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29/11/2017 | FRANCE | N°395099

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 29 novembre 2017, 395099


Vu la procédure suivante :

M. et MmeB... A... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 à 2009 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement nos 1202706, 1205010 du 19 novembre 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes.

Par un arrêt n° 14NT03363 du 8 octobre 2015, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par M. et Mme A...contre ce jugement.

Par un pourvoi s

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Vu la procédure suivante :

M. et MmeB... A... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 à 2009 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement nos 1202706, 1205010 du 19 novembre 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes.

Par un arrêt n° 14NT03363 du 8 octobre 2015, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par M. et Mme A...contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 8 décembre 2015 et 8 mars 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat,

M. et Mme A... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de L'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Simon Chassard, auditeur,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat de M. et Mme A...;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et MmeA..., associés de plusieurs sociétés en participation (SEP) gérées par la SARL Dom Tom Défiscalisation (DTD), ont imputé sur le montant de leur impôt sur le revenu au titre des années 2007, 2008 et 2009, sur le fondement des dispositions de l'article

199 undecies B du code général des impôts, une réduction d'impôt du fait d'investissements réalisés à la Martinique par l'intermédiaire de ces SEP, consistant en l'acquisition de panneaux photovoltaïques en vue de leur exploitation par des sociétés situées dans ce département. A la suite d'un contrôle sur pièces, l'administration, constatant l'absence de réalisation de ces investissements, a remis en cause ces réductions d'impôt et a notifié à M. et Mme A...des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2007 à 2009, assorties de pénalités. M. et Mme A...se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 8 octobre 2015 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté leur appel contre le jugement du 19 novembre 2014 du tribunal administratif de Rennes rejetant leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007, 2008 et 2009.

Sur la régularité de l'arrêt attaqué :

2. Les requérants soutiennent que la cour a omis de répondre au moyen tiré de ce que le tribunal administratif se serait abstenu de se prononcer sur le moyen tiré de ce que la preuve de l'absence d'effectivité et de productivité des investissements ouvrant droit à la réduction d'impôt incombait à l'administration fiscale. Il ressort toutefois des termes de l'arrêt attaqué que la cour, qui a relevé que le tribunal s'était prononcé sur la dévolution de la charge de la preuve, a suffisamment motivé son arrêt sur ce point.

Sur le bien fondé de l'arrêt attaqué :

En ce qui concerne l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2007 :

3. Aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. ". Il résulte de ces dispositions que lorsque le contribuable en fait la demande à l'administration, celle-ci est tenue, lorsqu'elle en dispose, de lui communiquer avant la mise en recouvrement des impositions les documents ou copies de documents contenant les renseignements qu'elle a obtenus auprès de tiers et qui lui sont opposés. Il en va ainsi, sauf dans le cas d'informations librement accessibles au public, alors même que le contribuable a pu avoir connaissance de ces renseignements ou de certains d'entre eux, afin notamment de lui permettre d'en vérifier, et le cas échéant d'en discuter, l'authenticité et la teneur.

4. Il ressort des termes de l'arrêt attaqué qu'après avoir relevé que l'administration avait notamment remis en cause la date à laquelle avaient été établis des procès-verbaux de mise à disposition de matériel photovoltaïque au 31 décembre 2007, la cour a jugé que l'administration n'était pas tenue de communiquer aux contribuables les documents contenant les renseignements lui ayant permis de fonder ainsi les redressements, au motif " que de tels renseignements, qui, au demeurant, ont été produits en appel par M. et MmeA... " étaient " nécessairement connus des contribuables et détenus par eux ". En statuant ainsi et en regardant la procédure comme régulière, la cour a commis une erreur de droit dès lors que l'administration ne pouvait s'abstenir de répondre, avant la mise en recouvrement des impositions, à une demande relative à des documents obtenus de tiers, mentionnés dans la proposition de rectification et qui, selon la cour, avaient fondé les redressements, alors même que les contribuables auraient pu avoir, par ailleurs, connaissance des renseignements contenus dans ces documents. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de leur pourvoi, les requérants sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent en tant qu'il s'est prononcé sur leur demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2007.

En ce qui concerne l'impôt sur le revenu au titre des années 2008 et 2009 :

5. En premier lieu, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ni dénaturé les pièces du dossier en jugeant que l'administration fiscale n'était pas tenue de procéder à la vérification de comptabilité des SEP dont les requérants étaient associés préalablement au contrôle sur pièces dont ils ont fait l'objet, dès lors qu'elle avait relevé que les impositions litigieuses ne procédaient pas du rehaussement du résultat de ces sociétés, taxable entre les mains de leurs associés au prorata de leurs parts en application des dispositions de l'article 8 du code général des impôts relatif au régime d'imposition des sociétés de personnes, mais trouvaient exclusivement leur origine dans la remise en cause de la réduction d'impôt sur le revenu prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts.

6. En deuxième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...) dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34. ". Aux termes du vingtième alinéa du même article : " La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé. ". Aux termes de l'article 95 Q de l'annexe II à ce code dans sa rédaction applicable à l'année en litige : " La réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée par l'entreprise ou lui est livrée ou est mise à sa disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail (...). ".

7. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le fait générateur de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts est la date de la création de l'immobilisation au titre de laquelle l'investissement productif a été réalisé ou de sa livraison effective dans le département d'outre-mer. Dans ce dernier cas, la date à retenir est celle à laquelle l'entreprise, disposant matériellement de l'investissement productif, peut commencer son exploitation effective et, dès lors, en retirer des revenus. Par suite, s'agissant de l'acquisition de centrales photovoltaïques en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie électrique, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la date à retenir était celle du raccordement des installations au réseau public d'électricité, dès lors que les centrales photovoltaïques, dont la production d'électricité a vocation à être vendue par les sociétés exploitantes, ne peuvent être effectivement exploitées et par suite productives de revenus qu'à compter de cette date.

8. En troisième lieu, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant qu'il appartient au juge de l'impôt d'examiner, au terme de l'instruction dont le litige qui lui est soumis a fait l'objet, si un contribuable remplit ou non les conditions lui permettant de se prévaloir de l'avantage fiscal institué par l'article 199 undecies B du code général des impôts. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour n'a pas exigé des requérants des éléments de preuve qu'ils n'étaient pas en mesure de détenir mais a confronté les renseignements obtenus par l'administration dans le cadre de son droit de communication aux arguments contraires développés par les requérants. Compte tenu de l'ensemble des éléments ainsi relevés, elle a pu juger, sans méconnaître les règles de dévolution de la charge de la preuve, que les investissements revendiqués par les requérants au titre des années litigieuses ne correspondaient pas à du matériel photovoltaïque effectivement livré et susceptible de faire l'objet d'une exploitation effective.

9. Il résulte de ce qui a été dit aux points 5 à 8 ci-dessus que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent en tant qu'il s'est prononcé sur leur demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2008 et 2009.

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 8 octobre 2015 de la cour administrative d'appel de Nantes est annulé en tant qu'il s'est prononcé sur la demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2007.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, devant la cour administrative d'appel de Nantes.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme A...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi de M. et Mme A...est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme B... A...et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 395099
Date de la décision : 29/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 29 nov. 2017, n° 395099
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Simon Chassard
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SCP DIDIER, PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 29/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:395099.20171129
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