Vu la procédure suivante :
L'union nationale de l'apiculture française (UNAF) a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision implicite de rejet opposée par le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt à sa demande de communication de la position française au sein du Comité permanent des végétaux, animaux, denrées alimentaires et aliments pour animaux (CPVADAAA) sur les substances actives néonicotinoïdes sulfoxaflor et flupyradifurone. Par un jugement n° 1608929 du 4 mai 2017, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 4 juillet et 4 octobre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'UNAF demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions de première instance ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, et notamment son Préambule ;
- le règlement (CE) n° 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002 ;
- le règlement (CE) n° 1107/2009 du 21 octobre 2009 ;
- le règlement (UE) n° 182/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 février 2011 ;
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Paul-François Schira, auditeur,
- les conclusions de Mme Aurélie Bretonneau, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Brouchot, avocat de l'union nationale de l'apiculture française ;
Considérant de ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'Union nationale de l'apiculture française a demandé au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt que lui soit communiquée la position française au sein du Comité permanent des végétaux, animaux, denrées alimentaires et aliments pour animaux sur le sulfoxaflor et le flupyradifurone, deux substances actives néonicotinoïdes. Elle demande l'annulation du jugement du 4 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus implicite du ministre de lui communiquer cette information.
2. Aux termes de l'article 7 de la Charte de l'environnement : " Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques (...) ". L'article L. 124-1 du code de l'environnement prévoit que : " Le droit de toute personne d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues, reçues ou établies par les autorités publiques mentionnées à l'article L. 124-3 ou pour leur compte s'exerce dans les conditions définies par les dispositions du titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve des dispositions du présent chapitre ". Aux termes de l'article L. 124-4 du même code : " I. - Après avoir apprécié l'intérêt d'une communication, l'autorité publique peut rejeter la demande d'une information relative à l'environnement dont la consultation ou la communication porte atteinte : 1° Aux intérêts mentionnés aux articles L. 311-5 à L. 311-8 du code des relations entre le public et l'administration, à l'exception de ceux visés au e et au h du 2° de l'article L. 311-5 ; 2° A la protection de l'environnement auquel elle se rapporte ; 3° Aux intérêts de la personne physique ayant fourni, sans y être contrainte par une disposition législative ou réglementaire ou par un acte d'une autorité administrative ou juridictionnelle, l'information demandée sans consentir à sa divulgation ; 4° A la protection des renseignements prévue par l'article 6 de la loi n° 51-711 du 7 juin 1951 sur l'obligation, la coordination et le secret en matière de statistiques. / II. - Sous réserve des dispositions du II de l'article L. 124-6, elle peut également rejeter : 1° Une demande portant sur des documents en cours d'élaboration ; 2° Une demande portant sur des informations qu'elle ne détient pas ; 3° Une demande formulée de manière trop générale " et aux termes du II de l'article L. 124-5 du même code: " II.-L'autorité publique ne peut rejeter la demande d'une information relative à des émissions de substances dans l'environnement que dans le cas où sa consultation ou sa communication porte atteinte : / 1° A la conduite de la politique extérieure de la France, à la sécurité publique ou à la défense nationale (...) ".
3. Il résulte des dispositions combinées de l'article 58 du règlement (CE) n° 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002 établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l'Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires, de l'article 79 du règlement (CE) n° 1107/2009 du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et de l'article 3 du règlement (UE) n° 182/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 février 2011 établissant les règles et principes généraux relatifs aux modalités de contrôle par les Etats membres de l'exercice des compétences d'exécution par la Commission que, pour décider de l'approbation d'une nouvelle substance active qui sera inscrite en annexe du règlement d'exécution (UE) n° 540/2011 de la Commission du 25 mai 2011 portant application du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil, en ce qui concerne la liste des substances actives approuvées, la Commission européenne est assistée par un Comité permanent des végétaux, des animaux, des denrées alimentaires et des aliments pour animaux, composé de représentants des États membres et présidé par le représentant de la Commission. Aux termes du paragraphe 6 de l'article 3 du règlement n° 182/2011 du 16 février 2011 précité : " L'avis du comité est inscrit au procès-verbal. Les membres du comité ont le droit de demander que leur position figure au procès-verbal. "
4. La position exprimée par le représentant du gouvernement français au sein d'un tel comité a trait aux négociations menées par la France au sein des institutions de l'Union européenne. Par suite, en considérant que la communication de la position de la France au sein du Comité permanent des végétaux, animaux, denrées alimentaires et aliments pour animaux sur le sulfoxaflor et le flupyradifurone relevait de la conduite de la politique extérieure de la France au sens des dispositions, citées au point 2, du II de l'article L. 124-5 du code de l'environnement, et en en déduisant que l'administration pouvait légalement, après avoir apprécié, comme elle était tenue de la faire en vertu de l'article L. 124-4 du code de l'environnement, l'intérêt d'une communication, opposer ce motif pour la refuser, le tribunal administratif de Paris n'a entaché son jugement, dont la minute comporte toutes les signatures requises, ni d'erreur de droit ni d'inexacte qualification juridique des faits.
5. Ce motif justifiait nécessairement, à lui seul, le dispositif de rejet. Si le tribunal a également fondé sa décision sur le motif tiré de ce que la communication de la position en litige se heurtait à l'inexistence de tout document la matérialisant, alors que l'article L. 124-4 du code de l'environnement, cité au point 2, consacre un droit d'accès aux informations et non seulement à des documents, il résulte de ce qui vient d'être dit que ce motif ne peut qu'être regardé comme surabondant. Le moyen tiré de ce que ce motif est entaché d'erreur de droit ne saurait dès lors, quel qu'en soit le bien-fondé, entraîner l'annulation du jugement attaqué.
6. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de l'Union nationale de l'apiculture française doit être rejeté, y compris, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de l'Union nationale de l'apiculture française est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'Union nationale de l'apiculture française et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.