à l'accès à la publicité locale et au parrainage local des éditeurs de services de radio diffusés par voie hertzienne terrestre en application des articles 29, 29-1 et 30-7 de la même loi dispose que : " Les éditeurs de services de radio diffusés par voie hertzienne terrestre en application des articles 29, 29-1 et 30-7 de la loi du 30 septembre 1986 susvisée qui consacrent à des programmes d'intérêt local au moins trois heures de diffusion chaque jour entre 6 heures et 22 heures peuvent diffuser des messages de publicité locale " ; qu'aux termes de l'article 3 du même décret : " Est considéré comme publicité locale, dès lors qu'elle est diffusée sur une zone dont la population est inférieure à six millions d'habitants, tout message publicitaire comportant l'indication, par l'annonceur, d'une adresse ou d'une identification locale explicite " ;

2. Considérant, d'autre part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 42 de la loi du 30 septembre 1986 : " Les éditeurs et distributeurs de services de communication audiovisuelle et les opérateurs de réseaux satellitaires peuvent être mis en demeure de respecter les obligations qui leur sont imposées par les textes législatifs et réglementaires et par les principes définis aux articles 1er et 3-1 " ; qu'aux termes de l'article 42-1, " si la personne faisant l'objet de la mise en demeure ne se conforme pas à celle-ci ", elle peut faire l'objet d'une sanction infligée par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) " compte tenu de la gravité du manquement, et à la condition que celui-ci repose sur des faits distincts ou couvre une période distincte de ceux ayant déjà fait l'objet d'une mise en demeure " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par une décision du CSA n° 2011-1214 du 15 novembre 2011, la société Vortex a été autorisée à exploiter le service de catégorie D " Skyrock " dans les zones de Dignes-les-Bains, Toulon, Briançon, Gap, Cannes, Nice, Brignoles, Draguignan, Saint-Raphaël, Saint-Tropez et Apt ; que cette autorisation a été reconduite par une décision n° 2016-572 du 1er juin 2016 ; que la décision du CSA n° 2010-711 du 5 octobre 2010 relative à un appel aux candidatures pour l'exploitation de services de radio par voie hertzienne terrestre en modulation de fréquence à temps complet ou partagé dans le ressort du comité technique radiophonique de Marseille définissait la catégorie D comme les " Services de radio thématiques à vocation nationale " en précisant : " Cette catégorie est constituée de services dont la vocation est la diffusion d'un programme thématique sur le territoire national sans décrochages locaux " ; qu'ayant été alerté à propos de la diffusion sur l'antenne de Skyrock, le 22 juillet 2016, sur les fréquences 107 MHz à Nice et Cannes et 89 Mhz à Toulon, d'un message publicitaire portant sur une opération promotionnelle de la chaîne de restaurants " Quick ", vantant une offre valable dans les restaurants de cette chaîne situés dans le Var et la Côte d'Azur, le CSA a estimé que ce message constituait une publicité locale interdite aux services de catégorie D par les dispositions précitées du décret du 9 novembre 1994 ; qu'il a, en conséquence, adressé à la société Vortex une mise en demeure de se conformer, à l'avenir, à ses obligations en la matière par une décision du 31 mai 2017, confirmée, sur recours gracieux, par une décision du 27 septembre 2017 ; que la société Vortex demande l'annulation, pour excès de pouvoir, de ces deux décisions ;

Sur l'intervention :

4. Considérant que le Syndicat des radios indépendantes (SIRTI) a intérêt au maintien des décisions attaquées ; qu'ainsi son intervention est recevable ;

Sur la légalité externe des décisions attaquées :

5. Considérant, d'une part, qu'aucune disposition, ni aucun principe, ne fait obligation au CSA de mentionner dans ses délibérations que le quorum prescrit par le dernier alinéa de l'article 4 de la loi du 30 septembre 1986 est réuni ; que, par suite, les décisions attaquées ne sont pas irrégulières faute d'être revêtues d'une telle mention ; qu'il ressort au demeurant des pièces du dossier que le quorum était atteint lorsque ces décisions ont été délibérées par le collège du CSA ;

6. Considérant, d'autre part, qu'aucune disposition, ni aucun principe, ne faisait obligation au CSA de motiver la décision du 27 septembre 2017 par laquelle il a rejeté le recours gracieux formé par la société Vortex contre la décision du 31 mai 2017, dont il n'est pas contesté qu'elle était elle-même motivée ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision du 27 septembre 2017 doit être écarté ;

Sur la légalité interne :

