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04/12/2017 | FRANCE | N°412237

France | France, Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 04 décembre 2017, 412237


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 7 juillet 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...A...demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 2 mars 2017 accordant son extradition aux autorités turques.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 ;

- le code de procédure pénale ;

- le code des relations entre le publi

c et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique ...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 7 juillet 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...A...demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 2 mars 2017 accordant son extradition aux autorités turques.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 ;

- le code de procédure pénale ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Louise Bréhier, auditrice,

- les conclusions de M. Guillaume Odinet, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Odent, Poulet, avocat de M. A...;

1. Considérant que, par le décret attaqué, le Premier ministre a accordé aux autorités turques l'extradition de M. B...A..., de nationalité turque, pour l'exécution d'une peine d'emprisonnement de trois ans et trois mois, prononcée par un jugement du 26 mars 2009, devenu définitif, de la cour d'assises d'Aksaray pour des faits de blessures volontaires et d'achat, port ou possession d'armes à feu commis à l'occasion d'une altercation privée ; que l'intéressé demande l'annulation pour excès de pouvoir de ce décret ;

2. Considérant, en premier lieu, que le décret attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'il satisfait ainsi à l'exigence de motivation prévue à l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du 2 de l'article 12 de la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 : " Il sera produit à l'appui de la requête : / a) L'original ou l'expédition authentique soit d'une décision de condamnation exécutoire, soit d'un mandat d'arrêt ou de tout autre acte ayant la même force, délivré dans les formes prescrites par la loi de la Partie requérante / b) Un exposé des faits pour lesquels l'extradition est demandée. Le temps et le lieu de leur perpétration, leur qualification légale et les références aux dispositions légales qui leur sont applicables seront indiqués le plus exactement possible ; et / c) Une copie des dispositions légales applicables ou, si cela n'est pas possible, une déclaration sur le droit applicable, ainsi que le signalement aussi précis que possible de l'individu réclamé et tous autres renseignements de nature à déterminer son identité et sa nationalité " ; qu'il ressort des pièces du dossier que la demande d'extradition était accompagnée des pièces requises par les stipulations du 2 de l'article 12 de la convention européenne d'extradition ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que le décret attaqué aurait fait droit à une demande d'extradition sans disposer des éléments que l'Etat requérant devait présenter aux autorités françaises en vertu des stipulations de l'article 12 de la convention européenne d'extradition doit être écarté ;

4. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; qu'aux termes de l'article 15 de cette convention : " 1. En cas de guerre ou en cas d'autre danger public menaçant la vie de la nation, toute Haute Partie contractante peut prendre des mesures dérogeant aux obligations prévues par la présente Convention, dans la stricte mesure où la situation l'exige et à la condition que ces mesures ne soient pas en contradiction avec les autres obligations découlant du droit international./ 2. La disposition précédente n'autorise aucune dérogation à l'article 2, sauf pour le cas de décès résultant d'actes licites de guerre, et aux articles 3, 4 (paragraphe 1) et 7. (...) " ; que, d'une part, si le requérant soutient qu'il risque d'être soumis à des traitements prohibés par les stipulations précitées de l'article 3 de la convention au motif que les autorités turques ont notifié leur intention d'exercer le droit de dérogation prévu à l'article 15 de cette même convention, il ressort des termes mêmes de cet article 15 qu'il n'autorise aucune dérogation à l'article 3 ; que, d'autre part, si M. A...soutient également qu'en cas d'exécution du décret attaqué, il risque d'être exposé à des traitements prohibés par ces dispositions de l'article 3, compte tenu de la situation dans les prisons turques, il n'apporte toutefois aucun élément circonstancié de nature à établir la réalité de tels risques pour ce qui le concerne ; qu'au demeurant, il ressort des pièces du dossier que les autorités turques se sont notamment engagées à ce que le requérant ne soit pas exposé à des traitements prohibés par les dispositions de l'article 3 de cette convention ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret accordant son extradition aux autorités turques ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et à la garde des sceaux, ministre de la justice.

Copie en sera adressée au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 2ème - 7ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 412237
Date de la décision : 04/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 04 déc. 2017, n° 412237
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Louise Bréhier
Rapporteur public ?: M. Guillaume Odinet
Avocat(s) : SCP ODENT, POULET

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:412237.20171204
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