Vu la procédure suivante :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Montreuil :
- d'annuler la décision implicite par laquelle le président du conseil général de la Seine-Saint-Denis a rejeté son recours dirigé contre la décision de la caisse d'allocations familiales de la Seine-Saint-Denis du 14 mars 2014 de récupérer un indu de revenu de solidarité active de 15 686,45 euros au titre de la période du 1er février 2011 au 28 février 2014 ;
- de le décharger de cette somme ;
- à titre subsidiaire, d'annuler la décision implicite par laquelle le président du conseil général de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de remise gracieuse et de lui accorder la remise gracieuse de cette dette.
Par un jugement n° 1411596 du 1er décembre 2015, le tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision implicite rejetant le recours formé par M. A...contre la décision de la caisse d'allocations familiales de la Seine-Saint-Denis du 14 mars 2014, l'a déchargé de la somme de 15 686,45 euros et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 2 février et 2 mai 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le département de la Seine-Saint-Denis demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montreuil du 1er décembre 2015 ;
2°) de mettre à la charge de M. A...la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Marc Thoumelou, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Jean Lessi, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat du département de la Seine-Saint-Denis.
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. A...a été bénéficiaire du revenu de solidarité active dans le département de la Seine-Saint-Denis à compter du mois d'août 2010. Par des décisions datées respectivement des 14 et 17 mars 2014, la caisse d'allocations familiales de ce département a, d'une part, réclamé le remboursement d'un indu d'un montant de 15 686,45 euros et, d'autre part, mis fin à ses droits au revenu de solidarité active. Par un jugement du 1er décembre 2015, le tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision implicite par laquelle le président du conseil général de la Seine-Saint-Denis a rejeté le recours préalable de M. A... tendant au retrait de la première de ces décisions ou, à défaut, à la remise de sa dette, et a entièrement déchargé celui-ci de la somme mise à sa charge. Le département se pourvoit en cassation contre ce jugement.
2. Aux termes de l'article L. 262-46 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction applicable au litige : " Tout paiement indu de revenu de solidarité active est récupéré par l'organisme chargé du service de celui-ci ainsi que, dans les conditions définies au présent article, par les collectivités débitrices du revenu de solidarité active. (...) La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général (...), en cas de bonne foi ou de précarité de la situation du débiteur, sauf si cette créance résulte d'une manoeuvre frauduleuse ou d'une fausse déclaration ".
3. Pour faire droit à la demande de M.A..., le tribunal administratif a estimé que les documents produits par le département, dénués de précision sur la prestation de revenu de solidarité active, ne permettaient pas d'établir que le demandeur aurait bénéficié, au titre de cette allocation, de versements d'un montant total de 15 686,45 euros, ce dont il a déduit que ce dernier n'était redevable d'aucune somme au titre de la restitution d'un indu de revenu de solidarité active.
4. Toutefois, il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. A... soutenait dans sa requête introductive d'instance, par de simples allégations, que la caisse d'allocations familiales n'apportait pas la preuve du versement des sommes, dans leur principe et dans leur montant, dont elle avait décidé la récupération, alors même qu'il produisait une copie de son recours préalable dont il ressortait qu'il avait perçu le revenu de solidarité active jusqu'en mars 2014. En défense, le département a produit deux états liquidatifs de 15 133,57 et 552,88 euros, correspondant à un indu d'allocation de revenu de solidarité active au montant forfaitaire pour une personne seule sur la période 1er février 2011 au 28 février 2014 et à un indu d'allocation majorée au titre du mois d'août 2012, corroborés par les documents émanant de la caisse d'allocations familiales et par les déclarations trimestrielles établies par M. A... sur l'ensemble de la période considérée en vue de la perception du revenu de solidarité active, ne mentionnant aucune ressource, ainsi que des courriers adressés par l'intéressé à la médiatrice de la caisse d'allocations familiales, dans lesquels il reconnaissait avoir perçu le revenu de solidarité active. M.A..., qui n'a pas produit de nouveau mémoire et n'était ni présent ni représenté à l'audience, n'a pas contesté ces éléments.
5. Dans ces conditions, en jugeant qu'il n'était pas établi que M. A...aurait bénéficié, au titre du revenu de solidarité active, de versements d'un montant total de 15 686,45 euros, le tribunal administratif de Montreuil a dénaturé les pièces du dossier. Au surplus, s'il estimait ne pas disposer d'éléments suffisamment précis sur le montant des sommes effectivement versées à M. A...au titre du revenu de solidarité active, compte tenu des autres prestations qui lui avaient été versées par la caisse d'allocations familiales et dont la récupération avait également été décidée, il lui appartenait de faire usage de ses pouvoirs généraux d'instruction pour exiger du département la production de tout nouveau document de nature à établir ce montant mais il ne pouvait, sans erreur de droit, déduire de la seule existence d'un doute sur le montant exact de ce montant que M. A...n'était redevable d'aucun indu au titre du revenu de solidarité active.
6. Il suit de là que le département de la Seine-Saint-Denis est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque. Les moyens retenus suffisant à entraîner cette annulation, il n'est pas nécessaire d'examiner les autres moyens du pourvoi.
7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A...la somme que le département de la Seine-Saint-Denis demande au titre des frais qu'il a exposés à l'occasion du litige.
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montreuil du 1er décembre 2015 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Montreuil.
Article 3 : Les conclusions du département de la Seine-Saint-Denis présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au département de la Seine-Saint-Denis et à M. B... A....