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16/10/2017 | FRANCE | N°402239

France | France, Conseil d'État, 4ème - 5ème chambres réunies, 16 octobre 2017, 402239


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 8 août 2016 et 8 novembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 7 juin 2016 du Conseil national de l'ordre des médecins en tant qu'elle rejette sa demande de reprise d'activité et le suspend du droit d'exercer des gestes chirurgicaux et d'exploration non obstétricaux pour une durée de cinq mois ;

2°) de mettre à la charge du Conseil national de l'ordre des

médecins la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justic...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 8 août 2016 et 8 novembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 7 juin 2016 du Conseil national de l'ordre des médecins en tant qu'elle rejette sa demande de reprise d'activité et le suspend du droit d'exercer des gestes chirurgicaux et d'exploration non obstétricaux pour une durée de cinq mois ;

2°) de mettre à la charge du Conseil national de l'ordre des médecins la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Françoise Tomé, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Richard, avocat de M. B...et à la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat du Conseil national de l'ordre des médecins ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique, relatif à la suspension, pour insuffisance professionnelle, du droit d'exercer des professionnels de santé exerçant une profession médicale : " I.- En cas d'insuffisance professionnelle rendant dangereux l'exercice de la profession, la suspension temporaire, totale ou partielle, du droit d'exercer est prononcée par le conseil régional ou interrégional pour une période déterminée qui peut, s'il y a lieu, être renouvelée (...). / II. - La suspension ne peut être ordonnée que sur un rapport motivé établi à la demande du conseil régional ou interrégional dans les conditions suivantes : / 1° Pour les médecins, le rapport est établi par trois médecins qualifiés dans la même spécialité que celle du praticien concerné désignés comme experts, le premier par l'intéressé, le deuxième par le conseil régional ou interrégional et le troisième par les deux premiers experts. Ce dernier est choisi parmi les personnels enseignants et hospitaliers titulaires de la spécialité. Pour la médecine générale, le troisième expert est choisi parmi les personnels enseignants titulaires ou les professeurs associés ou maîtres de conférences associés des universités ; (....). / V.- Avant de se prononcer, le conseil régional ou interrégional peut, par une décision non susceptible de recours, décider de faire procéder à une expertise complémentaire dans les conditions prévues aux II, III et IV du présent article (...) / VII.- La décision de suspension temporaire du droit d'exercer pour insuffisance professionnelle définit les obligations de formation du praticien. / La notification de la décision mentionne que la reprise de l'exercice professionnel par le praticien ne pourra avoir lieu sans qu'il ait au préalable justifié auprès du conseil régional ou interrégional avoir rempli les obligations de formation fixées par la décision (...) " ; que les conditions dans lesquelles un praticien, suspendu en vertu de ces dispositions, peut reprendre son activité sont fixées par l'article R. 4124-3-6 du même code, qui dispose que : " Le praticien qui a fait l'objet d'une mesure de suspension totale ou partielle du droit d'exercer ne peut reprendre son activité sans avoir justifié auprès du conseil régional ou interrégional avoir rempli les obligations de formation fixées par la décision. Dans ce cas, ce conseil décide que le praticien est apte à exercer sa profession et en informe les autorités qui ont reçu notification de la suspension. / S'il apparaît que les obligations posées par la décision du conseil régional ou interrégional, ou, dans le cas du VI de l'article R. 4124-3-5 du conseil national, n'ont pas été satisfaites, la suspension de l'intéressé est prolongée par le conseil régional ou interrégional jusqu'à ce que ce conseil se soit prononcé dans les conditions prévues par l'article R. 4124-3-5 " ; qu'il résulte de ces dernières dispositions que si, à l'issue de la période de suspension fixée dans une décision prise en application des dispositions de l'article R. 4124-3-5, le praticien concerné n'a pas, ou pas intégralement, exécuté les obligations de formation définies dans cette décision, il appartient au conseil régional ou interrégional compétent de prendre une nouvelle décision de suspension prolongeant la précédente, en vue de statuer à nouveau sur l'aptitude professionnelle du praticien selon la procédure prévue à l'article R. 4124-3-5 ; que, toutefois, l'établissement d'un nouveau rapport d'expertise ne s'impose à peine d'irrégularité de cette nouvelle procédure que si le praticien fait état d'éléments susceptibles d'avoir une incidence sur l'appréciation initialement portée sur son insuffisance professionnelle ou sur la nécessité des formations qui lui avaient été imposées ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B..., médecin qualifié spécialiste en gynécologie obstétrique, a été suspendu, le 27 janvier 2016, du droit d'exercer des gestes chirurgicaux et d'exploration non obstétricaux pour une durée de trois mois sur le fondement des dispositions citées ci-dessus de l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique, la reprise de l'ensemble de son activité professionnelle étant soumise à la justification de formations portant notamment sur l'obtention d'un diplôme universitaire d'hystéroscopie ou, à défaut, d'une attestation établissant des acquis équivalents ; que, par la décision attaquée du 7 juin 2016, le Conseil national de l'ordre des médecins, statuant en formation restreinte sur un recours dirigé par M. B...contre une décision du 28 avril 2016 du conseil régional de Rhône-Alpes de l'ordre des médecins prolongeant sa suspension pour une durée de six mois, a maintenu la suspension d'exercice de l'intéressé pour les mêmes activités pour une durée de cinq mois, au motif qu'il n'avait pas encore passé l'ensemble des épreuves permettant l'obtention d'un diplôme universitaire d'hystéroscopie, ni obtenu d'attestation équivalente ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, d'une part, M. B...n'avait, à la date de la décision litigieuse, pas encore achevé les travaux nécessaires à l'obtention du diplôme universitaire d'hystéroscopie opératoire auquel il était inscrit et que, d'autre part, il ne présentait au Conseil national de l'ordre des médecins aucune attestation établissant, à défaut de l'obtention de ce diplôme, la réalisation d'une formation équivalente ; que, par suite, le Conseil national de l'ordre des médecins a pu, sans rechercher si les différents acquis professionnels dont faisait état l'intéressé étaient de nature à justifier une reprise d'activité, légalement estimer qu'il n'avait pas rempli l'obligation de formation qui lui avait été imposée par la décision de suspension du 27 janvier 2016 ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit au point 1 que, dès lors que M. B...n'avait, à l'issue de la période de suspension impartie par la décision du 27 janvier 2016, pas intégralement exécuté les obligations de formation définies dans cette décision, il n'appartenait ni au conseil départemental de Rhône-Alpes ni, sur le recours du praticien, au Conseil national de l'ordre des médecins, de statuer immédiatement sur son aptitude professionnelle, le cas échéant au vu d'un rapport d'expertise, mais seulement de prolonger la décision de suspension initiale sans qu'un tel rapport soit requis ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le Conseil national de l'ordre des médecins a fait une exacte application des dispositions de l'article R. 4124-3-6 du code de la santé publique ; que M. B...n'est, par suite, pas fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque, laquelle est suffisamment motivée ;

