La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/12/2017 | FRANCE | N°402557

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre jugeant seule, 22 décembre 2017, 402557


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 19 août et 18 novembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat national des téléphériques de France (SNTF) - Domaines skiables de France, la Fédération autonome générale de l'industrie hôtelière touristique (FAGIHT), la Fédération professionnelle des entreprises du sport et des loisirs (FPS) et le Syndicat national des résidences de tourisme et des apparthôtels (SNRT) demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'i

nstruction DGT/DSS/SAFSL/2016/178 du 20 juin 2016 relative à la mise en place du ...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 19 août et 18 novembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat national des téléphériques de France (SNTF) - Domaines skiables de France, la Fédération autonome générale de l'industrie hôtelière touristique (FAGIHT), la Fédération professionnelle des entreprises du sport et des loisirs (FPS) et le Syndicat national des résidences de tourisme et des apparthôtels (SNRT) demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'instruction DGT/DSS/SAFSL/2016/178 du 20 juin 2016 relative à la mise en place du compte personnel de prévention de la pénibilité ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Yannick Faure, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Charles Touboul, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat du Syndicat national des téléphériques de France - Domaines skiables de France.

Considérant ce qui suit :

1. Par une instruction du 20 juin 2016, le ministre des affaires sociales et de la santé, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt ont fait connaître aux directeurs des caisses nationales de sécurité sociale intéressées et aux directeurs régionaux et directeurs des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, par des dispositions impératives à caractère général, l'interprétation qu'ils prescrivaient des dispositions relatives au compte personnel de prévention de la pénibilité, en vue de sa mise en oeuvre. Le Syndicat national des téléphériques de France (SNTF) - Domaines skiables de France, la Fédération autonome générale de l'industrie hôtelière touristique (FAGIHT), la Fédération professionnelle des entreprises du sport et des loisirs (FPS) et le Syndicat national des résidences de tourisme et des apparthôtels (SNRT) demandent l'annulation pour excès de pouvoir de cette instruction.

Sur la légalité de l'instruction attaquée :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le moyen tiré de ce que l'exemplaire original de l'instruction attaquée ne serait pas revêtu de la signature manuscrite des trois ministres dont elle émane manque en fait.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 4162-2 du code du travail, dans sa rédaction applicable : " Le compte personnel de prévention de la pénibilité est ouvert dès lors qu'un salarié a acquis des droits dans les conditions définies au présent chapitre. (...) / L'exposition d'un travailleur, après application des mesures de protection collective et individuelle, à un ou plusieurs des facteurs de risques professionnels mentionnés à l'article L. 4161-1 au-delà des seuils d'exposition définis par décret, consignée dans la déclaration prévue au même article, ouvre droit à l'acquisition de points sur le compte personnel de prévention de la pénibilité (... ) ". Aux termes de l'article L. 4162-3 du même code, dans sa rédaction applicable : " Les points sont attribués au vu des expositions du salarié déclarées par l'employeur, sur la base de la déclaration mentionnée à l'article L. 4161-1 du présent code (...) ". Aux termes du I de l'article L. 4161-1 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " L'employeur déclare de façon dématérialisée aux caisses mentionnées au II les facteurs de risques professionnels liés à des contraintes physiques marquées, à un environnement physique agressif ou à certains rythmes de travail, susceptibles de laisser des traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé auxquels les travailleurs susceptibles d'acquérir des droits au titre d'un compte personnel de prévention de la pénibilité, dans les conditions fixées au chapitre II du présent titre, sont exposés au-delà de certains seuils, appréciés après application des mesures de protection collective et individuelle ". Aux termes de l'article D. 4161-1 du même code, l'exposition des travailleurs à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels est évaluée " au regard des conditions habituelles de travail caractérisant le poste occupé, appréciées en moyenne sur l'année, notamment à partir des données collectives mentionnées au 1° de l'article R. 4121-1-1 ". Enfin, il résulte de l'article D. 4161-2 du même code que les seuils de neuf des dix facteurs de risques professionnels retenus sont fixés en nombre de jours ou de nuits, d'heures ou d'actions mesurés annuellement.

4. Dans ce cadre, s'agissant, d'une part, des travailleurs dont le contrat s'étend sur toute l'année civile, le I de l'article R. 4162-1 du même code dispose que : " Au terme de chaque année civile et au plus tard au titre de la paie du mois de décembre, l'employeur déclare, (...) pour les travailleurs titulaires d'un contrat de travail qui demeure en cours à la fin de l'année civile, le ou les facteurs de risques professionnels définis à l'article D. 4161-2, auxquels ils ont été exposés au-delà des seuils fixés au même article au cours de l'année civile considérée ". Aux termes du I de l'article R. 4162-2 du même code : " Pour les salariés titulaires d'un contrat de travail dont la durée est supérieure ou égale à l'année civile, la déclaration prévue aux I de l'article R. 4162-1 donne lieu à l'inscription (...) sur son compte personnel de prévention de la pénibilité de : / 1° quatre points lorsqu'il est exposé à un seul facteur de risque professionnel ; / 2° huit points lorsqu'il est exposé à plusieurs facteurs de risques professionnels ". Il résulte de ces dispositions ainsi que de celles citées au point précédent que l'exposition des travailleurs aux facteurs de risques professionnels au-delà des seuils donnant lieu à abondement du compte personnel de prévention de la pénibilité doit être appréciée par l'employeur en moyenne annuelle au regard des conditions habituelles de travail caractérisant l'emploi occupé.

