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26/07/2018 | FRANCE | N°404078

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 26 juillet 2018, 404078


La société à responsabilité limitée (SARL) Group'Fade demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009 et 2010. Par un jugement no 1300729 du 5 mars 2015, le tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15NC00859 du 5 août 2016, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par la société contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 5 octobre 2016 et le 5 janvie

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La société à responsabilité limitée (SARL) Group'Fade demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009 et 2010. Par un jugement no 1300729 du 5 mars 2015, le tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15NC00859 du 5 août 2016, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par la société contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 5 octobre 2016 et le 5 janvier 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Group'Fade demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales,

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Séverine Larere, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Yohann Bénard, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Le Prado, avocat de la SARL Group'fade.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du troisième alinéa du I de l'article 209 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige, pour la détermination du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés : " Sous réserve de l'option prévue à l'article 220 quinquies, en cas de déficit subi pendant un exercice, ce déficit est considéré comme une charge de l'exercice suivant et déduit du bénéfice réalisé pendant ledit exercice. Si ce bénéfice n'est pas suffisant pour que la déduction puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté sur les exercices suivants.". Aux termes du 5 de l'article 221 du même code, dans sa rédaction applicable à l'année de réalisation du déficit en litige : " Le changement de l'objet social ou de l'activité réelle d'une société emporte cessation d'entreprise. (...) ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que la mise en oeuvre du droit au report déficitaire est subordonnée notamment à la condition qu'une société n'ait pas subi, dans son activité, des transformations telles qu'elle n'est plus, en réalité, la même.

2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Vêtements Fade, aux droits de laquelle vient désormais la société Group'Fade, a exercé depuis sa création en 1975 une activité d'exploitation de fonds de commerce d'articles d'habillement et de rideaux, puis a créé entre 2003 et 2008 six filiales dont l'objet était l'exploitation des fonds de commerce. Au cours de l'exercice clos en 2008, la société Vêtements Fade a procédé à la fermeture du fonds situé à Senones (Vosges) qu'elle exploitait directement, puis s'est consacrée exclusivement à son activité de holding. A l'issue d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a notamment remis en cause l'imputation sur le bénéfice des exercices 2009 et 2010 d'une partie du déficit né à la clôture de l'exercice 2008, au motif que la cessation par la société, en 2008, de l'exercice de son activité de commerce devait être regardée comme une cessation d'entreprise au sens des dispositions du 5 de l'article 221 du code général des impôts citées ci-dessus, de sorte que le déficit de cette activité abandonnée ne pouvait être imputé sur le bénéfice imposable en 2009 tiré de l'activité subsistante de holding. La société Group'Fade se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 5 août 2016 par lequel la cour administrative de Nancy a rejeté sa requête dirigée contre le jugement du tribunal administratif de Nancy du 5 mars 2015 qui a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a, en conséquence de ce qui précède, été assujettie au titre des exercices 2009 et 2010.

3. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour, pour caractériser la cessation d'activité de la société au cours de l'exercice clos en 2008, a relevé que l'activité initiale de la société Vêtements Fade était exclusivement, lors de sa création en 1975, une activité de commerce, puis que la société avait exercé, à partir de 2003, une double activité de commerce et de holding, en développant progressivement six filiales, et enfin qu'elle avait fermé le dernier fonds de commerce qu'elle exploitait directement en 2008. En se fondant ainsi, pour juger que le changement d'activité de la société était constitutif d'une cessation d'entreprise au sens du 5 de l'article 221 du code général des impôts, sur l'activité exercée depuis sa création, alors que le déficit reportable en litige était né au cours de l'exercice clos en 2008, au cours duquel l'activité de holding, seule poursuivie en 2009, représentait déjà une part non marginale de son activité totale, la cour a commis une erreur de droit. Par suite, son arrêt doit être annulé.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

5. Il résulte de ce qui est dit au point 3 ci-dessus que la société Vêtements Fade, aux droits de laquelle vient la société Group'Fade, n'avait pas subi dans son activité, entre les exercices clos en 2008 et en 2009, de transformations telles qu'elle n'était plus, en réalité, la même, au sens du 5 de l'article 221 du code général des impôts. Par suite, elle était fondée à mettre en oeuvre son droit au report, sur l'exercice clos en 2009, du déficit constaté au terme de l'exercice clos en 2008.

6. Il résulte de ce qui précède que la société Group'Fade est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses conclusions en réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2009.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros à verser à la société Group'Fade au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 5 août 2016 de la cour administrative d'appel de Nancy et le jugement du 5 mars 2015 du tribunal administratif de Nancy sont annulés.

Article 2 : La société Group'Fade est déchargée, dans la limite de sa demande devant le tribunal administratif de Nancy, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009 et 2010.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 3 500 euros à la société Group'Fade au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SARL Group'Fade et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 404078
Date de la décision : 26/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 26 jui. 2018, n° 404078
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Séverine Larere
Rapporteur public ?: M. Yohann Bénard
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 05/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:404078.20180726
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