Vu la procédure suivante :
M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Nantes la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 à 2007, ainsi que des suppléments de contributions sociales mis à sa charge au titre des années 2005 et 2006. Par un jugement n° 1000359 - 104455 du 4 juillet 2013, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence d'un dégrèvement intervenu en cours d'instance et lui avoir accordé le bénéfice d'une demi-part supplémentaire au titre des années 2006 et 2007, le tribunal administratif a rejeté le surplus de ses demandes.
Par un arrêt n° 13NT02554 du 9 avril 2015, faisant partiellement droit à l'appel formé par M. B...contre cet arrêt, en tant qu'il lui faisait grief, la cour administrative d'appel de Nantes a déchargé le contribuable des suppléments d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2006 et 2007 et des suppléments de contributions sociales mis à sa charge au titre de l'année 2006 et rejeté le surplus de ses conclusions portant sur l'année 2005.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 15 juin et 15 septembre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt en tant qu'il lui fait grief ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire entièrement droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Pierre Lombard, auditeur,
- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de M. B...;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite d'un contrôle sur pièces de son dossier fiscal ainsi que de celui de la SCI Le Shogun dont il était l'unique associé, M. B...qui exerce la profession de voyageur-représentant-placier, s'est vu notifier des rectifications de son revenu imposable au titre des années 2005 à 2007. M. B...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 9 avril 2015 de la cour administrative d'appel de Nantes qui, après avoir partiellement droit à l'appel qu'il a formé contre le jugement du 4 juillet 2013 du tribunal administratif de Nantes, a rejeté ses conclusions tendant à la décharge en droits et pénalités des suppléments d'impôts auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2005.
2. D'une part, aux termes du premier alinéa de l'article 4 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques : " Nul ne peut, s'il n'est avocat, assister ou représenter les parties, postuler et plaider devant les juridictions et les organismes juridictionnels ou disciplinaires de quelque nature que ce soit, sous réserve des dispositions régissant les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ". Aux termes du premier alinéa de l'article 6 de cette même loi : " Les avocats peuvent assister et représenter autrui devant les administrations publiques, sous réserve des dispositions législatives et réglementaires ". Il résulte de ce qui précède que, sous réserve des dispositions législatives et réglementaires excluant l'application d'un tel principe dans les cas particuliers qu'elles déterminent, les avocats ont qualité pour représenter leurs clients devant les administrations publiques sans avoir à justifier du mandat qu'ils sont réputés avoir reçu de ces derniers, dès lors qu'ils déclarent agir pour leur compte. Aucune disposition législative ou réglementaire applicable au déroulement de la procédure d'imposition ne subordonne la possibilité pour un avocat de représenter un contribuable à la justification du mandat qu'il a reçu.
3. D'autre part, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " l'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...). / Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ". Pour l'application de ces dispositions, il y a lieu de considérer que, sauf stipulation contraire, le mandat donné à un conseil ou à tout autre mandataire par un contribuable pour recevoir l'ensemble des actes de la procédure d'imposition et y répondre emporte élection de domicile auprès de ce mandataire. Par suite, lorsqu'un tel mandat a été porté à la connaissance de l'administration fiscale, celle-ci est en principe tenue d'adresser au mandataire l'ensemble des actes de la procédure d'imposition. Lorsque le mandataire du contribuable a la qualité d'avocat et que celui-ci déclare que son client a élu domicile à son cabinet, l'administration fiscale est tenue de lui adresser les actes de la procédure d'imposition sans qu'il soit besoin d'exiger la production d'un mandat exprès.
4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la réponse du conseil de M. B...à la proposition de rectification du 23 décembre 2008 relative à l'année 2005, adressée le 20 février 2009 à l'administration fiscale, indiquait que son client avait élu domicile à son cabinet " pour le besoin des présentes et de leurs suites ". Par une seconde lettre en date du 15 juillet 2009, ce même conseil, qui avait la qualité d'avocat, a indiqué que M. B... élisait domicile à son cabinet pour la période du 9 juillet au 31 août 2009.
5. Ainsi qu'il a été dit au point 2, un avocat est dispensé de justifier de l'existence du mandat reçu de son client et il lui suffit de déclarer agir au nom et pour le compte de celui-ci. En l'espèce, les courriers adressés à l'administration fiscale par le conseil de M. B... indiquaient expressément l'élection de domicile du contribuable à son cabinet pour la durée de la procédure et à tout le moins, durant la période estivale. En jugeant que ces courriers n'établissaient pas que le contribuable avait élu domicile au cabinet de son conseil au motif qu'ils étaient " extérieurs au mandat " reçu par ce dernier, la cour a commis une erreur de droit.
6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que M. B...est fondé à demander l'annulation de l'article 4 de l'arrêt qu'il attaque.
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M.B..., au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L'article 4 de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 9 avril 2015 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans la limite de la cassation ainsi prononcée, à la cour administrative d'appel de Nantes.
Article 3 : L'Etat versera à M. B...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au ministre de l'économie et des finances.