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18/10/2017 | FRANCE | N°406111

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 18 octobre 2017, 406111


Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner le centre hospitalier de Montauban à lui verser la somme de 403 860 euros en réparation des préjudices subis à l'occasion de sa prise en charge par cet établissement. Par un jugement n° 1105580 du 3 avril 2014, le tribunal administratif de Toulouse a partiellement fait droit à sa demande et a condamné le centre hospitalier de Montauban à verser à M. A...la somme de 1 000 euros en réparation des préjudices subis.

Par un arrêt n° 14BX01641 du 18 octobre 2016, la cour a

dministrative d'appel de Bordeaux, sur appel de M.A..., a porté cette somme...

Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner le centre hospitalier de Montauban à lui verser la somme de 403 860 euros en réparation des préjudices subis à l'occasion de sa prise en charge par cet établissement. Par un jugement n° 1105580 du 3 avril 2014, le tribunal administratif de Toulouse a partiellement fait droit à sa demande et a condamné le centre hospitalier de Montauban à verser à M. A...la somme de 1 000 euros en réparation des préjudices subis.

Par un arrêt n° 14BX01641 du 18 octobre 2016, la cour administrative d'appel de Bordeaux, sur appel de M.A..., a porté cette somme à 2 200 euros.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire enregistrés le 19 décembre 2016 et le 20 mars 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les articles 1er, 2 et 4 de cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Montauban la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Florian Roussel, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Laurence Marion, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de M. A... et à Me Le Prado, avocat du centre hospitalier de Montauban.

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M.A..., victime d'un accident au cours duquel son pied gauche avait été écrasé sous l'attelage d'une remorque, s'est rendu le 11 avril 2008 au centre hospitalier de Montauban qui, malgré un examen de radiographie, n'a pas diagnostiqué une fracture et a renvoyé le patient à son domicile ; que, le 22 avril 2008, M. A...s'est à nouveau présenté au centre hospitalier où une fracture de la base du deuxième métatarse avec deux fragments osseux a été diagnostiquée ; que, dès le lendemain, il a bénéficié d'une réduction sanglante et d'une ostéosynthèse par embrochage du deuxième métatarse ; qu'il a toutefois subi par la suite diverses complications ; que, le 9 septembre 2008, un examen au scanner a révélé l'existence de séquelles de la fracture ; que M. A..., qui a dû mettre fin définitivement à son activité professionnelle, a saisi le tribunal administratif de Toulouse d'une demande tendant à l'indemnisation des préjudices résultant de l'erreur de diagnostic commise par le centre hospitalier de Montauban ; que, par un jugement du 3 avril 2014, le tribunal administratif de Toulouse a condamné cet établissement à réparer les souffrances endurées par l'intéressé et son incapacité temporaire partielle à hauteur, respectivement, de 800 euros et 200 euros ; que M. A...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 18 octobre 2016 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux n'a que partiellement fait droit à son appel en portant le montant de son indemnisation de 1 000 à 2 200 euros ;

2. Considérant, d'une part, qu'à la fin de son rapport, l'expert désigné par le tribunal administratif indiquait que M. A...avait enduré des souffrances évaluées à 3 sur une échelle de 7 et qu'il subissait un préjudice esthétique évalué à 2 sur 7, une incapacité permanente partielle de 12 %, un préjudice d'agrément important et un préjudice professionnel très important du fait de l'interruption de son activité de restaurateur ; que l'expert énonçait ensuite que : " En conclusion, tous ces préjudices dont M. B...A...demeure atteint sont en lien direct et certain avec les actes médicaux pratiqués et les soins reçus, mais avec un traitement immédiat efficace, les souffrances endurées n'auraient été que de 2/7 et le préjudice esthétique de 1/7, les autres préjudices demeurant... " ; que cette conclusion ambiguë et contradictoire n'était pas éclairée par les indications contenues dans le corps du rapport ; qu'en retenant que, selon l'expert, l'incapacité permanente partielle, le préjudice d'agrément et le préjudice professionnels n'étaient pas en lien direct avec la faute commise par le service public hospitalier lors de la première prise en charge du patient, sans faire usage de ses pouvoirs d'instruction pour demander à l'expert de préciser son appréciation ou ordonner une expertise complémentaire, la cour a entaché son arrêt de dénaturation ;

3. Considérant, d'autre part, que l'expert mentionnait par ailleurs que la mise en oeuvre d'un traitement approprié en urgence dès la première admission du patient " aurait sans aucun doute amené, peut-être sans séquelles, à une consolidation en deux bons mois environ " ; que M. A... avait produit un avis médical dont il ressortait que si la lésion avait été traitée en urgence, il aurait existé " une chance de consolidation en bonne position " et que l'erreur de diagnostic initiale était ainsi " à l'origine de la cascade de complications " ; qu'eu égard à ces indications, qui n'étaient contredites par aucune autre pièce du dossier, la cour, en ne prenant pas parti sur la question de savoir si l'erreur fautive de diagnostic, ayant entraîné un retard de traitement, avait fait perdre à l'intéressé une chance d'échapper aux séquelles définitives dont il demeurait atteint, a insuffisamment motivé son arrêt ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier de Montauban, la somme de 3 000 euros à verser à M. A...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les articles 1er, 2 et 4 de l'arrêt n° 14BX016041 du 18 octobre 2016 de la cour administrative d'appel de Bordeaux sont annulés.

Article 2 : L'affaire est renvoyée dans cette mesure devant la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Article 3 : Le centre hospitalier de Montauban versera une somme de 3 000 euros à M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et au centre hospitalier de Montauban.

Copie en sera adressée au Régime social des indépendants de Midi-Pyrénées.


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 406111
Date de la décision : 18/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 18 oct. 2017, n° 406111
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Florian Roussel
Rapporteur public ?: Mme Laurence Marion
Avocat(s) : SCP BOUZIDI, BOUHANNA ; LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:406111.20171018
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