Vu la procédure suivante :
Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 7 novembre 2016, 7 février et 6 octobre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF) demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le décret n° 2016-901 du 1er juillet 2016 portant création du Fonds national des aides à la pierre et les décisions implicites de rejet des recours gracieux formés les 6 juillet et 7 novembre 2016 contre ce décret ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 ;
- le décret n° 2016-901 du 1er juillet 2016 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Guillaume Leforestier, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité.
1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa du III de l'article L. 435-1 du code de la construction et de l'habitation, le Fonds national des aides à la pierre (FNAP) " est un établissement public à caractère administratif créé par décret en Conseil d'Etat " ; qu'en application de ces dispositions législatives, le décret du 1er juillet 2016 a introduit au titre III du livre IV du code de la construction et de l'habitation un chapitre V relatif au Fonds national des aides à la pierre ; que l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité demande l'annulation pour excès de pouvoir de ce décret et des décisions implicites par lesquelles le Premier ministre a rejeté les recours gracieux qu'elle a formés à son encontre les 6 juillet et 7 novembre 2016 ;
Sur la légalité externe du décret :
2. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales : " Le Conseil national d'évaluation des normes est consulté par le Gouvernement sur l'impact technique et financier, pour les collectivités territoriales et leurs établissements publics, des projets de textes réglementaires créant ou modifiant des normes qui leur sont applicables... " ;
3. Considérant que le décret attaqué, qui détermine la composition, les compétences, les règles de fonctionnement du conseil d'administration du FNAP et les attributions de son président, précise les règles budgétaires et comptables qui lui sont applicables et prévoit que le ministre chargé du logement met à sa disposition les moyens nécessaires à son fonctionnement, ne crée ni ne modifie aucune norme applicable aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics ; que l'association requérante n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que son édiction aurait dû être précédée de la consultation du Conseil national d'évaluation des normes ;
Sur la légalité interne :
4. Considérant qu'aux termes du second alinéa du III de l'article L. 435-1 du code de la construction et de l'habitation : " Le conseil d'administration du fonds est composé, à parité, de représentants de l'Etat, d'une part, et de représentants des organismes d'habitation à loyer modéré, des sociétés d'économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux et des organismes agréés en application de l'article L. 365-2, d'autre part. Il est également composé de représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements et de membres de l'Assemblée nationale et du Sénat " ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 435-2 du code de la construction et de l'habitation, tel qu'il résulte de l'article 1er du décret attaqué : " L'établissement est administré par un conseil d'administration composé de quinze membres : / (...) 3° Cinq représentants du Parlement et des collectivités territoriales et de leurs groupements : / (...) c) Un représentant de l'Assemblée des communautés de France, désigné par cette dernière ; / d) Un représentant de l'Assemblée des départements de France, désigné par cette dernière ; / e) Un représentant de France urbaine, désigné par cette dernière " ;
6. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de la construction et de l'habitation que les groupements de collectivités territoriales sont représentés au sein du conseil d'administration du FNAP ; qu'en vertu des dispositions de l'article L. 5111-1 du code général des collectivités territoriales, la catégorie des groupements de collectivités territoriales comprend notamment les établissements publics de coopération intercommunale ; que, dès lors, contrairement à ce qui est soutenu, l'article R. 435-2 précité du code de la construction et de l'habitation n'est pas entaché d'illégalité en tant qu'il attribue un siège au sein du conseil d'administration à l'Assemblée des communautés de France, dont l'objet statutaire est de promouvoir et de représenter les établissements publics de coopération intercommunale ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'association France urbaine est notamment composée d'un représentant des villes ; que, contrairement à ce que soutient l'association requérante, l'article L. 435-1 du code de la construction et de l'habitation n'impose pas une représentation au sein du conseil d'administration du FNAP de l'ensemble des communes ;
8. Considérant, enfin, qu'en vertu des dispositions de l'article L. 301-3 du code de la construction et de l'habitation la programmation et la gestion des aides à la pierre est déléguée aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et aux départements ; qu'il ressort par ailleurs des pièces du dossier que ces aides sont prioritairement orientées vers les territoires les plus densément peuplés, où la pression foncière favorise l'augmentation des prix ; que, dans ces conditions, l'auteur du décret attaqué n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en confiant la représentation des collectivités territoriales et de leurs groupements au conseil d'administration du FNAP à trois associations ayant pour objet de représenter, de manière spécifique, respectivement les établissements publics de coopération intercommunale, les départements et les territoires urbains, sans y faire participer l'association requérante ; que ce faisant le principe d'égalité n'a pas davantage été méconnu ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation présentées par l'association requérante doivent être rejetées ; qu'il en va de même de ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité et au ministre de la cohésion des territoires.
Copie en sera adressée au Premier ministre.