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17/03/2017 | FRANCE | N°391668

France | France, Conseil d'État, 3ème chambre, 17 mars 2017, 391668


Vu la procédure suivante :

M. et Mme B...A...ont demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la restitution de la différence entre la cotisation acquittée sur la plus-value de cession d'un bien immobilier réalisée le 22 novembre 2008 au titre du prélèvement de 33,1/3 % prévu à l'article 244 bis A du code général des impôts et la cotisation qui résulterait de l'application du taux de 16 % à la même base. Par un jugement n° 1104450 du 30 mars 2012, le tribunal administratif de Montreuil a fait droit à leur demande.

Par un arrêt n° 12VE02554 du 12

mars 2015, la cour administrative d'appel de Versailles a, sur recours du mini...

Vu la procédure suivante :

M. et Mme B...A...ont demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la restitution de la différence entre la cotisation acquittée sur la plus-value de cession d'un bien immobilier réalisée le 22 novembre 2008 au titre du prélèvement de 33,1/3 % prévu à l'article 244 bis A du code général des impôts et la cotisation qui résulterait de l'application du taux de 16 % à la même base. Par un jugement n° 1104450 du 30 mars 2012, le tribunal administratif de Montreuil a fait droit à leur demande.

Par un arrêt n° 12VE02554 du 12 mars 2015, la cour administrative d'appel de Versailles a, sur recours du ministre des finances et des comptes publics, annulé ce jugement et rétabli à 33,1/3 % le taux de prélèvement libératoire auquel M. et Mme A... ont été assujettis au titre de l'année 2008.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 10 juillet et 12 octobre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme A... demandent au Conseil d'Etat :

1°) à titre principal, d'annuler cet arrêt ;

2°) à titre subsidiaire, de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de la question de savoir si une disposition d'un Etat membre prévoyant un délai de réclamation plus court pour les non-résidents que celui dont bénéficient les résidents, alors que les deux catégories de contribuables se trouvent dans une situation objectivement comparable, est compatible avec l'article 63 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et de surseoir à statuer jusqu'à ce que la Cour se soit prononcée sur cette question ;

3°) réglant l'affaire au fond, de rejeter le recours du ministre ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le livre des procédures fiscales et le code général des impôts ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Marlange de la Burgade, avocat de M. et Mme A...;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et Mme A..., ressortissants américains fiscalement domiciliés aux Etats-Unis, ont cédé le 22 novembre 2008 un bien immobilier situé en France. La plus-value réalisée à cette occasion a été soumise au prélèvement au taux de 33,1/3 % prévu à l'article 244 bis A du code général des impôts pour un montant total de 54 111 euros. Par une réclamation du 20 juillet 2010, ils ont demandé que la restitution d'une somme de 28 138 euros correspondant à la différence existant entre ce taux de 33 1/3 % et le taux de 16 % réservé aux résidents français ou communautaires. Ils se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 12 mars 2015 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles, annulant le jugement du 30 mars 2012 du tribunal administratif de Montreuil faisant droit à leur demande, a rétabli le taux de prélèvement libératoire à 33,1/3 %.

Sur les conclusions présentées par le ministre :

2. Le ministre des finances et des comptes publics, en indiquant ne pas entendre poursuivre la défense de la présente affaire, doit être regardé comme demandant au Conseil d'Etat de constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la requête. Il se borne toutefois à faire valoir, d'une part, que la somme de 28 138 euros en litige, majorée d'intérêts moratoires à hauteur de 4 150,36 euros, a été restituée à M. et Mme A...le 15 novembre 2012 en exécution du jugement du 30 mars 2012 du tribunal administratif de Montreuil et, d'autre part, qu'il n'a pas exécuté l'arrêt attaqué du 12 mars 2015 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a annulé ce jugement et remis cette somme à leur charge. Cependant, le ministre ne produit pas de décision accordant aux contribuables la restitution qu'ils demandent et ne soutient d'ailleurs pas qu'une telle décision ait été prise. Par suite, les conclusions du pourvoi ne sont pas devenues sans objet.

Sur le bien-fondé de l'arrêt attaqué :

3. D'une part, aux termes de la première partie de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au litige : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts, doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : / (...) b) Du versement de l'impôt contesté lorsque cet impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement ; / (...) ". Aux termes de la seconde partie du même article : " Toutefois, dans les cas suivants, les réclamations doivent être présentées au plus tard le 31 décembre de l'année suivant celle, selon le cas : / (...) b) Au cours de laquelle les retenues à la source et les prélèvements ont été opérés s'il s'agit de contestations relatives à l'application de ces retenues ; /(...) ". Il résulte de ces dispositions qu'une réclamation est recevable dès lors qu'elle est formée dans le délai prévu dans l'une des hypothèses mentionnées dans la première partie de l'article R. 196-1. La seconde partie de l'article ouvre en outre, dans les hypothèses qu'elle prévoit, un autre délai pendant lequel une réclamation est également recevable.

4. Les dispositions de l'article 244 bis A du code général des impôts dans leur rédaction applicable à l'année 2008, instituent, à la charge des contribuables non-résidents de l'Union européenne ou d'un Etat partie à l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale comportant une clause d'assistance administrative, un impôt, dont le taux était d'un tiers à la date de la réalisation de la plus-value en cause, sur la plus-value notamment réalisée lors de la cession de biens immobiliers. Cet impôt, acquitté lors de l'enregistrement de l'acte de cession des immeubles, ou, à défaut d'enregistrement, dans le mois suivant la cession, par un représentant fiscal agréé par l'administration agissant pour le compte du contribuable, n'est pas recouvré par voie de rôle ou d'avis de mise en recouvrement. Dès lors, les réclamations relatives à cet impôt doivent être présentées à l'administration dans le délai prévu par les dispositions du b) de la première partie de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que l'imposition en cause soit qualifiée de " prélèvement " et que son versement ne soit pas effectué par le contribuable lui-même. Par suite, la cour a commis une erreur de droit en jugeant que la réclamation présentée le 20 juillet 2010 par M. et MmeA..., relative au prélèvement du tiers prévu à l'article 244 bis A du code général des impôts opéré le 22 novembre 2008, était tardive au regard du délai prévu par les dispositions du b) de la deuxième partie de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A...sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. et Mme A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 12 mars 2015 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros à M. et Mme A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme B...A...et ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 391668
Date de la décision : 17/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 17 mar. 2017, n° 391668
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Ophélie Champeaux
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SCP MARLANGE DE LA BURGADE

Origine de la décision
Date de l'import : 11/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:391668.20170317
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