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31/03/2017 | FRANCE | N°395010

France | France, Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 31 mars 2017, 395010


Vu la procédure suivante :

La société à responsabilité limitée (SARL) Sensation a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 6 janvier 2011 par lequel le maire de la commune Saint-Tropez (Var) lui a refusé la délivrance d'un permis de démolir et de construire. Par un jugement n° 1102124 du 4 juillet 2013, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 13MA03630 du 1er octobre 2015, la cour administrative d'appel de Marseille, après avoir annulé le jugement du 4 juillet 2013, a rejeté la demande de la

société présentée devant le tribunal administratif.

Par un pourvoi sommaire e...

Vu la procédure suivante :

La société à responsabilité limitée (SARL) Sensation a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 6 janvier 2011 par lequel le maire de la commune Saint-Tropez (Var) lui a refusé la délivrance d'un permis de démolir et de construire. Par un jugement n° 1102124 du 4 juillet 2013, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 13MA03630 du 1er octobre 2015, la cour administrative d'appel de Marseille, après avoir annulé le jugement du 4 juillet 2013, a rejeté la demande de la société présentée devant le tribunal administratif.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 3 décembre 2015 et 2 mars 2016, la SARL Sensation demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Tropez la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code du patrimoine ;

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Clément Malverti, auditeur,

- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Hémery, Thomas-Raquin, avocat de la SARL Sensation, et à la SCP Gaschignard, avocat de la commune de Saint-Tropez ;

1. Considérant que, par arrêté du 6 janvier 2011, le maire de Saint-Tropez (Var) a refusé de délivrer un permis de construire à la SARL Sensation pour régulariser les travaux de démolition et de reconstruction de l'hôtel du Levant situé au lieu dit " Les Cannebiers " dans le site inscrit de la presqu'île de Saint-Tropez ; que la société se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 1er octobre 2015 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, après avoir annulé un jugement du 4 juillet 2013 du tribunal administratif de Toulon, a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 341-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige : " Il est établi dans chaque département une liste des monuments naturels et des sites dont la conservation ou la préservation présente, au point de vue artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque, un intérêt général. (...) / L'inscription entraîne, sur les terrains compris dans les limites fixées par l'arrêté, l'obligation pour les intéressés de ne pas procéder à des travaux autres que ceux d'exploitation courante en ce qui concerne les fonds ruraux et d'entretien normal en ce qui concerne les constructions sans avoir avisé, quatre mois d'avance, l'administration de leur intention " ; qu'aux termes de l'article R. 425-18 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet porte sur la démolition d'un bâtiment situé dans un site inscrit en application de l'article L. 341-1 du code de l'environnement, le permis de démolir ne peut intervenir qu'avec l'accord exprès de l'architecte des Bâtiments de France " ; qu'aux termes de l'article R. 424-14 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " En cas de refus de permis ou d'opposition à une déclaration préalable fondés sur une opposition de l'architecte des Bâtiments de France, le demandeur peut, en application du troisième alinéa de l'article L. 313-2 du présent code, du cinquième alinéa de l'article L. 621-31 ou du deuxième alinéa de l'article L. 642-3 du code du patrimoine, dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision, saisir le préfet de région, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, d'un recours contre cette décision " ;

3. Considérant que les dispositions précitées de l'article R. 424-14 du code de l'urbanisme, dans leur rédaction applicable au litige, ne prévoient la possibilité, pour le demandeur d'une autorisation d'urbanisme, de contester l'avis défavorable de l'architecte des Bâtiments de France en saisissant le préfet de région d'un recours contre cette décision que pour l'application de l'article L. 313-2 du code de l'urbanisme ainsi que des articles L. 621-31 et L. 642-3 du code du patrimoine, lesquels prévoient, dans leur rédaction applicable au litige, outre une telle saisine, que l'avis du préfet de région se substitue à celui de l'architecte des Bâtiments de France ;

4. Considérant que ni l'article L. 341-1 du code de l'environnement, ni l'article R. 424-14 du code de l'urbanisme ne prévoient une telle possibilité de contestation et de substitution pour les décisions de l'architecte des Bâtiments de France refusant de délivrer l'accord exprès prévu à l'article R. 425-18 du code de l'urbanisme à un projet portant sur la démolition d'un bâtiment situé dans un site inscrit en application de l'article L. 341-1 du code de l'environnement ; qu'il ne résulte donc pas de ces dispositions qu'un pétitionnaire n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis refusant la démolition d'un tel bâtiment à la suite d'une décision de l'architecte des Bâtiments de France refusant de délivrer l'accord exprès à ce projet s'il n'a pas, préalablement, saisi le préfet de région ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, en jugeant que la SARL Sensation était tenue de saisir le préfet de région d'un recours administratif préalable contre la décision de l'architecte des Bâtiments de France refusant de lui délivrer l'accord exprès prévu à l'article R. 425-18 du code de l'urbanisme avant d'introduire un recours juridictionnel devant le tribunal administratif contre le refus de permis, la cour administrative d'appel de Marseille a commis une erreur de droit ; que la SARL Sensation est, dès lors, fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Saint-Tropez une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 1er octobre 2015 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : La commune de Saint-Tropez versera à la SARL Sensation la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SARL Sensation et à la commune de Saint-Tropez.


Synthèse
Formation : 2ème - 7ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 395010
Date de la décision : 31/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 31 mar. 2017, n° 395010
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Clément Malverti
Rapporteur public ?: Mme Béatrice Bourgeois-Machureau
Avocat(s) : SCP GASCHIGNARD ; SCP HEMERY, THOMAS-RAQUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 21/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:395010.20170331
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