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26/10/2017 | FRANCE | N°406189

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 26 octobre 2017, 406189


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 21 décembre 2016, 14 février 2017 et 7 septembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la collectivité territoriale de Martinique et M. B...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2016-1454 du 28 octobre 2016 portant adaptation aux départements d'outre-mer et à des collectivités d'outre-mer des dispositions relatives à l'allocation personnalisée d'autonomie et à la conférence des fina

nceurs de la prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées ;

2°) de met...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 21 décembre 2016, 14 février 2017 et 7 septembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la collectivité territoriale de Martinique et M. B...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2016-1454 du 28 octobre 2016 portant adaptation aux départements d'outre-mer et à des collectivités d'outre-mer des dispositions relatives à l'allocation personnalisée d'autonomie et à la conférence des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 2011-884 du 27 juillet 2011 ;

- la loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 ;

- le décret n° 2016-212 du 26 février 2016 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Dorothée Pradines, auditeur,

- les conclusions de M. Charles Touboul, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Odent, Poulet, avocat de la collectivité territoriale de Martinique et de M.A....

Considérant ce qui suit :

Sur la légalité externe du décret attaqué :

1. Aux termes de l'article L. 7252-2 du code général des collectivités territoriales : " L'assemblée de Martinique est consultée sur les projets de loi, d'ordonnance ou de décret comportant des dispositions d'adaptation du régime législatif et de l'organisation administrative de la collectivité territoriale de Martinique. / Son avis est réputé acquis en l'absence de notification au représentant de l'Etat dans la collectivité territoriale d'un avis exprès dans un délai d'un mois à compter de la saisine ; ce délai est réduit à quinze jours en cas d'urgence sur demande du représentant de l'Etat ".

2. Il résulte de ces dispositions, figurant dans un titre consacré aux " Attributions de la collectivités territoriale de Martinique ", que le législateur, qui n'a prévu aucune disposition similaire au profit du conseil exécutif de Martinique, a imposé au Gouvernement, sur les projets de textes comportant des adaptations du régime législatif de la collectivité territoriale de Martinique, la seule consultation de l'assemblée de Martinique. Par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué a été adopté au terme d'une procédure irrégulière, faute d'avoir été précédé de la consultation, outre de l'assemblée de Martinique, du conseil exécutif de Martinique, ne peut qu'être écarté.

Sur la légalité interne du décret attaqué :

3. Les requérants critiquent le décret dont ils demandent l'annulation en tant que, d'une part, le b) du 1° de son article 1er complète l'article R. 521-1 du code de l'action sociale et des familles pour prévoir que : " Pour l'application du présent code (...) en Martinique : (...) 2° La référence au conseil départemental est remplacée par la référence à l'assemblée (...) de Martinique " et, d'autre part, le 1° du II de son article 5 modifie l'article 5 et les tableaux figurant en annexe du décret du 26 février 2016 relatif à certains concours versés aux départements par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie pour prévoir que, pour leur application en Martinique, les mots : " des conseils départementaux " sont remplacés par les mots : " des assemblées ".

4. Aux termes de l'article L. 7221-1 du code général des collectivités territoriales : " Les organes de la collectivité territoriale de Martinique comprennent l'assemblée de Martinique et son président, le conseil exécutif de Martinique et son président, assistés du conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l'éducation de Martinique ". D'une part, aux termes de l'article L. 7251-1 de ce code : " L'assemblée de Martinique règle par ses délibérations les affaires de la collectivité territoriale de Martinique. (...) ". Aux termes de l'article L. 7261-1 de ce code : " L'assemblée de Martinique exerce ses compétences dans les conditions prévues au titre Ier du livre II de la troisième partie [relatif aux compétences du conseil départemental] et au titre II du livre II de la quatrième partie [relatif aux compétences du conseil régional], dans la mesure où elles ne sont pas contraires aux dispositions de la présente partie. Elle contrôle le conseil exécutif dans les conditions prévues au chapitre V du titre II du présent livre ". D'autre part, il résulte des articles L. 7224-1 et L. 7224-2 du même code que le conseil exécutif de Martinique est composé d'un président assisté de huit conseillers exécutifs, élus par l'assemblée de Martinique parmi ses membres. Aux termes de l'article L. 7224-8 de ce code : " Le conseil exécutif dirige l'action de la collectivité territoriale de Martinique dans les conditions et limites fixées par le présent titre ". Aux termes de l'article L. 7224-9 de ce code : " Le président du conseil exécutif prépare et exécute les délibérations de l'assemblée de Martinique ". Enfin, aux termes de l'article L. 7224-14 de ce code : " Le président du conseil exécutif peut, par arrêté délibéré au sein du conseil exécutif, prendre toute mesure : / 1° Tendant à préciser les modalités d'application des délibérations de l'assemblée de Martinique ; / 2° Fixant les règles d'organisation et de fonctionnement des services de la collectivité territoriale de Martinique ".

5. Le II de l'article 16 de la loi du 27 juillet 2011 relative aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique tire les conséquences de ces dispositions, dont il résulte que, si des arrêtés délibérés au sein du conseil exécutif peuvent préciser les modalités d'application des délibérations de l'assemblée de Martinique, c'est à cette dernière qu'il revient d'exercer les compétences dévolues aux conseils départementaux, en prévoyant que, pour l'application en Martinique des dispositions législatives autres que celles modifiées par cette loi : " La référence au conseil départemental ou au conseil régional est remplacée par la référence à l'assemblée de Martinique ".

6. Par suite, en remplaçant, dans le code de l'action sociale et des familles et dans le décret du 26 février 2016 relatif à certains concours versés aux départements par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, pris pour l'application de la loi du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement, la référence au conseil départemental par la référence à l'assemblée de Martinique, le décret attaqué s'est borné à prévoir, pour la partie réglementaire de ce code et les autres dispositions réglementaires qu'il mentionne, une règle identique à celle qui résulte de l'article 16 de la loi du 27 juillet 2011 pour la partie législative du même code, conforme à la répartition des compétences entre l'assemblée de Martinique et le conseil exécutif de Martinique. Les requérants ne sont ainsi pas fondés à soutenir que ce décret aurait méconnu la répartition des compétences instaurée par le législateur.

7. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation du décret qu'ils attaquent.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de la collectivité territoriale de Martinique et de M. A...est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la collectivité territoriale de Martinique, à M. B..., au Premier ministre et à la ministre des solidarités et de la santé.


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 406189
Date de la décision : 26/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 26 oct. 2017, n° 406189
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Dorothée Pradines
Rapporteur public ?: M. Charles Touboul
Avocat(s) : SCP ODENT, POULET

Origine de la décision
Date de l'import : 31/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:406189.20171026
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