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge du Conseil national de l'ordre des médecins qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le Conseil national de l'ordre des médecins sur le fondement des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le Conseil national de l'ordre des médecins au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au Conseil national de l'ordre des médecins.


Synthèse
Formation : 4ème - 5ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 402239
Date de la décision : 16/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

55-01-02-01 PROFESSIONS, CHARGES ET OFFICES. ORDRES PROFESSIONNELS - ORGANISATION ET ATTRIBUTIONS NON DISCIPLINAIRES. QUESTIONS PROPRES À CHAQUE ORDRE PROFESSIONNEL. ORDRE DES MÉDECINS. - PROLONGATION DE LA SUSPENSION D'UN PRATICIEN POUR INSUFFISANCE PROFESSIONNELLE (ART. R. 4124-3-5 DU CSP) - CONDITIONS - 1) PRATICIEN N'AYANT PAS EXÉCUTÉ TOUT OU PARTIE DES OBLIGATIONS DE FORMATION FIXÉES PAR LA DÉCISION INITIALE DE SUSPENSION - 2) OBLIGATION D'UN NOUVEAU RAPPORT D'EXPERTISE - ABSENCE, SAUF ÉLÉMENTS AVANCÉS PAR LE PRATICIEN AYANT UNE INCIDENCE SUR L'APPRÉCIATION INITIALEMENT PORTÉE.

55-01-02-01 1) Il résulte de l'article R. 4124-3-6 du code de la santé publique (CSP) que si, à l'issue de la période de suspension fixée dans une décision prise en application de l'article R. 4124-3-5 du même code, le praticien concerné n'a pas, ou pas intégralement, exécuté les obligations de formation définies dans cette décision, il appartient au conseil régional ou interrégional compétent de prendre une nouvelle décision de suspension prolongeant la précédente, en vue de statuer à nouveau sur l'aptitude professionnelle du praticien selon la procédure prévue à l'article R. 4124-3-5.... ,,2) Toutefois, l'établissement d'un nouveau rapport d'expertise ne s'impose à peine d'irrégularité de cette nouvelle procédure que si le praticien fait état d'éléments susceptibles d'avoir une incidence sur l'appréciation initialement portée sur son insuffisance professionnelle ou sur la nécessité des formations qui lui avaient été imposées.


Publications
Proposition de citation : CE, 16 oct. 2017, n° 402239
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Françoise Tomé
Rapporteur public ?: Mme Sophie-Justine Lieber
Avocat(s) : SCP RICHARD ; SCP MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:402239.20171016
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