5. S'agissant, d'autre part, des travailleurs dont le contrat débute ou s'achève en cours d'année, aux termes du II de l'article R. 4162-1 du code du travail : " Pour les travailleurs titulaires d'un contrat de travail d'une durée supérieure ou égale à un mois qui s'achève au cours de l'année civile, l'employeur déclare dans la déclaration mentionnée au I de cet article et au plus tard lors de la paie effectuée au titre de la fin de ce contrat de travail le ou les facteurs de risques professionnels définis à l'article D. 4161-2 auxquels ils ont été exposés ". Aux termes du II de l'article R. 4162-2 du même code : " Pour les salariés titulaires d'un contrat de travail dont la durée, supérieure ou égale à un mois, débute ou s'achève en cours d'année civile, la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés agrège l'ensemble des déclarations prévues aux I et II de l'article R. 4162-1 transmises par le ou les employeurs et établit, pour chaque facteur de risque professionnel déclaré, sa durée totale d'exposition en mois au titre de l'année civile. / Chaque période d'exposition de trois mois à un facteur de risque professionnel donne lieu à l'attribution d'un point. Chaque période d'exposition de trois mois à plusieurs facteurs de risques professionnels donne lieu à l'attribution de deux points ". Il résulte de ces dispositions et de celles citées au point 3 que, pour les salariés employés au cours d'une période inférieure à l'année civile, l'employeur doit, pour apprécier leur exposition aux facteurs de risques professionnels au-delà des seuils donnant lieu à abondement du compte personnel de prévention de la pénibilité, évaluer ce que cette exposition aurait été si le travailleur avait occupé cet emploi sur une période d'un an. Lorsque les seuils fixés à l'article D. 4161-2 auraient été dépassés sur l'emploi occupé annuellement, l'employeur déclare cette exposition.

6. Dans ces conditions, et dès lors que, comme il a été dit au point précédent, il résulte des dispositions précitées, en particulier de celles de l'article D. 4161-1 du code du travail, que l'employeur doit évaluer ce que l'exposition des salariés aurait été s'ils avaient occupé leur emploi sur une période d'un an, l'instruction attaquée n'a pas méconnu le sens et la portée des textes interprétés en prévoyant que, pour les travailleurs affectés à des postes n'ayant pas un caractère permanent, tels les travailleurs saisonniers, l'employeur apprécie l'exposition en extrapolant sur une période de douze mois les conditions de pénibilité constatées au cours du contrat, et en les rapportant aux seuils annuels. En outre, dès lors que l'instruction se borne ainsi à interpréter les termes de la loi et du règlement, sans fixer de règle nouvelle, les organisations requérantes ne sauraient utilement soutenir qu'elle est, sur ce point, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ou qu'elle méconnaît le principe d'égalité.

7. Il résulte en dernier lieu de ce qui a été dit au point précédent que, contrairement à ce qui est soutenu, les ministres auteurs de l'instruction attaquée, à qui il était loisible d'interpréter à l'attention des directeurs des caisses nationales de sécurité sociale et des directeurs régionaux et directeurs des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi les dispositions législatives et réglementaires du code du travail relatives au compte personnel de prévention de la pénibilité que ces derniers avaient pour mission de mettre en oeuvre, n'ont, par les dispositions critiquées de cette instruction, pas fixé de règle nouvelle entachée d'incompétence.

8. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'instruction du 20 juin 2016 relative à la mise en place du compte personnel de prévention de la pénibilité.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête du Syndicat national des téléphériques de France (SNTF) - Domaines skiables de France, de la Fédération autonome générale de l'industrie hôtelière touristique (FAGIHT), de la Fédération professionnelle des entreprises du sport et des loisirs (FPS) et du Syndicat national des résidences de tourisme et des apparthôtels (SNRT) est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée, pour l'ensemble des requérants, au Syndicat national des téléphériques de France (SNTF) - Domaines skiables de France, premier dénommé, à la ministre des solidarités et de la santé, à la ministre du travail et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.


Synthèse
Formation : 1ère chambre jugeant seule
Numéro d'arrêt : 402557
Date de la décision : 22/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 22 déc. 2017, n° 402557
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Yannick Faure
Rapporteur public ?: M. Charles Touboul
Avocat(s) : SCP GATINEAU, FATTACCINI

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:402557.20171222
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award