La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/05/2017 | FRANCE | N°401884

France | France, Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 29 mai 2017, 401884


Vu la procédure suivante :

Par jugement avant-dire droit du 2 février 2015, le tribunal d'instance de Montpellier a sursis à statuer sur les conclusions de MM. A...B...et E...F...H...F...I...et G...D...C..., veuveB..., tendant à ce qu'il soit procédé contradictoirement au bornage des parcelles cadastrées AL n° 27 et AL n° 28, situées sur le territoire de la commune de Baillargues et expropriées en partie par cette dernière, et invité les parties à soumettre au juge administratif la question préjudicielle relative à l'appartenance ou non au domaine public de la commune de

s parcelles en cause.

M. A...B..., M. E...F...H...F...I...et G...D.....

Vu la procédure suivante :

Par jugement avant-dire droit du 2 février 2015, le tribunal d'instance de Montpellier a sursis à statuer sur les conclusions de MM. A...B...et E...F...H...F...I...et G...D...C..., veuveB..., tendant à ce qu'il soit procédé contradictoirement au bornage des parcelles cadastrées AL n° 27 et AL n° 28, situées sur le territoire de la commune de Baillargues et expropriées en partie par cette dernière, et invité les parties à soumettre au juge administratif la question préjudicielle relative à l'appartenance ou non au domaine public de la commune des parcelles en cause.

M. A...B..., M. E...F...H...F...I...et G...D...C...ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de dire que les parcelles cadastrées section AL n° 27 et AL n° 28 qui ont fait l'objet d'une expropriation partielle n'étaient pas entrées dans le domaine public de la commune de Baillargues. Par un jugement n° 1501454 du 16 juin 2015, le tribunal a fait droit à cette demande.

Par une décision n° 391431 du 13 avril 2016, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a annulé ce jugement et renvoyé l'affaire devant le tribunal administratif. Par un jugement n° 1602058 du 12 juillet 2016, le tribunal administratif de Montpellier a déclaré que les terrains en cause faisaient partie du domaine public de la commune de Baillargues.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire et trois nouveaux mémoires, enregistrés les 27 juillet 2016, 29 août 2016, 3 février 2017, 1er mars 2017 et 24 mars 2017 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat, M. F...H...F...I...,G... C... et M. B...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur demande ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Baillargues la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Domingo, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. F...H...F...I..., de G...C...et de M. B...et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la commune de Baillargues.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement avant-dire droit du 2 février 2015, le tribunal d'instance de Montpellier a sursis à statuer sur les conclusions de MM. B...et F...H...F...I...et F...G...C..., veuveB..., tendant à ce qu'il soit procédé contradictoirement au bornage des parcelles cadastrées AL n° 27 et AL n° 28, qui sont situées sur le territoire de la commune de Baillargues et qui ont fait l'objet d'une expropriation partielle, et invité les parties à soumettre au juge administratif une question préjudicielle relative à l'appartenance des parcelles en cause au domaine public de la commune. MM. B...et F...H...F...I...ainsi queG... C... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de dire que ces parcelles n'étaient pas entrées dans son domaine public. Par un jugement du 16 juin 2015, ce tribunal a fait droit à cette demande. Par une décision du 13 avril 2016, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a annulé ce jugement et renvoyé l'affaire devant ce tribunal administratif. Par un jugement du 12 juillet 2016, contre lequel MM. B...et F...H...F...I...ainsi que G...C...se pourvoient en cassation, le tribunal administratif de Montpellier a déclaré que les terrains en cause faisaient partie du domaine public de la commune de Baillargues.

2. Aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative : " S'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, le Conseil d'Etat peut (...) renvoyer l'affaire devant la même juridiction statuant, sauf impossibilité tenant à la nature de la juridiction, dans une autre formation (...) ". Il résulte de ces dispositions que la formation de jugement appelée à délibérer à nouveau sur une affaire à la suite d'une annulation par le Conseil d'Etat de la décision précédemment prise sur cette même affaire ne peut comprendre aucun magistrat ayant participé au délibéré de cette décision, sauf impossibilité structurelle de renvoyer l'affaire devant une autre formation de jugement.

3. Il ressort des mentions du jugement rendu le 12 juillet 2016 par le tribunal administratif, statuant après renvoi de l'affaire par le Conseil d'Etat, qu'il a été rendu dans une formation comprenant deux magistrats qui avaient déjà siégé lors de la séance au cours de laquelle le jugement du 16 juin 2015 avait été délibéré. En l'absence de toute impossibilité structurelle, pour le tribunal administratif de Montpellier, de statuer après renvoi dans une formation de jugement autre que celle qui avait rendu la première décision, les dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ont été méconnues. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, MM. B...et F...H...F...I...ainsi que G...C...sont fondés à demander l'annulation du jugement qu'ils attaquent.

4. Aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative : " Lorsque l'affaire fait l'objet d'un second pourvoi en cassation, le Conseil d'Etat statue définitivement sur cette affaire ". Il y a lieu, par suite, de régler l'affaire au fond.

5. Aux termes de l'article L. 2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques: " Le domaine public d'une personne publique (...) est constitué des biens lui appartenant qui sont soit affectés à l'usage direct du public, soit affectés à un service public pourvu qu'en ce cas ils fassent l'objet d'un aménagement indispensable à l'exécution des missions de ce service public ". Quand une personne publique a pris la décision d'affecter un bien qui lui appartient à un service public et que l'aménagement indispensable à l'exécution des missions de ce service public peut être regardé comme entrepris de façon certaine, eu égard à l'ensemble des circonstances de droit et de fait, telles que, notamment, les actes administratifs intervenus, les contrats conclus, les travaux engagés, ce bien doit être regardé comme une dépendance du domaine public.

6. Il résulte, en premier lieu, de l'instruction que la commune a obtenu le 2 octobre 2012 un arrêté préfectoral l'autorisant à entreprendre sur les parcelles en litige des travaux de défense contre les inondations et d'aménagement d'un plan d'eau de loisir. Ces travaux ont été déclarés d'intérêt général par ce même arrêté. A la suite de l'acquisition des parcelles en litige par voie d'expropriation pour cause d'utilité publique, la commune a conclu le 30 avril 2014 avec la société " Vinci Construction Terrassement " une convention par laquelle la première a confié à la seconde les travaux de creusement du plan d'eau, constitué de deux bassins. En outre, par une délibération du 20 juillet 2016, le conseil municipal de la commune de Baillargues a autorisé le lancement d'appels d'offres en vue de la réalisation de travaux portant notamment sur l'étanchéité des bassins, l'écrêtement des crues et le traitement de l'eau ainsi que sur les aménagements paysagers du site. Les appels d'offres correspondants ont été publiés au Journal officiel de l'Union européenne le 12 octobre 2016.

7. Il résulte, en second lieu, de l'instruction, notamment d'un procès-verbal de récolement dressé le 21 avril 2016 par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement de Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées et d'un constat d'huissier dressé à la demande de la commune le 17 février 2017, que des travaux de reconstruction d'un ouvrage hydraulique situé en amont du site et traversant la route nationale 113 ont été réalisés en vue de permettre un écoulement des eaux vers les parcelles en litige. Par ailleurs, les deux bassins ont été creusés, ce qui a conduit à l'extraction de 255.000 mètres cubes de terre et de matériaux sur une surface de 6 hectares et le tracé du ruisseau d'écoulement naturel des eaux pluviales a été modifié en vue d'alimenter ces bassins.

8. Il résulte de ce qui précède qu'alors même que les travaux de réalisation du plan d'eau ont été suspendus à la suite de l'annulation pour excès de pouvoir, par un arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 7 novembre 2016, de l'arrêté du 2 octobre 2012 du préfet de l'Hérault les autorisant, l'aménagement indispensable à l'exécution des missions de service public de lutte contre les inondations et de loisirs auxquelles les parcelles en litige ont été affectées par la commune doit être regardé comme ayant été entrepris de façon certaine. Par suite, ces parcelles constituent des dépendances du domaine public communal.

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de MM. B... et F...H...F...I...ainsi que de G...C...le versement à la commune de Baillargues d'une somme globale de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à ce titre le versement d'une somme à la charge de cette commune, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 16 juin 2015 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : Il est déclaré que les parcelles cadastrées section AL n° 27 et AL n° 28, pour leur partie ayant fait l'objet de l'ordonnance d'expropriation rendue le 3 décembre 2013, constituent des dépendances du domaine public de la commune de Baillargues.

Article 3 : Les conclusions de MM. B...et F...H...F...I...ainsi que de G...C...présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : M. F...H...F...I..., G...C...et M. B...verseront à la commune de Baillargues une somme globale de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. E...F...H...F...I..., àG... D... C..., veuveB..., à M.A... B... et à la commune de Baillargues.

Copie en sera adressée au tribunal d'instance de Montpellier.


Synthèse
Formation : 8ème - 3ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 401884
Date de la décision : 29/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 29 mai. 2017, n° 401884
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Laurent Domingo
Rapporteur public ?: M. Romain Victor
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ ; SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:401884.20170529
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award