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17/03/2017 | FRANCE | N°387688

France | France, Conseil d'État, 3ème chambre, 17 mars 2017, 387688


Vu la procédure suivante :

M. C...A...M'B... a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1102728 du 19 septembre 2013, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 13PA04274 du 27 novembre 2014, la cour administrative d'appel de Paris a partiellement fait droit à l'appel formé par M. A...M'B... contre ce juge

ment en le déchargeant d'une partie des cotisations supplémentaires d'impôt...

Vu la procédure suivante :

M. C...A...M'B... a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1102728 du 19 septembre 2013, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 13PA04274 du 27 novembre 2014, la cour administrative d'appel de Paris a partiellement fait droit à l'appel formé par M. A...M'B... contre ce jugement en le déchargeant d'une partie des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006, ainsi que des pénalités y afférentes.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 5 février et 27 avril 2015 et le 22 septembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre des finances et des comptes publics demande au Conseil d'Etat d'annuler les articles 1er et 2 de cet arrêt.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rousseau, Tapie, avocat de M. A...M'B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ont été mises à la charge de M. A...M'B... pour les années 2005 et 2006, au titre de revenus regardés comme distribués à la suite d'une vérification de la comptabilité de la SARL Délice Time dont il était associé et qui exploite deux restaurants à Paris. L'administration a écarté la comptabilité de la SARL et a procédé à la reconstitution de ses recettes, puis, faisant application du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, a considéré comme des bénéfices distribués à M. A...M'B... la moitié des suppléments de recettes ainsi déterminés. La cour administrative d'appel de Paris a prononcé une réduction partielle de ces cotisations, à proportion de la déduction des résultats de la SARL Délice Time, par voie de compensation d'assiette, de charges d'exploitation qui n'avaient pas été comptabilisées, correspondant à des factures d'électricité pour des montants de 5 423,81 euros en 2005 et de 3 746,78 euros en 2006, des frais d'assurance pour un montant de 488,47 euros en 2006, des loyers pour des montants de 18 562,12 euros en 2005 et de 21 765,16 euros en 2006 et des droits de voirie pour un montant de 2 000 euros en 2005. Le ministre se pourvoit en cassation contre cet arrêt, en tant qu'il a prononcé ces déductions. M. A... M'B... a introduit un pourvoi incident contestant cet arrêt en tant que la cour ne l'a pas intégralement déchargé des impositions litigieuses.

Sur le pourvoi du ministre :

2. Aux termes du 1 de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; (...) ". Selon le premier alinéa de l'article 110 de ce code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. ". En vertu du 1 de l'article 39 du même code, rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 de ce code : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main d'oeuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire (...) ".

3. Même si l'administration n'a, pour l'application des dispositions citées au point 2, regardé comme des revenus distribués que les seules omissions de recettes résultant de l'exploitation de la SARL Délice Time, sans majorer ces revenus des charges déclarées de la SARL dont elle avait refusé la déductibilité, il était loisible à M. A... M'B... d'apporter la preuve que d'autres charges résultant de cette exploitation, qui n'avaient pas, à tort, été comptabilisées, devaient être prises en compte pour déterminer le montant du bénéfice net réputé distribué. Par suite, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en faisant droit à la demande de déduction de charges non comptabilisées pour la détermination du montant des revenus distribués des années 2005 et 2006.

4. En revanche, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la partie du bénéfice regardé comme distribué afférente aux droits de voirie acquittés par la SARL Délice Time correspondait à des charges comptabilisées par cette SARL que l'administration avait, dans un premier temps, refusé de regarder comme déductibles pour, ensuite, abandonner ce redressement. Le ministre est donc fondé à soutenir que la cour a dénaturé les pièces du dossier en faisant droit à due concurrence à la demande de réduction du bénéfice regardé comme distribué et à demander l'annulation de l'arrêt attaqué qu'en tant qu'il s'est prononcé sur la déduction des droits de voirie au titre de 2005.

Sur le pourvoi incident :

5. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'après avoir écarté la comptabilité de la SARL Délice Time, l'administration a reconstitué ses recettes des exercices 2005 et 2006 en opérant la moyenne d'une première reconstitution fondée sur l'application à ses achats revendus du coefficient multiplicateur observé en 2003, d'une deuxième reconstitution fondée sur ses recettes encaissées par carte bancaire auxquelles l'administration a appliqué des coefficients représentatifs de la part de ses recettes encaissées en espèces et de ses autres recettes par rapport aux recettes encaissées par carte bancaire, telle qu'observée sur un échantillon de justificatifs de ses recettes journalières totales pour la période du 25 octobre au 20 novembre 2007, et d'une troisième reconstitution fondée sur les achats de vins de la société, auxquels elle a appliqué les prix constatés au cours de la vérification de comptabilité pour déterminer les recettes correspondant aux ventes de vins, avant d'appliquer à ces recettes, pour évaluer le chiffre d'affaires total de la société, un coefficient déterminé en fonction de la part des boissons dans le chiffre d'affaires total du restaurant évaluée d'après le même échantillon de justificatifs des recettes journalières.

6. La cour, qui a suffisamment motivé son arrêt dès lors qu'elle n'était pas tenue de répondre à tous les arguments du requérant, concernant notamment la nature du commerce exploité et la divergence de résultats entre les trois méthodes de reconstitution utilisées par l'administration, n'a pas dénaturé les faits qui lui étaient soumis et qu'elle a souverainement appréciés en estimant, d'une part, que la canicule du mois d'août 2003 n'avait pas eu un impact déterminant sur les conditions d'exploitation de la SARL Délice Time, qui soutenait que cet évènement climatique avait renchéri le coût de certains de ces achats et, d'autre part, en refusant de reconnaître le caractère excessivement sommaire des méthodes de reconstitution utilisées par l'administration dès lors que l'échantillon avait été fourni par la société elle-même.

7. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi incident de M. A... M'B... doit être rejeté.

Sur le règlement au fond :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans la mesure de la cassation prononcée au point 4, l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

9. Il résulte de l'instruction que les droits de voirie en litige avaient été déduits du résultat déclarés de la SARL Délice Time et qu'au stade de la réponse aux observations du contribuable, l'administration avait renoncé à remettre en cause la déduction ainsi opérée. Par suite, M. A... M'B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande sur ce point.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à M. A... M'B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 27 novembre 2014 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé en tant qu'il s'est prononcé sur la déduction des droits de voirie au titre de 2005.

Article 2 : Le surplus du pourvoi du ministre, le pourvoi incident de M. A...M'B... et le surplus de la requête d'appel de M. A...M'B..., en tant qu'il portait sur la déduction des droits de voirie, sont rejetés.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 2 000 euros à M. A...M'B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie et des finances et à M. C... A...M'B....


Synthèse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 387688
Date de la décision : 17/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 17 mar. 2017, n° 387688
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Ophélie Champeaux
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SCP ROUSSEAU, TAPIE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:387688.20170317
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