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11/04/2018 | FRANCE | N°413159

France | France, Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 11 avril 2018, 413159


Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Limoges, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 23 septembre 2016 par lequel le préfet de la Haute-Vienne l'a astreint à résider sur le territoire de la commune de Saint-Junien avec obligation de présentation quatre fois par jour à des horaires déterminés à la gendarmerie de Saint-Junien tous les jours de la semaine et de demeurer, tous les jours entre 21 heures et 7 heures, dans les locaux où il rés

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Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Limoges, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 23 septembre 2016 par lequel le préfet de la Haute-Vienne l'a astreint à résider sur le territoire de la commune de Saint-Junien avec obligation de présentation quatre fois par jour à des horaires déterminés à la gendarmerie de Saint-Junien tous les jours de la semaine et de demeurer, tous les jours entre 21 heures et 7 heures, dans les locaux où il réside. Par une ordonnance n° 1701023 du 15 juillet 2017, le juge des référés a rejeté cette demande.

Par un pourvoi enregistré le 7 août 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Gaschignard, son avocat, au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- la décision n° 415038 du 28 décembre 2017 par laquelle le Conseil d'Etat n'a pas renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. A...;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Barrois de Sarigny, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Xavier Domino, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gaschignard, avocat de M. A...;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. (...) " ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 523-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'un arrêté d'expulsion et qui justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français en établissant qu'il ne peut ni regagner son pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays peut faire l'objet d'une mesure d'assignation à résidence dans les conditions prévues à l'article L. 561-1. Les dispositions de l'article L. 624-4 sont applicables. (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces soumises au juge des référés du tribunal administratif de Limoges que M.A..., auquel la qualité de réfugié a été reconnue par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 15 février 2008, a fait l'objet, le 26 mai 2015, d'une mesure d'expulsion du territoire français décidée par le préfet du Bas-Rhin sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au motif que sa présence en France constituait une menace grave pour l'ordre public ; que le statut de réfugié lui a été retiré par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 23 juin 2016 ; que, par arrêté du préfet des Deux-Sèvres du 26 mai 2015, puis du 29 octobre suivant, M. A...a été assigné à résidence sur le territoire des communes de Parthenay puis de Sauzé-Vaussais ; que, par un arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 23 septembre 2016, M. A...a été assigné à résidence à Saint-Junien ; que M. A...se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 15 juillet 2017 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande, présentée sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 23 septembre 2016 ;

4. Considérant que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Limoges a rejeté comme irrecevable la demande de M. A...en tant qu'elle tendait à la suspension de l'exécution de la décision d'assignation à résidence du 23 septembre 2016, au motif que le prononcé d'une telle mesure aurait nécessairement pour effet de remettre en cause le caractère exécutoire de la mesure d'expulsion du territoire français du 26 mai 2015 ; que, toutefois, la suspension, par le juge des référés statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de l'exécution d'une décision d'assignation à résidence prise sur le fondement de l'article L. 523-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est, par elle-même, sans effet sur le caractère exécutoire de la décision d'expulsion qui a conduit au prononcé de cette assignation ; que, par suite, en rejetant la demande dont il était saisi au motif qu'il ne pouvait la satisfaire sans excéder ses pouvoirs, le juge des référés du tribunal administratif de Limoges a commis une erreur de droit qui emporte l'annulation de l'ordonnance attaquée dans son ensemble ;

5. Considérant que M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Gaschignard, avocat de M.A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à cette société ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Limoges du 15 juillet 2017 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le juge des référés du tribunal administratif de Limoges.

Article 3 : L'Etat versera à la SCP Gaschignard, avocat de M.A..., une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 2ème - 7ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 413159
Date de la décision : 11/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 11 avr. 2018, n° 413159
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Cécile Barrois de Sarigny
Rapporteur public ?: M. Xavier Domino
Avocat(s) : SCP GASCHIGNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:413159.20180411
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