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12/07/2018 | FRANCE | N°414896

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 12 juillet 2018, 414896


Vu la procédure suivante :

Mme B...A..., épouseC..., a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 10 juillet 2012 par laquelle l'établissement public de santé Erasme a rejeté sa demande de versement de l'allocation d'aide au retour à l'emploi et d'enjoindre à cet établissement de faire droit à sa demande de versement à compter du 15 avril 2012, dans le délai de cinq jours à compter du jugement à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard. Par un jugement n° 1207494 du 11 juin 2015, le tribunal administratif a rejeté sa

demande.

Par une ordonnance n° 15VE02708 du 3 octobre 2017, enregist...

Vu la procédure suivante :

Mme B...A..., épouseC..., a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 10 juillet 2012 par laquelle l'établissement public de santé Erasme a rejeté sa demande de versement de l'allocation d'aide au retour à l'emploi et d'enjoindre à cet établissement de faire droit à sa demande de versement à compter du 15 avril 2012, dans le délai de cinq jours à compter du jugement à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard. Par un jugement n° 1207494 du 11 juin 2015, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par une ordonnance n° 15VE02708 du 3 octobre 2017, enregistrée le 9 octobre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président de la cour administrative d'appel de Versailles a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré le 12 août 2015 au greffe de cette cour, présenté par MmeC.... Par ce pourvoi et par un nouveau mémoire, enregistré le 20 novembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme C...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 11 juin 2015 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande en enjoignant à l'établissement public de santé Erasme de prendre, dans un délai de cinq jours à compter de la décision à intervenir et sous astreinte de 200 euros par jour de retard, d'une part, une décision portant acceptation de prise en charge de l'allocation de retour à l'emploi à compter du 15 avril 2012, d'autre part, une décision portant versement de cette allocation jusqu'à son réemploi ;

3°) de mettre à la charge de l'établissement public de santé Erasme la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Dorothée Pradines, auditeur,

- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de MmeC..., et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'établissement public de santé Erasme.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B...C..., après avoir travaillé pour un employeur privé, a exercé au sein de l'établissement public de santé Erasme, en qualité de praticien contractuel puis de praticien hospitalier à temps plein, du 1er février 2010 à la date de sa démission le 3 février 2011. Elle a ensuite travaillé pour des employeurs de droit privé, avant d'être licenciée à compter du 15 avril 2012. Par un courrier du 24 mai 2012, Pôle emploi lui a notifié son refus de lui verser l'allocation d'aide au retour à l'emploi, au motif qu'elle avait travaillé plus longtemps chez un ou plusieurs employeurs relevant du secteur public que chez des employeurs du secteur privé, et l'a invitée à solliciter une indemnisation auprès de son ancien employeur public. Par un courrier du 10 juillet 2012, l'établissement public de santé Erasme lui a notifié une décision de refus fondée sur la circonstance qu'elle n'avait pas été involontairement privée de l'emploi qu'elle exerçait en son sein. Par un jugement du 11 juin 2015, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté le recours formé par Mme C... contre cette décision.

2. Aux termes de l'article L. 5422-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige : " Ont droit à l'allocation d'assurance les travailleurs involontairement privés d'emploi (...), aptes au travail et recherchant un emploi qui satisfont à des conditions d'âge et d'activité antérieure ". Aux termes de l'article L. 5424-1 du même code : " Ont droit à une allocation d'assurance dans les conditions prévues aux articles L. 5422-2 et L. 5422-3 : / 1° Les agents fonctionnaires et non fonctionnaires de l'Etat et de ses établissements publics administratifs, les agents titulaires des collectivités territoriales ainsi que les agents statutaires des autres établissements publics administratifs ainsi que les militaires (...) ". Il résulte de ces dispositions ainsi que de celles des articles L. 5422-2, L. 5422-3 et L. 5422-20 du même code que les agents publics involontairement privés d'emploi ont droit à une allocation d'assurance dans les conditions définies par l'accord prévu par l'article L. 5422-20, dès lors qu'un tel accord est intervenu et a été agréé et qu'il n'est pas incompatible avec les règles qui gouvernent l'emploi des agents publics. L'article 4 du règlement général annexé à la convention du 6 mai 2011 relative à l'indemnisation du chômage, agréée par arrêté du 15 juin 2011, prévoit que : " Les salariés privés d'emploi justifiant d'une période d'affiliation comme prévu à l'article 3 doivent : (...) e) N'avoir pas quitté volontairement, sauf cas prévus par un accord d'application, leur dernière activité professionnelle salariée, ou une activité professionnelle salariée autre que la dernière dès lors que, depuis le départ volontaire, il ne peut être justifié d'une période d'affiliation d'au moins 91 jours ou d'une période de travail d'au moins 455 heures (...) ".

3. Par ailleurs, aux termes de l'article R. 5424-2 du code du travail : " Lorsque, au cours de la période retenue pour l'application de l'article L. 5422-2, la durée totale d'emploi accomplie pour le compte d'un ou plusieurs employeurs affiliés au régime d'assurance a été plus longue que l'ensemble des périodes d'emploi accomplies pour le compte d'un ou plusieurs employeurs relevant de l'article L. 5424-1, la charge de l'indemnisation incombe à [Pôle emploi] pour le compte de l'organisme mentionné à l'article L. 5427-1. / Dans le cas contraire, cette charge incombe à l'employeur relevant de l'article L. 5424-1, ou à celui des employeurs relevant de cet article qui a employé l'intéressé durant la période la plus longue ".

4. Il résulte de ces dispositions que, d'une part, lorsqu'un agent a, après avoir quitté volontairement un emploi, retrouvé un autre emploi dont il a été involontairement privé, il a droit à une indemnisation au titre de l'assurance chômage dès lors qu'il a travaillé au moins quatre-vingt-onze jours ou quatre cent cinquante-cinq heures dans ce dernier emploi et que, d'autre part, dans cette hypothèse, la détermination de la personne à laquelle incombe la charge de l'indemnisation dépend de la question de savoir quel est l'employeur qui, dans la période de référence prise en compte pour l'ouverture des droits, l'a occupé pendant la période la plus longue.

5. Il ressort des pièces de la procédure devant les juges du fond que Mme C... soutenait que l'établissement public de santé Erasme ne pouvait légalement lui opposer la circonstance qu'elle avait démissionné, dès lors qu'elle avait droit à l'allocation d'aide au retour à l'emploi du fait de son licenciement par son dernier employeur. Dans ces conditions, en se fondant sur la circonstance que la décision attaquée était motivée par sa démission, sans rechercher si elle justifiait depuis lors d'une période d'affiliation d'au moins quatre-vingt-onze jours ou d'une période de travail d'au moins quatre cent cinquante-cinq heures, pour écarter comme inopérante son argumentation tirée de ce que, eu égard à la durée de ses différentes périodes d'emploi, l'établissement public de santé devait lui verser l'allocation d'aide au retour à l'emploi, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a commis une erreur de droit. Par suite, son jugement doit être annulé.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'établissement public de santé Erasme la somme de 3 000 euros à verser à Mme C...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de MmeC..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 11 juin 2015 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Article 3 : L'établissement public de santé Erasme versera la somme de 3 000 euros à Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de l'établissement public de santé Erasme présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme B...A..., épouseC..., et à l'établissement public de santé Erasme.


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 414896
Date de la décision : 12/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 12 jui. 2018, n° 414896
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Dorothée Pradines
Rapporteur public ?: M. Rémi Decout-Paolini
Avocat(s) : SCP GADIOU, CHEVALLIER ; SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:414896.20180712
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