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16/10/2017 | FRANCE | N°408786

France | France, Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 16 octobre 2017, 408786


Vu la procédure suivante :

M. E...C...et Mme B...A..., agissant en leur nom personnel et au nom de leur fils mineur, G..., ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France sur le recours qu'ils ont formé contre la décision de l'ambassadeur de France en Afghanistan refusant de leur délivrer un visa et d'enjoindre

à l'autorité administrative de réexaminer leur demande de visa dan...

Vu la procédure suivante :

M. E...C...et Mme B...A..., agissant en leur nom personnel et au nom de leur fils mineur, G..., ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France sur le recours qu'ils ont formé contre la décision de l'ambassadeur de France en Afghanistan refusant de leur délivrer un visa et d'enjoindre à l'autorité administrative de réexaminer leur demande de visa dans un délai de 15 jours, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par une ordonnance n° 1609275 du 22 novembre 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 10 mars, 24 mars et 28 septembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C...et Mme A...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à leur demande de suspension et d'enjoindre à l'autorité administrative de réexaminer leur demande dans le délai de huit jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à verser à leur avocat sous réserve qu'il renonce à la part contributive de l'Etat.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. François Weil, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Guillaume Odinet, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de M. C...et de Mme A...;

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que M.C..., ressortissant afghan, a été, entre le 14 mai 2007 et le 1er janvier 2010, employé en qualité de serveur puis, entre le 1er janvier 2010 le 14 mai 2013, de magasinier au sein de l'économat des armées auprès des forces françaises alors déployées en Afghanistan ; que les autorités françaises ont annoncé au mois de mai 2012 le retrait des forces françaises d'Afghanistan à partir du mois de juillet ; que M. C...a déposé une demande de visa auprès de l'ambassade de France en Afghanistan le 19 juin 2015 ; qu'un refus de visa lui ayant été opposé le 22 février 2016, il a saisi le 29 avril 2016 la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ; que sa demande ayant fait l'objet d'une décision implicite de rejet, M. C...et Mme A...ont formé un recours contre ce refus de visa devant le tribunal administratif de Nantes ; qu'ils ont, parallèlement, demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution du refus de visa ; que, par une ordonnance du 22 novembre 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a rejeté leur demande de suspension, aux motifs que les moyens soulevés n'étaient pas propres à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ; que M. C...et Mme A...se pourvoient en cassation contre cette ordonnance ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 742-2 du code de justice administrative, applicable en matière de référé en vertu de l'article R. 522-11 du même code : " Les ordonnances mentionnent le nom des parties, l'analyse des conclusions ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elles font application (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, si une ordonnance de référé doit en principe, outre le nom des parties et les dispositions législatives et réglementaires dont elle fait application, porter mention de l'ensemble des mémoires produits avant la clôture de l'instruction, l'omission du visa d'un tel mémoire n'est pas, par elle-même, de nature à l'entacher d'irrégularité lorsque celui-ci ne comporte pas de conclusions nouvelles ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que le mémoire en réplique de M. C...et MmeA..., enregistré le 16 novembre 2016 au greffe du tribunal administratif, ne comportait pas de conclusions nouvelles ; que, par suite, l'absence de mention de ce mémoire dans les visas de l'ordonnance attaquée n'est pas, en elle-même, de nature à en entraîner l'annulation ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du quatrième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 auquel renvoie le Préambule de la Constitution : " Tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d'asile sur les territoires de la République " ; que si le droit constitutionnel d'asile a pour corollaire le droit de solliciter en France la qualité de réfugié, les garanties attachées à ce droit reconnu aux étrangers se trouvant sur le territoire de la République n'emportent aucun droit à la délivrance d'un visa en vue de déposer une demande d'asile en France ou pour y demander le bénéfice de la protection subsidiaire prévue à l'article L. 712-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, de même, l'invocation des stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à raison de menaces susceptibles d'être encourues à l'étranger ne saurait impliquer de droit à la délivrance d'un visa d'entrée en France ; que le juge des référés n'a, dès lors, pas commis d'erreur de droit et n'a pas dénaturé les pièces du dossier en jugeant que les moyens tirés de la méconnaissance du droit d'asile, de la protection subsidiaire et des stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'étaient pas de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée ;

5. Considérant, en troisième lieu, que le juge des référés a pu estimer, sans commettre d'erreur de droit, eu égard à l'office que lui attribuent les articles L. 511-1 et L. 521-1 du code de justice administrative, ni dénaturer les pièces du dossier, que n'était pas de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision de refus de visa contestée le moyen tiré de la méconnaissance des obligations qui incombent à l'Etat au titre de la protection qu'il doit à ses agents ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'en jugeant que n'était pas de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée le moyen tiré de ce qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de M.C..., eu égard notamment aux fonctions exercées par l'intéressé, le juge des référés s'est livré à une appréciation souveraine des faits de l'espèce, exempte de dénaturation ; que les deux erreurs de plume portant sur des dates mentionnées dans l'ordonnance ne sont pas de nature à conduire à son annulation ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...et Mme A... ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'ordonnance qu'ils attaquent ; que leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. C...et Mme A...est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. E...C..., à Mme B...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 2ème - 7ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 408786
Date de la décision : 16/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 16 oct. 2017, n° 408786
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. François Weil
Rapporteur public ?: M. Guillaume Odinet
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO

Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:408786.20171016
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