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16/10/2017 | FRANCE | N°398767

France | France, Conseil d'État, 6ème - 1ère chambres réunies, 16 octobre 2017, 398767


Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a refusé de procéder au versement des sommes qui lui étaient dues au titre des expertises et enquêtes sociales qu'elle a réalisées, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 003,38 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du trentième jour suivant le dépôt auprès des différentes juridictions concernées, de condamner l'État à lui verser les sommes correspo

ndant aux intérêts au taux légal restant sur les sommes qui lui étaient dues ...

Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a refusé de procéder au versement des sommes qui lui étaient dues au titre des expertises et enquêtes sociales qu'elle a réalisées, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 003,38 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du trentième jour suivant le dépôt auprès des différentes juridictions concernées, de condamner l'État à lui verser les sommes correspondant aux intérêts au taux légal restant sur les sommes qui lui étaient dues dans certaines expertises, et d'assortir la condamnation d'une astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement.

Par un jugement n° 1205308/7-3 du 23 janvier 2014, le tribunal administratif de Paris a, d'une part, rejeté les conclusions de Mme B...relatives à la contestation d'un redressement de ses honoraires comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître, d'autre part, condamné l'État à lui verser une somme de 770 euros au titre de sa contribution dans une affaire suivie devant le tribunal de grande instance de Bobigny, avec intérêt au taux légal à compter du 27 mars 2012, sous réserve que cette somme ne lui ait pas déjà été réglée, ainsi qu'à lui verser une somme de 1 500 euros en réparation de son préjudice, et enfin a rejeté le surplus de ses conclusions.

Par un arrêt n° 14PA01233 du 17 mars 2016, enregistré le 14 avril 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la cour administrative d'appel de Paris, a renvoyé au Conseil d'Etat le pourvoi du garde des sceaux, ministre de la justice, contre ce jugement. Le garde des sceaux, ministre de la justice demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête présentée par MmeB....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le décret n° 2009-285 du 12 mars 2009 ;

- le décret n° 2015-233 du 27 février 2015 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Mireille Le Corre, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Louis Dutheillet de Lamothe, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de MmeB....

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que MmeB..., éducatrice spécialisée inscrite sur la liste des enquêteurs sociaux près la cour d'appel de Paris dressée en application de l'article 1er du décret du 12 mars 2009 relatif aux enquêteurs sociaux et à la tarification des enquêtes sociales en matière civile, a réalisé à ce titre des enquêtes sociales et des expertises ordonnées par les juges aux affaires familiales des juridictions du ressort de la cour d'appel de Paris ; qu'elle a saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à ce que l'État soit condamné à réparer le préjudice qu'elle estime avoir subi du fait des retards et absences de paiement par l'Etat de prestations qu'elle a effectuées à ce titre auprès des tribunaux de grande instance du ressort de la cour d'appel de Paris ; que, par un jugement du 23 janvier 2014, le tribunal administratif a, d'une part, rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ses conclusions relatives à la contestation d'un redressement de ses honoraires et, d'autre part, condamné l'Etat à verser à Mme B...une somme de 770 euros au titre de sa contribution dans une affaire suivie devant le tribunal de grande instance de Bobigny et à une somme de 1 500 euros en réparation du préjudice subi par l'intéressée ; que, par un arrêt du 17 mars 2016, la cour administrative d'appel de Paris a renvoyé au Conseil d'Etat l'appel formé par le garde des sceaux, ministre de la justice, contre ce jugement en tant qu'il fait droit aux conclusions de Mme B...;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 35 du décret du 27 février 2015 relatif au Tribunal des conflits et aux questions préjudicielles : " Lorsqu'une juridiction est saisie d'un litige qui présente à juger, soit sur l'action introduite, soit sur une exception, une question de compétence soulevant une difficulté sérieuse et mettant en jeu la séparation des ordres de juridiction, elle peut, par une décision motivée qui n'est susceptible d'aucun recours, renvoyer au Tribunal des conflits le soin de décider sur cette question de compétence. (...) " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 12 du décret du 12 mars 2009 relatif aux enquêteurs sociaux et à la tarification des enquêtes sociales en matière civile : " Un référentiel des diligences devant être accomplies lors d'une enquête sociale est défini par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice. Il est alloué aux enquêteurs sociaux désignés en application des articles 1072, 1171 et 1221 du code de procédure civile une rémunération forfaitaire par enquête, fixée par arrêté conjoint du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre chargé du budget, selon que l'enquête sociale est accomplie par une personne physique ou une personne morale. Cette rémunération peut être réduite, après recueil des observations des intéressés, en cas de retard dans l'accomplissement de la mission ou d'insuffisance du rapport. / En cas d'impossibilité pour l'enquêteur d'accomplir sa mission pour une cause qui lui est étrangère, il est alloué, sous réserve que l'enquêteur justifie des diligences accomplies, une indemnité de carence. Ses modalités sont fixées par l'arrêté prévu à l'alinéa 1. / Lorsque les enquêteurs se déplacent, il leur est alloué, sur justification, des indemnités calculées dans les conditions fixées pour les déplacements des personnels civils de l'Etat. " ;

4. Considérant que le litige né de l'action de Mme B...relatif au versement de sommes qui lui seraient dues au titre d'expertises et d'enquêtes sociales qu'elle a réalisées dans le cadre de procédures civiles et de dommages et intérêts afférents, et rémunérées conformément aux dispositions citées au point 3, présente à juger une question de compétence soulevant une difficulté sérieuse et de nature à justifier le recours à la procédure prévue par l'article 35 du décret du 27 février 2015 ; que, par suite, il y a lieu de renvoyer au Tribunal des conflits la question de savoir si l'action introduite par Mme B...relève ou non de la compétence de la juridiction administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'affaire est renvoyée au Tribunal des conflits.

Article 2 : Il est sursis à statuer sur le pourvoi du garde des sceaux, ministre de la justice, jusqu'à ce que le Tribunal des conflits ait tranché la question de savoir si le litige né de l'action de Mme B... tendant au versement des sommes dues au titre d'expertises et d'enquêtes sociales intervenues dans le cadre de procédures civiles et de dommages et intérêts afférents relève ou non de la compétence de la juridiction administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la garde des sceaux, ministre de la justice et à Mme A...B....


Synthèse
Formation : 6ème - 1ère chambres réunies
Numéro d'arrêt : 398767
Date de la décision : 16/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 16 oct. 2017, n° 398767
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Mireille Le Corre
Rapporteur public ?: M. Louis Dutheillet de Lamothe
Avocat(s) : SCP THOUIN-PALAT, BOUCARD

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:398767.20171016
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