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04/07/2018 | FRANCE | N°404083

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 04 juillet 2018, 404083


Vu la procédure suivante :

La société Numalliance a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la réduction au montant de 4 200 euros de la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2008. Par un jugement no 1302608 du 16 avril 2015, le tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15NC01361 du 5 août 2016, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par la société contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique,

enregistrés les 5 octobre 2016, 5 janvier 2017 et 18 avril 2018 au secrétariat du cont...

Vu la procédure suivante :

La société Numalliance a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la réduction au montant de 4 200 euros de la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2008. Par un jugement no 1302608 du 16 avril 2015, le tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15NC01361 du 5 août 2016, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par la société contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 5 octobre 2016, 5 janvier 2017 et 18 avril 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Numalliance demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le règlement CE/1998/2006 de la Commission du 15 décembre 2006 concernant l'application des articles 87 et 88 du traité aux aides de minimis ;

- le code général des impôts ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Yohann Bénard, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Le Prado, avocat de la société Numalliance.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article 1647 C sexies du code général des impôts, alors en vigueur : " I. - Les redevables de la taxe professionnelle (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt, pris en charge par l'Etat et égal à 1 000 euros par salarié employé depuis au moins un an au 1er janvier de l'année d'imposition dans un établissement affecté à une activité mentionnée au premier alinéa de l'article 1465 et situé dans une zone d'emploi reconnue en grande difficulté au regard des délocalisations au titre de la même année. / (...) / III. - Pour bénéficier du crédit d'impôt, les redevables indiquent chaque année sur la déclaration et dans le délai prévu au I de l'article 1477 le nombre de salariés employés depuis au moins un an au 1er janvier de l'année du dépôt de cette déclaration. (...) ". Dans sa rédaction applicable à compter du 1er janvier 2007, cet article prévoyait en son paragraphe VI que le crédit d'impôt était subordonné au respect du règlement (CE) n° 1998/2006 de la Commission du 15 décembre 2006 relatif aux aides dites " de minimis ", lequel fixait le montant maximum de ces aides à la somme de 200 000 euros sur une période de trois exercices fiscaux.

2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Numalliance a bénéficié, sur le fondement de l'article 1647 C sexies du code général des impôts, d'un crédit d'impôt de taxe professionnelle au titre des emplois localisés dans ses deux établissements de Bazeilles (Ardennes) et de Saint-Michel-sur-Meurthe (Vosges), d'un montant de 93 900 euros en 2007 et de 110 200 euros pour l'année 2008. La société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale a remis en cause le crédit d'impôt dont elle a bénéficié au titre de l'année 2008, à hauteur de 57 200 euros, correspondant au montant du crédit d'impôt accordé à raison de l'établissement de Saint-Michel-sur-Meurthe (Vosges), au motif que le total des crédits de taxe professionnelle dont elle avait bénéficié sur la période des trois derniers exercices fiscaux, égal à 204 100 euros, excédait le plafond fixé par le règlement du 15 décembre 2006. La société se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 5 août 2016 par lequel la cour administrative de Nancy a rejeté sa requête dirigée contre le jugement du 16 avril 2015 du tribunal administratif de Nancy qui avait rejeté sa demande de réduction des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle mises à sa charge au titre de l'année 2008 en conséquence de la remise en cause du montant de crédit d'impôt en litige.

3. Il résulte des dispositions de l'article 1647 C sexies du code général des impôts citées au point 1 que lorsque le montant du crédit de taxe professionnelle octroyé à un contribuable sur le fondement de ces dispositions au titre d'une année entraîne le dépassement du plafond de 200 000 euros fixé par le règlement du 15 décembre 2006 pour l'octroi des aides " de minimis ", dont le respect est apprécié en faisant la somme des crédits d'impôt dont le contribuable a bénéficié au titre de cette année et des deux années précédentes, l'administration est tenue de corriger le montant du crédit d'impôt octroyé au titre de la dernière année pour assurer le respect de ce plafond. Il ne résulte en revanche d'aucune disposition que l'administration doive, à cette fin, soit procéder à la reprise de l'intégralité du crédit d'impôt octroyé au contribuable au titre de la troisième année, soit reprendre l'intégralité du crédit d'impôt octroyé à raison d'un établissement au titre de cette même année. Il s'ensuit qu'en jugeant que la société n'était pas fondée à soutenir que la reprise du crédit d'impôt octroyé au titre de l'année 2008 devait être limitée à la seule fraction de ce crédit d'impôt excédant le plafond fixé par le règlement du 15 décembre 2006, auquel le VI de l'article 1647 C sexies du code général des impôts subordonnait l'octroi de cet avantage fiscal, la cour a commis une erreur de droit.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que la société Numalliance est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

6. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 qu'en application des dispositions de l'article 1647 C sexies du code général des impôts alors applicables, l'administration fiscale était seulement tenue de reprendre la fraction du crédit d'impôt de taxe professionnelle dont a bénéficié la société Numalliance au titre de l'exercice 2008 excédant, sur la période des trois exercices fiscaux précédents, le plafond de 200 000 euros imposé par le règlement du 15 décembre 2006, soit un montant de 4 100 euros. Par suite, la société est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la décharge, à hauteur de 53 000 euros, de la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice 2008.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme de 3 000 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 5 août 2016 de la cour administrative d'appel de Nancy et le jugement du 16 avril 2015 du tribunal administratif de Nancy sont annulés.

