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15/12/2017 | FRANCE | N°409732

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 15 décembre 2017, 409732


Vu la procédure suivante :

M. et Mme D...et Brigitte C...ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Grenoble de suspendre, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de l'arrêté du 12 février 2016 par lequel le maire d'Allinges (Haute-Savoie) a délivré à M. A...B...le permis de construire une maison d'habitation. Par une ordonnance n° 1701223 du 28 mars 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complém

entaire, enregistrés les 12 et 27 avril 2017 au secrétariat du contentieux du ...

Vu la procédure suivante :

M. et Mme D...et Brigitte C...ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Grenoble de suspendre, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de l'arrêté du 12 février 2016 par lequel le maire d'Allinges (Haute-Savoie) a délivré à M. A...B...le permis de construire une maison d'habitation. Par une ordonnance n° 1701223 du 28 mars 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 12 et 27 avril 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme C...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à leur demande de suspension ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Allinges et de M. B...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de M. et MmeC..., et à la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat de la commune d'Allinges.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".

2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, par un arrêté du 12 février 2016, le maire d'Allinges a autorisé M. B...à construire une maison d'habitation sur la parcelle cadastrée section D n° 243 dont il est propriétaire. M. et Mme C...se pourvoient en cassation contre l'ordonnance par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande de suspension de l'exécution de cette décision, présentée sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative.

3. Un requérant demandant la suspension de l'exécution d'un permis de construire ne saurait utilement se borner à soutenir qu'il a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal, quelle que soit la nature de l'illégalité dont il se prévaut, ni qu'il est illégal par voie de conséquence de l'annulation du document sur le fondement duquel il a été accordé. En revanche, il peut utilement soutenir que le permis de construire litigieux a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal - sous réserve des dispositions de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme - ou annulé, à la condition de faire en outre valoir que ce permis méconnaît les dispositions du document d'urbanisme immédiatement antérieur remises en vigueur par l'effet de la déclaration d'illégalité ou de l'annulation pour excès de pouvoir, en application de l'article L. 600-12 du même code.

4. Pour juger que n'était pas de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité du permis de construire litigieux le moyen tiré de l'illégalité de la délibération du conseil municipal du 7 octobre 2014 approuvant le plan local d'urbanisme sous l'empire duquel il avait été délivré, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble s'est fondé sur ce que cette délibération avait été annulée par un jugement de ce tribunal du 16 juin 2016. Toutefois, d'une part, l'annulation de cette délibération avait pour effet de remettre en vigueur le plan d'occupation des sols dans sa version immédiatement antérieure, comme l'aurait fait la déclaration de son illégalité. D'autre part, il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que les requérants ne se bornaient pas à soutenir que le permis de construire litigieux avait été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal mais faisaient en outre valoir que ce permis méconnaissait les dispositions du plan d'occupation des sols ainsi remis en vigueur. Par suite, en statuant ainsi qu'il l'a fait, le juge des référés a commis une erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, M. et Mme C...sont fondés à demander l'annulation de l'ordonnance qu'ils attaquent.

6. Il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée par M. et MmeC....

7. Aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire (...) court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 " et aux termes de l'article R. 424-15 de ce code : " Mention du permis explicite ou tacite (...) doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté ou dès la date à laquelle le permis tacite (...) est acquis et pendant toute la durée du chantier. (...) / (...) / Un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme règle le contenu et les formes de l'affichage ".

8. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés, notamment des photographies et des témoignages concordants qui sont produits par M. B...et ne sont démentis par aucune autre pièce, que, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme C...sans assortir leur allégation d'aucune précision, le permis de construire délivré le 12 février 2016 à l'intéressé a été régulièrement affichée en bordure de propriété, en un point où il était lisible depuis la voie publique et de façon continue pendant une durée d'au moins deux mois courant à compter du 3 mars 2016 au plus tard. Il en résulte qu'en l'état de l'instruction, le délai de recours de deux mois mentionné à l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme doit être regardé comme ayant déjà expiré à la date du 28 février 2017 à laquelle la demande de M. et Mme C...tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de ce permis de construire a été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Grenoble. Dès lors, M. B...et la commune d'Allinges sont fondés à soutenir que cette demande apparaît tardive et, par suite, irrecevable.

9. Il résulte de ce qui précède que la demande de suspension de l'exécution du permis de construire formée par M. et Mme C...devant le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble doit être rejetée.

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la commune d'Allinges, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme C...le versement à la commune d'Allinges, d'une part, et à M.B..., d'autre part, d'une somme en application des mêmes dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Grenoble du 28 mars 2017 est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. et Mme C...devant le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. et MmeC..., par M. B...et par la commune d'Allinges au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme D...et BrigitteC..., à M. A... B...et à la commune d'Allinges.


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 409732
Date de la décision : 15/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 15 déc. 2017, n° 409732
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir
Rapporteur public ?: M. Rémi Decout-Paolini
Avocat(s) : SCP COUTARD, MUNIER-APAIRE ; SCP GARREAU, BAUER-VIOLAS, FESCHOTTE-DESBOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 09/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:409732.20171215
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