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25/10/2017 | FRANCE | N°400950

France | France, Conseil d'État, 5ème - 4ème chambres réunies, 25 octobre 2017, 400950


Vu la procédure suivante :

Par une décision du 16 novembre 2016, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de Mme A...épouseB...'h dirigées contre l'arrêt du 3 mars 2016 de la cour administrative d'appel de Paris en tant que cet arrêt se prononce sur ses préjudices à caractère personnel.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 janvier 2017, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) conclut au rejet du pourvoi et à ce qu'une somm

e de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme A...épouseB...'h au titre de ...

Vu la procédure suivante :

Par une décision du 16 novembre 2016, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de Mme A...épouseB...'h dirigées contre l'arrêt du 3 mars 2016 de la cour administrative d'appel de Paris en tant que cet arrêt se prononce sur ses préjudices à caractère personnel.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 janvier 2017, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) conclut au rejet du pourvoi et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme A...épouseB...'h au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Le pourvoi a été communiqué à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine Bobo, auditeur,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de Mme Mme A...épouse B... et à la SCP Sevaux, Mathonnet, avocat de l'ONIAM.

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que MmeB...'h a demandé au tribunal administratif de Melun de déclarer l'Etablissement français du sang (EFS) responsable de sa contamination par le virus de l'hépatite C à la suite de la transfusion de produits sanguins reçus le 13 mai 1982 au centre hospitalier de Corbeil-Essonnes et de mettre à sa charge la réparation du dommage subi ; que, par un jugement du 20 janvier 2012, le tribunal a partiellement fait droit à cette demande en condamnant l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), substitué à l'EFS, à verser à la requérante la somme de 30 000 euros en réparation de ses préjudices ; que l'intéressée se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 3 mars 2016 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel contre ce jugement ; que, par une décision du 16 novembre 2016, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi dirigées contre cet arrêt en tant qu'il se prononce sur les préjudices à caractère personnel de la victime ;

Sur les préjudices constatés à la date de l'arrêt :

2. Considérant que si la cour a alloué une somme globale de 30 000 euros à Mme A... épouseB...'h au titre des préjudices personnels d'ores et déjà subis à la date à laquelle elle s'est prononcée, il résulte de son arrêt que ce montant procède d'une évaluation des différents préjudices allégués à ce titre par l'intéressée, en particulier des souffrances endurées, que la cour a évaluées à 3 sur une échelle de 7 pour la période antérieure à 2006 et à 2 pour la période postérieure, ainsi que de la prise en compte de l'ensemble des circonstances de l'espèce ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la cour aurait méconnu le principe de réparation intégrale du préjudice en allouant une somme forfaitaire en réparation de plusieurs préjudices doit être écarté ;

Sur les préjudices futurs :

3. Considérant que, dans le cas d'une pathologie évolutive insusceptible d'amélioration, l'absence de consolidation, impliquant notamment l'impossibilité de fixer définitivement un taux d'incapacité permanente, ne fait pas obstacle à ce que soit mise à la charge du responsable du dommage la réparation des préjudices matériels et personnels dont il est d'ores et déjà certain qu'ils devront être subis à l'avenir ; qu'en revanche, l'existence de traitements rendant possible une guérison fait obstacle à l'indemnisation des préjudices futurs, qui ne peuvent être regardés comme certains ;

4. Considérant que, pour rejeter la demande d'indemnisation des préjudices personnels futurs de MmeB...'h, la cour a relevé que l'état de l'intéressée, qui n'était que stabilisé et non consolidé, n'était pas insusceptible d'évoluer dans un sens favorable du fait de l'existence de nouveaux traitements offrant une chance très sérieuse d'éradication définitive du virus dans son organisme ; qu'il résulte de ce qui précède qu'elle n'a, en statuant ainsi, pas commis d'erreur de droit ;

5. Considérant que la cour s'est bornée à rejeter la demande d'indemnisation qui lui était présentée pour les préjudices à venir sans exclure une réparation de ces préjudices une fois que ceux-ci auront le cas échéant été subis et présenteront alors un caractère certain ; qu'il appartient dans ce cas à la victime de solliciter une indemnisation pour chaque nouvelle période ouvrant droit à réparation, sans que ce droit puisse être diminué du fait que l'intéressée, comme elle en a exprimé l'intention, aura refusé de suivre les traitements lui offrant une chance de guérison ; que si le juge de l'indemnité peut, dans de telles circonstances, allouer une rente provisionnelle à la victime sous la condition de la production régulière de certificats attestant de la persistance du préjudice indemnisé, la cour n'a en l'espèce, alors que Mme A...épouse B...'h ne concluait pas au versement d'une telle provision et se bornait à demander l'indemnisation définitive de son préjudice personnel futur, pas commis d'erreur de droit en ne lui attribuant pas une rente provisionnelle ; qu'il suit de là que les moyens tirés de ce que la cour aurait commis une erreur de droit au regard du principe de réparation intégrale du préjudice, de l'article L. 1221-14 du code de la santé publique et de l'article 16-3 du code civil doivent être écartés ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi de Mme A...épouseB...'h doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A...épouseB...'h la somme demandée par l'ONIAM au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de Mme A...épouseB...'h est rejeté.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'ONIAM au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme C...A...épouseB...'h et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.

Copie en sera adressée à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne.


Synthèse
Formation : 5ème - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 400950
Date de la décision : 25/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01 RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE. RESPONSABILITÉ EN RAISON DES DIFFÉRENTES ACTIVITÉS DES SERVICES PUBLICS. SERVICE PUBLIC DE SANTÉ. - DEMANDE D'INDEMNISATION ADRESSÉE À L'ONIAM - AFFECTION ÉVOLUTIVE SUSCEPTIBLE D'ÉVOLUER DANS UN SENS FAVORABLE - OCTROI D'UNE RENTE PROVISIONNELLE - CONDITIONS.

60-02-01 Victime atteinte d'une affection évolutive susceptible d'évoluer dans un sens favorable, demandant à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) l'indemnisation de ses préjudices corporels futurs.... ,,Il appartient à la victime atteinte d'une affection évolutive qui n'est pas insusceptible d'évoluer dans un sens favorable de solliciter une indemnisation pour chaque nouvelle période ouvrant droit à réparation, sans que ce droit puisse être diminué du fait que l'intéressé aura refusé de suivre les traitements lui offrant une chance de guérison. Le juge de l'indemnité, saisi de conclusions en ce sens, peut, dans de telles circonstances, allouer une rente provisionnelle à la victime sous la condition de la production régulière de certificats attestant de la persistance du préjudice indemnisé.


Publications
Proposition de citation : CE, 25 oct. 2017, n° 400950
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Catherine Bobo
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : SCP BARADUC, DUHAMEL, RAMEIX ; SCP SEVAUX, MATHONNET

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:400950.20171025
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