Article 2 : La société Numalliance est déchargée, à hauteur de 53 000 euros, de la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle mise à sa charge au titre de l'année 2008.

Article 3 : L'Etat versera à la société Numalliance une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Numalliance et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 404083
Date de la décision : 04/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES ET UNION EUROPÉENNE - RÈGLES APPLICABLES - DROIT DE LA CONCURRENCE - RÈGLES APPLICABLES AUX ÉTATS (AIDES) - CRÉDIT DE TAXE PROFESSIONNELLE AU TITRE DES SALARIÉS EMPLOYÉS DANS UN ÉTABLISSEMENT SITUÉ DANS UNE ZONE D'EMPLOI RECONNUE EN GRANDE DIFFICULTÉ AU REGARD DES DÉLOCALISATIONS (ART - 1647 C SEXIES DU CGI) - RÈGLEMENT DU 15 DÉCEMBRE 2006 RELATIF AUX AIDES DE MINIMIS FIXANT LE MONTANT MAXIMUM DE CES AIDES À 200 000 EUROS SUR UNE PÉRIODE DE TROIS EXERCICES FISCAUX - CAS DANS LEQUEL LE MONTANT OCTROYÉ DÉPASSE CE PLAFOND - OBLIGATION POUR L'ADMINISTRATION DE CORRIGER LE MONTANT OCTROYÉ AU TITRE DE LA DERNIÈRE ANNÉE - EXISTENCE - OBLIGATION DE REPRISE DE L'INTÉGRALITÉ DU MONTANT OCTROYÉ AU TITRE DE CETTE ANNÉE OU AU TITRE DE L'ÉTABLISSEMENT CONCERNÉ - ABSENCE.

15-05-06-02 Il résulte des dispositions de l'article 1647 C sexies du code général des impôts (CGI) que lorsque le montant du crédit de taxe professionnelle octroyé à un contribuable sur le fondement de ces dispositions au titre d'une année entraîne le dépassement du plafond de 200 000 euros fixé par le règlement (CE) n° 1998/2006 du 15 décembre 2006 pour l'octroi des aides de minimis, dont le respect est apprécié en faisant la somme des crédits d'impôt dont le contribuable a bénéficié au titre de cette année et des deux années précédentes, l'administration est tenue de corriger le montant du crédit d'impôt octroyé au titre de la dernière année pour assurer le respect de ce plafond. Il ne résulte en revanche d'aucune disposition que l'administration est tenue, à cette fin, soit de procéder à la reprise de l'intégralité du crédit d'impôt octroyé au contribuable au titre de la troisième année, soit de reprendre l'intégralité du crédit d'impôt octroyé à raison d'un établissement au titre de cette même année.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILÉES ET REDEVANCES - TAXE PROFESSIONNELLE - CRÉDIT DE TAXE PROFESSIONNELLE AU TITRE DES SALARIÉS EMPLOYÉS DANS UN ÉTABLISSEMENT SITUÉ DANS UNE ZONE D'EMPLOI RECONNUE EN GRANDE DIFFICULTÉ AU REGARD DES DÉLOCALISATIONS (ART - 1647 C SEXIES DU CGI) - RÈGLEMENT DU 15 DÉCEMBRE 2006 RELATIF AUX AIDES DE MINIMIS FIXANT LE MONTANT MAXIMUM DE CES AIDES À 200 000 EUROS SUR UNE PÉRIODE DE TROIS EXERCICES FISCAUX - CAS DANS LEQUEL LE MONTANT OCTROYÉ DÉPASSE CE PLAFOND - OBLIGATION POUR L'ADMINISTRATION DE CORRIGER LE MONTANT OCTROYÉ AU TITRE DE LA DERNIÈRE ANNÉE - EXISTENCE - OBLIGATION DE REPRISE DE L'INTÉGRALITÉ DU MONTANT OCTROYÉ AU TITRE DE CETTE ANNÉE OU AU TITRE DE L'ÉTABLISSEMENT CONCERNÉ - ABSENCE.

19-03-04 Il résulte des dispositions de l'article 1647 C sexies du code général des impôts (CGI) que lorsque le montant du crédit de taxe professionnelle octroyé à un contribuable sur le fondement de ces dispositions au titre d'une année entraîne le dépassement du plafond de 200 000 euros fixé par le règlement (CE) n° 1998/2006 du 15 décembre 2006 pour l'octroi des aides de minimis, dont le respect est apprécié en faisant la somme des crédits d'impôt dont le contribuable a bénéficié au titre de cette année et des deux années précédentes, l'administration est tenue de corriger le montant du crédit d'impôt octroyé au titre de la dernière année pour assurer le respect de ce plafond. Il ne résulte en revanche d'aucune disposition que l'administration est tenue, à cette fin, soit de procéder à la reprise de l'intégralité du crédit d'impôt octroyé au contribuable au titre de la troisième année, soit de reprendre l'intégralité du crédit d'impôt octroyé à raison d'un établissement au titre de cette même année.


Publications
Proposition de citation : CE, 04 jui. 2018, n° 404083
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Ophélie Champeaux
Rapporteur public ?: M. Yohann Bénard
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:404083.20180704
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