7. Considérant qu'il résulte des dispositions citées au point 1 que, pour être considéré comme publicité locale, un message publicitaire doit tout à la fois être diffusé sur une zone comprenant moins de 6 millions d'habitants et comporter l'indication, par l'annonceur, d'une adresse ou d'une identification locale explicite ; que, pour prononcer la mise en demeure litigieuse, le CSA a estimé que le message publicitaire incriminé " a été diffusé dans des zones couvrant un bassin de population de moins de six millions d'habitants et comprenait une identification locale explicite ; qu'il constitu[ait], dès lors, un message de publicité locale au sens de l'article 3 du décret n° 94-972 du 9 novembre 1994 " ;

8. Considérant qu'en statuant ainsi, le CSA n'a pas, contrairement à ce qui est soutenu, omis de vérifier la condition tenant à l'indication, par l'annonceur, d'une adresse ou d'une identification locale explicite ; qu'il n'a pas davantage entendu imposer aux services de catégorie D de diffuser les mêmes messages publicitaires dans l'ensemble des zones où ils sont autorisés ; que les moyens tirés d'erreurs de droit doivent, par suite, être écartés ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le message en cause, relatif à une offre promotionnelle, s'achevait par les indications suivantes : " offre valable dans vos Quick du Var et de Côte d'Azur. Retrouvez votre Quick sur myquick.fr ou sur votre application " ; qu'il comportait ainsi l'indication, par l'annonceur, d'une identification locale explicite et renvoyait, en outre, à un site internet permettant aux auditeurs de connaître l'adresse des établissements participant à l'offre promotionnelle ; que c'est, par suite, à bon droit que le CSA l'a regardé comme relevant de la publicité locale au sens des dispositions de l'article 3 du décret du 9 novembre 1994 ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Vortex n'est pas fondée à demander l'annulation des décisions qu'elle attaque ;

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge du CSA qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'intervention du SIRTI est admise.

Article 2 : La requête de la société Vortex est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Vortex et au Conseil supérieur de l'audiovisuel.

Copie pour information en sera adressée à la ministre de la culture et au Syndicat des radios indépendantes (SIRTI).


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

56-02-02 RADIO ET TÉLÉVISION. RÈGLES GÉNÉRALES. PUBLICITÉ. - PUBLICITÉ LOCALE - NOTION (ART. 27 DE LA LOI DU 30 SEPTEMBRE 1986 ET ART. 1ER ET 3 DU DÉCRET DU 9 NOVEMBRE 1994) - EXISTENCE EN L'ESPÈCE.

56-02-02 Il résulte de l'article 27 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 et des articles 1er et 3 du décret n° 94-972 du 9 novembre 1994 que, pour être considéré comme publicité locale, un message publicitaire doit tout à la fois être diffusé sur une zone comprenant moins de 6 millions d'habitants et comporter l'indication, par l'annonceur, d'une adresse ou d'une identification locale explicite.... ,,Pour prononcer la mise en demeure litigieuse, le CSA a estimé que le message publicitaire incriminé a été diffusé dans des zones couvrant un bassin de population de moins de six millions d'habitants et comprenait une identification locale explicite ; qu'il constitu[ait], dès lors, un message de publicité locale au sens de l'article 3 du décret n° 94-972 du 9 novembre 1994. En statuant ainsi, le CSA n'a pas omis de vérifier la condition tenant à l'indication, par l'annonceur, d'une adresse ou d'une identification locale explicite. Il n'a pas davantage entendu imposer aux services de catégorie D de diffuser les mêmes messages publicitaires dans l'ensemble des zones où ils sont autorisés.,,,Le message en cause, relatif à une offre promotionnelle, s'achevait par les indications suivantes : offre valable dans vos Quick du Var et de Côte d'Azur. Retrouvez votre Quick sur myquick.fr ou sur votre application. Il comportait ainsi l'indication, par l'annonceur, d'une identification locale explicite et renvoyait, en outre, à un site internet permettant aux auditeurs de connaître l'adresse des établissements participant à l'offre promotionnelle. Par suite, message relevant de la publicité locale au sens des dispositions de l'article 3 du décret du 9 novembre 1994.


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 03 oct. 2018, n° 416036
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alain Seban
Rapporteur public ?: Mme Cécile Barrois de Sarigny
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO

Origine de la décision
Formation : 5ème et 6ème chambres réunies
Date de la décision : 03/10/2018
Date de l'import : 18/06/2019

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 416036
Numéro NOR : CETATEXT000037461587 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2018-10-03;416036 ?
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